Avis 20201492 Séance du 25/06/2020

Communication, au format papier et numérique, de l'intégralité du protocole signé entre EDF et l’État, fixant les conditions d'indemnisation de la fermeture des 2 réacteurs nucléaires de la centrale de Fessenheim.
Madame X, X, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 27 janvier 2020, à la suite du refus opposé par le directeur général d'EDF à sa demande de communication, au format papier et numérique, de l'intégralité du protocole signé entre EDF et l’État fixant les conditions d'indemnisation de la fermeture des deux réacteurs nucléaires de la centrale de Fessenheim. La commission rappelle d'une part que l'article L124-2 du code de l'environnement qualifie d'informations relatives à l'environnement toutes les informations disponibles, quel qu'en soit le support, qui ont notamment pour objet : « 1º L'état des éléments de l'environnement, notamment l'air, l'atmosphère, l'eau, le sol, les terres, les paysages, les sites naturels, les zones côtières ou marines et la diversité biologique, ainsi que les interactions entre ces éléments ; 2º Les décisions, les activités et les facteurs, notamment les substances, l'énergie, le bruit, les rayonnements, les déchets, les émissions, les déversements et autres rejets, susceptibles d'avoir des incidences sur l'état des éléments visés au 1º ; 3º L'état de la santé humaine, la sécurité et les conditions de vie des personnes, les constructions et le patrimoine culturel, dans la mesure où ils sont ou peuvent être altérés par des éléments de l'environnement, des décisions, des activités ou des facteurs mentionnés ci-dessus (...) ». Selon les articles L124-1 et L124-3 du même code, le droit de toute personne d'accéder à des informations lorsqu'elles sont détenues, reçues ou établies par les autorités publiques ou pour leur compte, s'exerce dans les conditions définies par le titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve des dispositions du chapitre IV du titre II du livre I du code de l'environnement. A cet égard, les articles L124-4 et L124-5 précisent les cas dans lesquels l'autorité administrative peut rejeter une demande d'information relative à l'environnement. La commission estime par ailleurs que si, en vertu de l'article L311-2 du code des relations entre le public et l’administration, sont en principe exclus provisoirement du droit à communication les documents préparatoires à une décision administrative, jusqu'au jour où cette décision intervient, et que si le II de l'article L124-4 du code de l'environnement permet de rejeter une demande portant sur des documents en cours d'élaboration, aucune disposition de ce chapitre ne prévoit, en revanche, la possibilité de refuser l'accès aux documents qui s'inscrivent dans un processus préparatoire à l'adoption d'un acte qui n'est pas encore intervenu, dès lors que ces documents sont eux-mêmes achevés et que la demande est formulée dans le cadre de la recherche d'informations relatives à l'environnement. La commission relève d'autre part qu'aux termes de l’article 19 de la loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire, désormais codifié à l'article L125-10 du code de l'environnement, qu’elle est compétente pour interpréter conformément au B de l’article L342-2 du code des relations entre le public et l’administration, toute personne a le droit d'obtenir, auprès de l'exploitant d'une installation nucléaire de base, les informations détenues sur les risques liés à l'exposition aux rayonnements ionisants pouvant résulter de cette activité et sur les mesures de sûreté et de radioprotection prises pour prévenir ou réduire ces risques ou expositions, dans les conditions définies aux articles L124-1 à L124-6 du code de l'environnement. Elle estime que, eu égard à l’objet de ces dispositions, qui visent à assurer un degré élevé de transparence et à permettre au public d’apprécier si et dans quelle mesure il est ou pourrait être exposé à des rayonnements ionisants, elles doivent être interprétées comme incluant non seulement les informations sur la nature, la quantité, la composition et le caractère nocif des émissions, mais également sur les risques d’émissions ainsi que sur les mesures prises pour les prévenir ou en limiter les effets. La commission a ainsi estimé, dans un conseil n° 20093465 du 5 novembre 2009, que les rayonnements ionisants, de même que les déchets et rejets d’effluents issus des installations nucléaires, constituent des émissions au sens de l'article L124-5 du code de l'environnement qui prévoit que la communication des informations relatives à des émissions dans l’environnement ne peut être refusée que si elle porte atteinte à la conduite de la politique extérieure de la France, à la sécurité publique ou à la défense nationale, au déroulement des procédures juridictionnelles ou à la recherche d'infractions pouvant donner lieu à des sanctions pénales, ou à des droits de propriété intellectuelle. En réponse à la demande qui lui a été adressée, l'administration a indiqué à la commission que le protocole d'indemnisation d'EDF pour la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim ne comporte aucune information relative à l'environnement au sens de ces dispositions, et qu'il n'a pas davantage été élaboré sur la base de telles informations. La commission, qui n'a pu prendre connaissance du document sollicité, comprend des informations rendues publiques que les modalités d'indemnisation d'EDF, exploitant de la centrale nucléaire de Fessenheim, portent sur deux composantes complémentaires : une part fixe, qui couvre les coûts prévisionnels de reconversion du personnel, de démantèlement, de paiement des taxes et de « post-exploitation », et une part additionnelle variable relative à la compensation du manque à gagner qui sera constaté jusqu'en 2041 dans les comptes d'EDF, calculé sur la base des coûts de marché supplémentaires nécessaires pour assurer son obligation de production légale après la fermeture de l’installation. Si, pour l'évaluation des coûts de démantèlement à compenser, les parties au protocole se sont probablement fondées sur des informations relatives, notamment, à la nature et aux volumes de déchets et de matériaux à traiter, la commission ne dispose d'aucun élément permettant de retenir que l'accord sur les modalités financières de cette indemnisation comporterait lui-même, ou ferait directement référence, à ces éventuels travaux préparatoires. Par suite, la commission prend acte, ainsi qu'elle l'a fait dans son précédent avis n° 20172449 du 11 janvier 2018, de ce que le protocole sollicité ne contient pas d'informations relatives à l'environnement au sens des dispositions précitées. La commission observe toutefois que l'administration n'a pas fait état de ce que les dispositions des articles L311-5 et L 311-6 du code des relations entre le public et l'administration feraient obstacle à la communication du protocole sollicité, qui a été signé le 27 septembre 2019 et ne revêt donc plus un caractère préparatoire. La commission estime par conséquent que ce document est communicable à Madame X, en application du droit commun d'accès aux documents administratifs, sous réserve de l'occultation des mentions qui porteraient atteinte à l'un des secrets protégés par ces dispositions, et notamment au secret des affaires.