Avis 20213279 Séance du 13/01/2022
Consultation et reproduction, par dérogation aux délais fixés par l'article L213-2 du code du patrimoine, dans le cadre d'une recherche scientifique, du dossier
de la Cour de Justice de Dordogne (Juridiction d'exception) concernant le commandant X,, né le X à X et X, côté X.
Monsieur X a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 17 mai 2021, à la suite du refus opposé par le directeur chargé des Archives de France à sa demande de consultation et reproduction, par dérogation aux délais fixés par l'article L213-2 du code du patrimoine, dans le cadre d'une recherche scientifique, du dossier de la Cour de Justice de Dordogne (Juridiction d'exception) concernant le commandant X, né le X à X et X, côté X.
En l'absence de réponse du directeur chargé des Archives de France à la date de sa séance, la commission rappelle, d’une part, qu’en application des dispositions du c) du 4° et du 5° du I de l’article L213-2 du code du patrimoine, les documents relatifs aux affaires portées devant les juridictions, dont relèvent les documents demandés, deviennent librement communicables à l’expiration d’un délai de soixante-quinze ans à compter de la date du document ou du document le plus récent inclus dans le dossier, ou d’un délai de vingt-cinq ans à compter de la date du décès de l’intéressé si ce dernier délai est plus bref. Ce délai est porté à cent ans à compter de la date du document ou vingt-cinq ans à compter du décès de l'intéressé, lorsque le document se rapporte à une personne mineure.
La commission comprend des pièces du dossier que les documents sollicités se rapporte à des affaires jugées entre 1944 et 1946. Elle déduit de ces éléments que les délais évoqués au point précédent sont, en l’espèce, susceptibles d’être échus. Si tel était le cas, les documents d’archives publiques demandés seraient alors librement communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de ces dispositions.
La commission rappelle que les modalités d'accès aux archives publiques sont fixées à l'article L311-9 du code des relations entre le public et l’administration auquel renvoie l'article L213-1 du code du patrimoine.
En application de ces dispositions, l'accès aux archives publiques s'exerce notamment, au choix du demandeur et dans la limite des possibilités techniques de l'administration, soit par consultation gratuite sur place, soit par courrier électronique et sans frais lorsque le document est disponible sous forme électronique, soit, sous réserve que la reproduction ne nuise pas à la conservation et à l'intégrité physique du document, par la délivrance d'une copie sur un support identique à celui utilisé par l'administration ou compatible avec celui-ci et aux frais du demandeur, sans que ces frais puissent excéder le coût de cette reproduction et de l’envoi du document, soit enfin, par publication des informations en ligne, à moins que les documents ne soient communicables qu'à l'intéressé en application de l'article L. 311-6. La commission précise que les frais autres que le coût de l'envoi postal ne peuvent excéder des montants définis par l'arrêté conjoint du Premier ministre et du ministre du budget du 1er octobre 2001, à savoir, dans le cas de copies réalisées sur support papier, 0,18 euro la page en format A4, dispositions qui s'appliquent aussi bien aux collectivités territoriales qu'à l'État et à ses établissements publics,
Le libre choix par le demandeur des formes dans lesquelles s'effectue la communication connaît plusieurs tempéraments destinés à concilier le droit d'accès avec le bon fonctionnement du service public et la bonne conservation des documents d'archives qui, en général, ne doivent pas être photocopiés. Ainsi, le droit d'accès s'exerce-t-il dans la limite des possibilités techniques de l'administration conservant les documents ainsi que dans la limite des manipulations et techniques de reproduction compatibles avec leur conservation. En effet, si le demandeur ne souhaite pas bénéficier d'une communication gratuite sur place, la reproduction, à ses frais, doit être envisagée. Si la photocopie doit être écartée afin de préserver un original fragile, la reproduction peut prendre une autre forme, notamment celle d'une photographie, à condition que celle-ci ne soit pas, elle aussi, de nature à fragiliser le document original. Le caractère envisageable de la reproduction photographique ou de tout autre mode de reproduction doit être laissé à l'appréciation des personnels scientifiques et techniques responsables de la conservation des fonds.
La commission émettrait dans cette première hypothèse un avis favorable à la demande, sous ces réserves.
D’autre part, la commission comprend des pièces du dossier que le dossier d’archives publiques sollicité est susceptible de contenir des documents qui ne sont pas librement communicables, des pièces à caractère judiciaire postérieures à la clôture des procès et des débats étant susceptibles d’y avoir été versées.
Si tel était le cas, la commission rappelle que l'arrêté du 24 décembre 2015, pris en application de l’article L213-3 du code du patrimoine, par dérogation aux délais légaux de communicabilité des archives publiques précisées à l’article L213-2 du même code, a autorisé la libre consultation des archives relatives à la Seconde Guerre mondiale, et notamment des documents relatifs aux affaires portées devant les juridictions d’exception instaurées par le Gouvernement provisoire de la République française.
La commission estime que le dossier sollicité, qui est couvert par cet arrêté, est en tout état de cause librement consultable. Elle précise toutefois que cette autorisation de consultation n’entraîne, en application de l’arrêté précité du 24 décembre 2015, pas de droit automatique à la reproduction ou à la transmission des documents.
L’administration des archives peut, sur demande expresse, consentir à d’autres modalités d’accès que la consultation, suivant une procédure identique à l’autorisation de consultation par dérogation définie à l’article L213-3 du code du patrimoine, après accord de l’autorité dont émane les documents.
La commission ajoute qu’afin de déterminer s’il y a lieu ou non de faire droit à cette demande, il appartient à l’autorité saisie de mettre en balance les différents intérêts en présence à savoir, d’une part, l’intérêt légitime du demandeur et d’autre part, les intérêts que la loi a entendu protéger. La pesée de l’un et des autres s’effectue en tenant compte de l’écoulement du temps ainsi que, le cas échéant, de la circonstance que ces documents ont déjà fait l’objet d’une autorisation de consultation anticipée ou ont été rendus publics. L'examen de la demande peut aussi conduire à prendre en considération la capacité du demandeur à respecter la confidentialité des informations qui lui seront communiquées, l’impossibilité pour lui de consulter les documents sur place ou encore la nécessité de préserver la conservation et à l'intégrité physique des documents demandés.
En l’espèce, la commission relève que le dossier demandé se rapporte à des documents concernant une période emblématique de l’histoire, dont l’étude est encouragée par l’arrêté du 14 décembre 2015. Elle note, par ailleurs, que le demandeur s’est engagé à respecter la confidentialité des documents demandés, qu’il entend utiliser dans le cadre d’une recherche scientifique. Compte tenu de ces éléments, la commission estime que la reprographie de ces documents d’archive, qui présente un intérêt tout particulier pour le demandeur, ne conduirait pas, en l’espèce, à porter atteinte aux intérêts que la loi a entendu protéger.
Sous réserve que la reproduction ne nuise pas à la conservation et à l'intégrité physique des documents demandés, la commission émettrait donc également, dans cette seconde hypothèse, un avis favorable à la demande.