Avis 20202269 Séance du 29/10/2020
Communication de l’entier dossier, rapports et évaluations, relatif à l’information préoccupante concernant les enfants de son client, X, classée sans suite le 15 avril 2019 par l'ASE.
Maître X, X, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 3 août 2020, à la suite du refus opposé par le président du conseil départemental de la Loire-Atlantique à sa demande de communication de l’entier dossier, rapports et évaluations, relatif à l’information préoccupante concernant les enfants de son client, X, classée sans suite le 15 avril 2019 par l'ASE.
La commission, qui a pris connaissance de la réponse du président du conseil départemental de Loire-Atlantique, rappelle qu'aux termes de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration, sont considérés comme documents administratifs, « quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l’État, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission. Constituent de tels documents notamment les dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès-verbaux, statistiques, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles, correspondances, avis, prévisions, codes sources et décisions. »
La commission en a déduit que les documents élaborés par les services de l'aide sociale à l'enfance avant l'ouverture éventuelle d'une procédure judiciaire ou juridictionnelle, et sans être établis en vue de celle-ci, qu'ils aient ou non été ensuite transmis à l'autorité judiciaire, constituent des documents administratifs, communicables dans les conditions et sous les réserves prévues par le livre III du code des relations entre le public et l'administration. Il en va ainsi des correspondances entre les services intéressés, des rapports et notes établis pour les besoins de l’administration, des pièces retraçant les échanges entre le président du conseil départemental et les parents du mineur ou les accueillants familiaux (avis n° 20152463 du 10 septembre 2015).
Revenant sur ses avis antérieurs, elle précise que revêtent également un caractère administratif, les rapports d'évaluation sociale établis par les services de l'aide sociale à l'enfance en dehors de toute sollicitation de l'autorité judiciaire, y compris lorsque les services préconisent, en application des dispositions de l'article L226-4 du CASF, la transmission du dossier au procureur de la République en vue de la saisine du juge des enfants. La commission estime, en effet, que ces rapports ont été élaborés par l'administration dans le cadre de ses missions de service public définies par le code de l'action sociale et des familles et qu'ils n'ont pas été élaborés, à la différence du courrier de transmission lui-même, en vue de la saisine de l'autorité judiciaire, cette transmission résultant d'une obligation légale prévue par l'article L226-4 du CASF lorsque certaines circonstances sont réunies, lesquelles sont révélées par la mission administrative d'évaluation confiée au service de l'aide sociale à l'enfance. (conseil 20201272 du 14 mai 2020)
La commission en déduit que lorsque ces documents administratifs ont été transmis au procureur de la République ou au juge des enfants, il appartient à l'autorité administrative saisie d'une demande de communication de ce document de rechercher, à la date à laquelle elle se prononce, les suites données à cette transmission ou susceptibles de l'être, afin de déterminer, à moins que l'autorité judiciaire compétente ait donné son accord, si la communication du document sollicité est de nature à porter atteinte au déroulement de procédures juridictionnelles ou d'opérations préliminaires à de telles procédures en empiétant sur les prérogatives de cette autorité (CE, 21 octobre 2016, CHSCT de l'établissement d'Amiens Nord de la société Goodyear Dunlop Tyres France, n° 380504, mentionné aux Tables du Recueil ; 30 décembre 2015, Société Les Laboratoires Servier, n° 372230, Rec. p. 493).
Revêtent, en revanche, un caractère judiciaire, les documents élaborés par les services de l'aide sociale à l'enfance à la demande de l'autorité judiciaire, procureur de la République ou juge des enfants, qu'une procédure judiciaire ait ou non été ouverte, par exemple dans le cadre d'un soit transmis ou du suivi d'une mesure de protection judiciaire. La commission demeure donc incompétente pour en connaître et il appartient au demandeur de s'adresser directement à l'autorité judiciaire.
En application de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration, les documents administratifs comportant des informations couvertes par le secret de la vie privée, qui porteraient un jugement de valeur sur un tiers, personne physique nommément désignée ou facilement identifiable, ou feraient apparaître le comportement d'un tiers, autre qu'une personne chargée d'une mission de service public, dès lors que sa révélation serait susceptible de lui porter préjudice (plaintes, dénonciations, etc.), ne peuvent être communiqués qu'à la personne intéressée et, lorsque celle-ci est mineure, à ses parents ou à la personne qui exerce l'autorité parentale.
Au regard des nouvelles conditions d’appréciation par la commission de la nature administrative ou judiciaire des rapports d'évaluation sociale élaborés par les services de l'aide sociale à l'enfance, celle-ci considère que les documents sollicités sont des documents administratifs communicables aux demandeurs, sous réserve de l'occultation préalable des mentions protégées en application des dispositions de l'article L311-6.
Prenant acte de ce que le rapport d'évaluation a été transmis au demandeur par le président du conseil départemental, la commission déclare le dossier sans objet sur ce point.
S'agissant de l'information préoccupante, la commission rappelle qu'il résulte des dispositions de l’article L.226-9 du code de l’action sociale et des familles que les informations recueillies par le service national d’accueil téléphonique pour l’enfance en danger (SNATED) sont couvertes par le secret professionnel et que la communication des documents transcrivant les appels reçus par ce service, qui sont ainsi couverts par un secret protégé par la loi, au sens du g) du 2° de l'article L311-5 du code des relations entre le public et l'administration, est par suite exclue, sans qu’une exception puisse être tirée de la qualité d’intéressé ou non du demandeur (conseil n°20101913 du 6 mai 2010).
La commission émet par suite un avis défavorable à la communication de la fiche transcrivant l'appel reçu par le SNATED.