Conseil 20183589 Séance du 08/11/2018

Possibilité d'encadrer le mode d'accès et de consultation des documents administratifs demandés au service urbanisme de la commune, en élaborant un règlement de consultation qui précise les modalités de cette voie d'accès (horaires, lieux, présence d'un agent, etc.).
La commission d’accès aux documents administratifs a examiné, dans sa séance du 8 novembre 2018, votre demande de conseil relative au contenu d'un règlement de consultation que vous envisagez d’adopter. Celle-ci s’organise autour de seize questions, relatives à la forme orale ou écrite de la demande, aux horaires de consultation sur place, au délai de communication des pièces à la forme de communication des documents administratifs, au recours à des prestataires extérieurs pour réaliser des copies, à la tarification, aux modalités de règlement d'un prestataire chargé de réaliser des copies de documents ainsi qu'aux modalités d'adoption par la commune du règlement de consultation. A titre liminaire, la commission rappelle que l’article L311-9 du code des relations entre le public et l’administration détermine les modalités de consultation des documents administratifs, dans la limite des possibilités techniques de l'administration, en ouvrant quatre options au choix du demandeur. Dès lors, la commission estime que le règlement de consultation que vous envisagez d’adopter ne peut trouver à s’appliquer que dans trois hypothèses : premièrement, si le demandeur a choisi en faveur de l’option de consultation gratuite sur place, deuxièmement, s’il n’a exprimé aucun choix en faveur des modalités prévues aux 2° à 4° de l’article précité, ou, troisièmement, si, en raison de la circonstance que la demande porte sur une copie de documents volumineux, des modalités particulières de consultations sur place ont été aménagées avec le demandeur en accord avec lui, notamment afin qu'il puisse opérer une sélection des éléments dont il pourra obtenir copie (sur ce dernier point, avis n° 20072317 du 21 juin 2007). En ce qui concerne le caractère oral ou écrit de la demande, le Conseil d’État a jugé que ne restreignait pas excessivement le droit d’accès aux documents l’exigence d’une demande écrite dans une commune de 2 500 habitants (CE 26 avril 1993, Assoc. des amis de Saint-Palais-sur-Mer, n ° 107016, aux Tables du Recueil, p. 783). Toutefois, la loi n’impose pas de forme particulière à la demande, si bien que le refus, par principe, de demandes orales par une commune disposant de moyens plus importants est susceptible, dans certaines circonstances, par exemple lorsque le demandeur souffre d’un handicap particulier, de s’analyser comme un refus de communication. Si compte tenu des moyens plus importants dont dispose votre commune, ou de contraintes particulières dont justifie le demandeur et qui font obstacle à la formulation d’une demande écrite, vous acceptez les demandes orales, la commission vous conseille, lorsque vous êtes saisi, d’accuser réception de la demande et de transmettre l’accusé au demandeur par courriel ou par voie postale afin d’engager le décompte du délai d’un mois prévu par l’article R311-13 du code des relations entre le public et l’administration et d’éviter une contestation future. En ce qui concerne les horaires de consultation, il est possible, en fonction de la taille de la commune et des moyens matériels et humains dont elle est dotée, notamment eu égard du nombre des agents administratifs (CE 28 oct. 1987, Fontaine, n° 70775), de déterminer des plages horaires et des jours précis durant lesquels la consultation pourra avoir lieu, sous réserve de ne pas porter une atteinte excessive au droit d'accès. Le Conseil d’État a ainsi admis qu’un arrêté du maire prévoie une consultation sur place les mardis et jeudis de 14 heures à 17 heures ou à une autre date convenue entre le maire et le demandeur si celui-ci ne peut être libre au jour et à l'heure fixés « eu égard à la situation de la commune » (CE 26 avr. 1993, Assoc. des amis de Saint-Palais-sur-Mer, précité). Il s’agissait en l’espèce d’une commune de 2 500 habitants. La commission considère, par suite, que, dans le cas de votre commune de 23 000 habitants, la possibilité de consulter les documents d’urbanisme trois jours par semaine est acceptable, sous réserve que, le règlement prévoie également que, si le demandeur justifie de contraintes particulières, des rendez-vous puissent être aménagés pour lui permettre de consulter les documents sollicités. Elle vous conseille, par conséquent, en fonction de la nature des pièces demandées et de leur volume, à aménager avec le demandeur un calendrier de consultation (voir avis n° 20081420 du 3 avril 2008), au besoin en faisant appel au personnel administratif d’autres services lorsque la secrétaire du service de l’urbanisme ne peut être présente. La commission rappelle que des modalités d’accès trop restrictives d'accès, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, sont analysées comme des refus, sauf à ce que la demande soit abusive au sens de l'article L311-2 du code des relations entre le public et l’administration. A cet égard, le seul volume des pièces demandées ne suffit pas à caractériser une demande comme abusive. Doivent être regardées comme abusives les demandes qui, par leur nombre ou leur caractère répétitif ou systématique, affectent le bon fonctionnement des services. Tel peut être notamment le cas des demandes récurrentes, portant sur un volume important de documents traitant, le cas échéant, de la même affaire, des demandes que le service sollicité est manifestement dans l'incapacité matérielle de traiter, ou encore des demandes portant sur des documents auquel le demandeur a déjà eu accès. La commission fonde également son appréciation sur les éléments portés à sa connaissance par le demandeur et l'administration quant au contexte dans lequel s'inscrit la demande et aux motivations qui la sous-tendent (avis n° 20172599 du 14 septembre 2017). La commission a ainsi estimé que 80 demandes de communication portant sur plus de 300 documents en dix mois à la commune de Savigny-sur-Orge excédaient, par leur fréquence et le volume des documents demandés, les sujétions que le législateur a entendu faire peser sur l'administration et visaient en réalité à perturber le bon fonctionnement du service public (avis n° 20173364 du 30 novembre 2017). La commission a également émis un avis défavorable à une demande de communication de documents portant sur un projet d’aménagement après que l’avocat demandeur avait déjà saisi la commission à dix reprises et le tribunal administratif pour contester ce projet, avant de se désister d’au moins deux instances engagées par son client (avis n° 20172782 du 14 septembre 2017). Hormis le cas des demandes abusives, la commission souligne que, lorsqu'une demande porte sur un nombre ou un volume important de documents, l'administration est fondée à étaler dans le temps la réalisation des photocopies ou, le cas échéant, la numérisation et la mise en ligne des documents, afin que l’exercice du droit d’accès reste compatible avec le bon fonctionnement de ses services. Ainsi, la commission vous conseille, dans ces circonstances, d’inviter le demandeur à procéder à une consultation sur place, afin de sélectionner les documents dont il souhaite une copie. Si, en principe, l’administration doit s’efforcer de ne pas étaler la communication sur une durée de plus d’un mois (en ce sens, avis n° 20130978 du 6 juin 2013 ; n° 20072219 du 7 juin 2007), ce délai correspondant à celui à l’aune duquel s’apprécie un refus implicite en vertu de l’article R311-13 du code des relations entre le public et l’administration, celui-ci ne doit pas être regardé comme une limite absolue si le volume des documents demandés fait manifestement obstacle au respect de ce délai ou si, de manière concertée avec le demandeur, des modalités spécifiques de consultation sur place ont été aménagées pour ce même motif. En ce qui concerne la forme de la communication des documents, la commission estime que l’article L311-9 du code des relations entre le public et l'administration ne fait pas obligation à l’administration de communiquer sous forme électronique les documents dont elle ne dispose pas déjà sous cette forme (avis n° 20163157 du 8 septembre 2016 ; conseil n° 20061580 du 13 avril 2006), ou de numériser un document disponible en version papier (avis n° 20104684 du 21 septembre 2010). En revanche, l'administration est tenue de répondre aux demandes ne présentant pas un caractère abusif et de rechercher, compte tenu du choix éventuel des demandeurs et de ses possibilités techniques, le mode de communication approprié parmi ceux énumérés par cet article. Ainsi, si elle ne dispose pas des moyens techniques de reproduction de certains documents, il lui appartient de recourir à un prestataire de services après avoir soumis un devis à l'intéressé (avis n° 20072668 du 5 juillet 2007 ; n° 20064872 du 9 novembre 2006). La commission relève qu'aucune disposition ni aucun principe n’interdit, en principe, le recours à un prestataire extérieur si une demande porte sur un nombre important de documents. Elle n’est pas compétente pour estimer l’importance du volume demandé, déterminer les modalités de paiement, directes ou indirectes du prestataire, inviter, en fonction de ce volume et de la rémunération envisagée pour la prestation, à le choisir de gré à gré ou après avoir procédé à une mise en concurrence. En ce qui concerne le tarif des copies, la commission souligne qu’en vertu de l'article R311-11 du code des relations entre le public et l’administration, « des frais correspondant au coût de reproduction et, le cas échéant, d'envoi de celui-ci peuvent être mis à la charge du demandeur. Pour le calcul de ces frais sont pris en compte, à l'exclusion des charges de personnel résultant du temps consacré à la recherche, à la reproduction et à l'envoi du document, le coût du support fourni au demandeur, le coût d'amortissement et de fonctionnement du matériel utilisé pour la reproduction du document ainsi que le coût d'affranchissement selon les modalités d'envoi postal choisies par le demandeur ». Les frais autres que le coût de l'envoi postal ne peuvent excéder des montants définis par l'arrêté conjoint du Premier ministre et du ministre du budget du 1er octobre 2001, à savoir 0,18 euro la page en format A4, 1,83 euro pour une disquette et 2,75 euros pour un cédérom. L'intéressé est avisé du montant total des frais à acquitter, dont le paiement préalable peut être exigé. La commission estime que ces dispositions ne font pas obstacle à ce qu’aucun tarif ne soit pratiqué ou à ce qu’un tarif de niveau inférieur soit fixé. La commission a déjà précisé que, lorsque l’administration est tenue d’externaliser la prestation en raison de ses propres contraintes techniques, elle considérait que le barème fixé par l’arrêté précité ne s’appliquait pas. L’administration est alors fondée à facturer le prix exact de la reproduction, par le prestataire, des documents en cause. Un devis, permettant au demandeur de connaître le détail de la prestation, doit cependant lui être préalablement soumis pour qu’il décide d’y donner suite, s’il y a lieu (avis n° 20130595 du 20 juin 2013, n° 20161394 du 12 mai 2016). L’absence de devis préalable ou d’indications suffisantes de ce devis justifiant le montant réclamé pour réaliser les copies, ou encore la présentation d’un devis dont le montant serait manifestement excessif, sont assimilables à un refus de communication de la part de l’administration qui a été saisie. En cas de recours à un prestataire extérieur et d'acceptation par le demandeur après soumission du devis, il appartient à l'administration de faire exécuter les travaux en exigeant, si elle le souhaite, le règlement préalable des frais de reproduction (avis n° 20071101 du 22 mars 2007). La commission considère que tous les demandeurs fondant leur demande sur le code des relations entre le public et l’administration, indépendamment de leur qualité, sont soumis aux modalités de tarification précitées. La commission n’est toutefois pas compétente pour se prononcer sur les modalités applicables aux élus, à raison des droits qu’ils tirent d’autres textes, notamment des dispositions particulières de l'article L2121-13 du code général des collectivités territoriales, aux termes desquelles« Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ». Enfin, l’absence de régie de recettes ne fait pas obstacle à la délivrance de copies au demandeur, l'administration n'étant pas tenue de facturer le montant de la reproduction des documents au demandeur (avis n° 20073084 du 13 septembre 2007 ; n° 20064872, précité) ou pouvant émettre un titre exécutoire (avis n° 20135277 du 30 janvier 2014). La commission n’est toutefois pas compétente pour vous conseiller quant aux modalités d’organisation de vos services ou du paiement du prestataire, et notamment quant à la possibilité de vous dispenser d’une régie de recettes, eu égard à la situation de votre commune, ou de prévoir un règlement direct du prestataire par le demandeur, dans le respect des modalités de tarification précitées, ces questions ne relevant pas des précisions du code des relations entre le public et l’administration. Enfin, en ce qui concerne les modalités d’adoption du règlement de consultation dans les communes, par seul arrêté du maire ou par délibération du conseil municipal, la commission n’est pas compétente pour se prononcer, cette matière ne relevant pas des prévisions du code des relations entre le public et l’administration.