Avis 20196020 Séance du 14/05/2020
Copie complète, en leur qualité de conseillers municipaux, du grand livre comptable de la commune extrait sous forme de fichier « excel » généré par extraction de tous les champs de la comptabilité « MAGNUS », pour les périodes suivantes :
1) immédiatement pour l'année complète 2018 ;
2) puis une fois par mois pour l'année 2019.
Monsieur X et Monsieur X, ont saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 18 décembre 2019, à la suite du refus opposé par le maire de Saint-Leu-d'Esserent à leur demande de copie complète, en leur qualité de conseillers municipaux, du grand livre comptable de la commune extrait sous forme de fichier « excel » généré par extraction de tous les champs de la comptabilité « MAGNUS », pour les périodes suivantes :
1) immédiatement pour l'année complète 2018 ;
2) puis une fois par mois pour l'année 2019.
La commission rappelle, à titre liminaire, qu'elle n'est pas compétente pour se prononcer sur les droits d'information que les conseillers municipaux tirent, en cette qualité, de textes particuliers tel l'article L2121-13 du code général des collectivités territoriales, qui dispose que : « Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ». Toutefois, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que les élus puissent se prévaloir du droit d'accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l'administration, qui est ouvert à toute personne, indépendamment des fonctions qu'elle exerce ou des mandats qu'elle détient.
La commission constate qu'elle s'est déjà prononcée, dans son précédent conseil n° 20191375 du 18 juillet 2019, sur le caractère communicable des documents sollicités et comprend qu'à la date de sa séance, aucune communication n'est intervenue.
La commission constate qu'à la date de sa séance, la demande de copie complète du grand livre comptable de la commune extrait sous forme de fichier « excel » généré par extraction de tous les champs de la comptabilité « MAGNUS », une fois par mois pour l'année 2019, visée au point 2), ne peut plus être regardée comme une demande d'abonnement n'entrant pas dans le champ du droit de communication institué par le titre III du code des relations entre le public et l'administration, mais comme tendant à la communication du grand livre comptable de la commune pour l'année complète 2019, en sus de celle présentée au titre de l'année 2018, visée au point 1).
La commission rappelle qu’il résulte de l’article L2121-26 du code général des collectivités territoriales que toute personne peut demander communication des délibérations et procès-verbaux du conseil municipal, des arrêtés municipaux, ainsi que des budgets et comptes de la commune. L’ensemble des pièces annexées à ces documents, y compris les pièces justificatives des comptes, sont communicables à toute personne qui en fait la demande, selon les modalités prévues par l’article L311-9 du code des relations entre le public et l’administration.
La commission rappelle également que, dans sa décision Commune de Sète du 10 mars 2010 (n° 303814), le Conseil d'État a jugé, à propos des dispositions de l'article L2121-26 du code général des collectivités territoriales applicables aux communes, qu'elles ne sauraient être interprétées, eu égard à leur objectif d'information du public sur la gestion municipale, comme prescrivant la communication des arrêtés portant des appréciations d'ordre individuel sur les fonctionnaires communaux. Par suite, de tels arrêtés ne peuvent être communiqués qu’après occultation de la mention du nom des intéressés et le cas échéant des autres mentions permettant d’identifier la personne concernée. Dans le prolongement de cette jurisprudence, la commission a estimé que les objectifs de transparence de la vie locale ne justifiaient pas qu'il soit dérogé au secret médical (conseil n° 20122788 du 26 juillet 2012), au secret de la vie privée (conseil n° 20121509 du 19 avril 2012 et conseil n° 20123242 du 27 septembre 2012), ou au secret des correspondances échangées entre le client et son avocat (avis n° 20111095 du 14 avril 2011). La commission considère, en revanche, qu'il n'y a pas lieu, en principe, d'opposer le secret des affaires sur le fondement de l'article L2121-26 du code général des collectivités territoriales.
La commission relève, d'une part, que dans sa décision Commune de Louviers c/ X du 13 novembre 1992, n°111439, le Conseil d'État a indiqué que les documents relatifs à l'exécution d'un budget communal sont communicables à tout moment dans la mesure où, dès lors qu'ils portent sur la situation de consommation des crédits à une date donnée, il ne s'agit pas de documents provisoires ou inachevés. La commission souligne cependant que le droit de communication prévu à l'article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration ne s'applique qu'à des documents existants ou susceptibles d’être obtenus par un traitement automatisé d’usage courant.
La commission relève, d'autre part, que le grand livre comptable constitue un document administratif communicable à toute personne qui en fait la demande en application des dispositions précitées de l'article L2121-26 du code général des collectivités territoriales, sous réserve toutefois de l'occultation des mentions protégées en application de la jurisprudence Commune de Sète.
En l'espèce, comme elle l'a indiqué dans son conseil n° 20191375, la commission estime que ne nécessitent aucune occultation le nom des agents mentionnés dans la colonne « Tiers » de l'article 6256 libellé « Missions » et dans la colonne « Désignation » de l'article 6419 libellé « Remboursements sur rémunération du personnel », le nom des personnes mentionnées dans la colonne « Tiers » des articles 6218 libellé « Autre personnel extérieur », 64138 libellé « Autres indemnités », dans la colonne « Désignation » de l'article 6558 libellé « Autres contributions obligatoires » et, enfin, dans les colonnes « Désignation » et « Tiers » de l'article 7067 libellé « Redevances et droits des services périscolaires et d'enseignement ». La commission considère, en effet, que ces informations, qui sont des données à caractère personnel, ne relèvent pas, en elles-mêmes, d'un des secrets protégés, et notamment la vie privée. Elles ne comportent pas non plus d'appréciation ou de jugement de valeur d'ordre individuel sur les personnes concernées, ni ne font apparaître un comportement dont la divulgation serait susceptible de leur porter préjudice.
La commission estime, en revanche, que l'identité des agents examinés, mentionnés dans la colonne « Désignation » de l'article 6475 libellé « médecine du travail. Pharmacie », doit être occultée.
La commission rappelle enfin qu'une demande ne peut être considérée comme abusive que lorsqu'elle vise de façon délibérée à perturber le fonctionnement d'une administration ou si elle fait peser, par son traitement, une charge qui excède les moyens dont elle dispose. Toute demande portant sur une quantité importante de documents ou le fait pour une même personne de présenter plusieurs demandes à la même autorité publique ne sont dès lors pas nécessairement assimilables à des demandes abusives.
Ainsi, si le volume des documents demandés ne peut, par lui-même, justifier légalement un refus de communication, l’administration est en revanche fondée, dans ce cas, à aménager les modalités de communication afin que l'exercice du droit d'accès reste compatible avec le bon fonctionnement de ses services. Si la demande porte sur une copie de documents volumineux qu’elle n’est pas en mesure de reproduire aisément compte tenu de ses contraintes matérielles, l'administration est notamment en droit d'inviter le demandeur à venir consulter ces documents sur place et à emporter copie des seuls éléments qu’il aura sélectionnés. Alternativement, elle peut convenir avec le demandeur d’un échéancier de communication compatible avec le bon fonctionnement des services. La commission souligne également qu'en application de l'article R311-11 du code des relations entre le public et l’administration, les frais correspondant au coût de reproduction des documents et, le cas échéant, d'envoi de ceux-ci peuvent être mis à la charge du demandeur. Ces frais sont calculés conformément aux articles 2 et 3 de l'arrêté conjoint du Premier ministre et du ministre du budget du 1er octobre 2001. L'intéressé doit être avisé du montant total des frais à acquitter, dont le paiement préalable peut être exigé. Par ailleurs, si l’administration ne dispose pas des moyens de reproduction nécessaires pour satisfaire une demande de communication portant sur un volume important de documents, elle peut faire établir un devis auprès d’un prestataire de service extérieur. Il lui appartiendra alors d'adresser le devis de ce dernier au demandeur pour qu'il y donne suite, s'il y a lieu.
En l'espèce, compte tenu de la nature des documents demandés, du destinataire de la demande et des éléments portés à sa connaissance, il n'est pas apparu à la commission que la demande révèle de la part de l’auteur une volonté de perturber le fonctionnement de la mairie de Saint-Leu-d'Esserent, ni que son traitement appelle de la part de l’administration des efforts manifestement disproportionnés.
Elle émet donc un avis favorable, sous la réserve susmentionnée.