Avis 20182372 Séance du 08/11/2018

Communication, sur le fondement des trois motifs prévus à l'article L1110-4 du code de la santé publique, de l'intégralité du dossier médical de Monsieur X décédé le 14 décembre 2017 dans le groupe hospitalier de la Pitié Salpêtrière.
Maître X, conseil des ayants droit de Monsieur X, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 25 juillet 2018, à la suite du refus opposé par le directeur général de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) à sa demande de communication, sur le fondement des trois motifs prévus à l'article L1110-4 du code de la santé publique, de l'intégralité du dossier médical de Monsieur X décédé le 14 décembre 2017 dans le groupe hospitalier de la Pitié Salpêtrière. La commission rappelle d'abord qu'en application des dispositions combinées des articles L1110-4 et L1111-7 du code de la santé publique, telles que le Conseil d'État les a interprétées, les informations médicales concernant une personne décédée sont communicables à ses ayants droit, son concubin ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité sous réserve que cette demande se réfère à l'un des trois motifs prévus à l'article L1110-4 - à savoir connaître les causes du décès, faire valoir leurs droits ou défendre la mémoire du défunt, dans la mesure strictement nécessaire au regard du ou des objectifs poursuivis et à condition que le patient ne s'y soit pas opposé de son vivant. Ces dispositions n'instaurent donc au profit des ayants droit d'une personne décédée qu'un droit d'accès limité à certaines informations médicales, et non à l’entier dossier médical. La commission souligne que, par ces dispositions, le législateur a clairement entendu restreindre aux seules personnes qui peuvent se prévaloir de la qualité d'ayant droit, à l'exclusion de toute autre catégorie de tiers tels que la famille et les proches, la dérogation ainsi aménagée au secret médical du défunt. C'est donc uniquement dans les cas où ils justifient de la qualité d'ayant droit que les membres de la famille peuvent obtenir communication du dossier médical. La commission précise ensuite que l’application de ces dispositions à chaque dossier d’espèce relève de l’équipe médicale qui a suivi le patient décédé, ou, à défaut, d’autres médecins compétents pour apprécier si l’ensemble du dossier médical ou seulement certaines pièces se rattachent à l’objectif invoqué, quel qu’il soit (causes du décès, mémoire du défunt, défense de droits). Il n’appartient pas aux médecins chargés de cet examen du dossier d’apprécier l’opportunité de la communication de tout ou partie du dossier, mais seulement l’adéquation des pièces communiquées aux motifs légaux de communication invoqués par le demandeur. L’établissement peut ainsi être conduit, selon les cas, à transmettre l’ensemble du dossier ou bien à se limiter à la communication des pièces répondant strictement à l’objectif poursuivi. L’équipe médicale n’est, en outre, nullement liée par une éventuelle liste de pièces réclamées par le demandeur. A cette fin, la commission souligne que si l’objectif relatif aux causes de la mort n’appelle, en général, pas de précisions supplémentaires de la part du demandeur, il en va différemment des deux autres objectifs. Invoqués tels quels, ils ne sauraient ouvrir droit à communication d’un document médical. Le demandeur doit ainsi préciser les circonstances qui le conduisent à défendre la mémoire du défunt ou la nature des droits qu’il souhaite faire valoir, afin de permettre à l’équipe médicale d’identifier le ou les documents nécessaires à la poursuite de l’objectif correspondant. En l’espèce, la commission relève que la demanderesse, Mme X, a la qualité d’ayant droit de son époux défunt et note en outre que les objectifs de la demande, indiqué par Madame X, sont, conformément aux dispositions de l’article L1110-4 du code de la santé public, de connaître les causes du décès, faire valoir ses droits et défendre la mémoire du défunt. Toutefois, après avoir pris connaissance de la réponse de l'administration adressée le 9 mars 2017 à Maître X, la commission constate que Madame X n’a, en particulier, pas précisé dans sa demande les circonstances qui la conduisent à défendre la mémoire du défunt ou la nature des droits qu’elle souhaite faire valoir. Le directeur général de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris pouvait ainsi légalement refuser de faire droit à la demande dont il était saisi s’agissant des documents nécessaires à la poursuite de ces deux objectifs. La commission émet donc un avis favorable à la communication des seuls documents se rapportant à l’objectif relatif aux causes de la mort. Elle émet par suite un avis défavorable à la communication de l’intégralité du dossier médical de Monsieur X à son épouse et invite Madame X, si elle le souhaite, à préciser sa demande afin de permettre d’identifier si des documents du dossier médical de son époux sont nécessaires à la poursuite des deux objectifs précités. La commission précise enfin, à toutes fins utiles, que la volonté du patient exprimée de son vivant de s’opposer à la communication d’informations de son dossier médical ne peut résulter que d’un écrit de sa part en ce sens ou d’éléments concrets et précis en ce sens.