Avis 20180036 Séance du 19/04/2018

Communication des documents suivants établis dans le cadre du contrôle d'un site potentiellement pollué sur lequel était édifiée une usine, démolie en 2008, soumise au régime des installations classées pour la protection de l'environnement : 1) le diagnostic des pollutions des sols par les hydrocarbures réalisé à partir d'avril 2017 par le bureau d'étude X ; 2) le diagnostic amiante des déchets réalisé à partir d'octobre 2017 par les cabinets X et X ; 3) le constat d'huissier réalisé vers octobre 2017.
Monsieur X a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 2 janvier 2018, à la suite du refus opposé par le président du conseil régional de la Réunion à sa demande de communication des documents suivants, relatifs à un site appartenant à cette collectivité et sur lequel étaient exploités jusqu'en 2008 des bâtiments à usage industriel, soumis au régime des installations classées pour la protection de l'environnement, destinés à la distillation du vétiver et au retraitement d'huiles usagées : 1) le diagnostic des pollutions des sols par hydrocarbures réalisé à partir d'avril 2017 par le bureau d'étude X ; 2) le diagnostic amiante des déchets réalisé à partir d'octobre 2017 par les cabinets X et X ; 3) le constat d'huissier réalisé vers octobre 2017. En premier lieu, en réponse à la demande qui lui a été adressée, le président du conseil régional de la Réunion a informé la commission que le document mentionné au point 2) n’existait pas. La commission ne peut, dès lors, que déclarer la demande d’avis sans objet sur ce point. En second lieu, s'agissant des autres documents sollicités, qui sont relatifs à un site appartenant au domaine privé de la région Réunion, la commission rappelle, d'une part, qu'elle est compétente pour se prononcer sur le droit d'accès garanti par l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration. Ce droit d'accès s'exerce à l'égard des documents administratifs définis à l'article L300-2 du même code comme l'ensemble des documents produits ou reçus par une autorité administrative dans le cadre de ses missions de service public. La commission rappelle qu'échappent ainsi au champ d'application de ces dispositions les actes notariés (CE 9 févr. 1983, X, n° 35292, Recueil Lebon p. 53 ; 29 juin 2001, X, n° 187311, inédite). La commission précise cependant que la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique a inséré dans le même code un article L300-3 en vertu duquel les dispositions de ce code relatives à l'accès aux documents administratifs, à la réutilisation des informations publiques et à la compétence de la commission d'accès aux documents administratifs s'appliquent également aux documents relatifs à la gestion du domaine privé de l'État et des collectivités territoriales. Il ressort des travaux parlementaires relatifs aux amendements, à l'Assemblée nationale puis au Sénat, dont sont issues ces nouvelles dispositions, qu'elles n'ont pas pour objet d'étendre la compétence de la commission à des actes juridictionnels, judiciaires ou notariés, mais de faire entrer dans le champ du droit d'accès et de la compétence de la commission les documents produits ou reçus par les autorités administratives et relatifs à la gestion du domaine privé de l'État et des collectivités locales, alors même que cette gestion n'a pas le caractère d'une mission de service public. La commission en déduit que si elle demeure incompétente pour émettre un avis sur la communication d'actes juridictionnels, judiciaires ou notariés, elle est désormais compétente pour émettre un avis sur l'accès aux documents d'une autre nature qui se rapportent à la gestion du domaine privé de l'État et des collectivités territoriales, tels que les documents sollicités en l'espèce, qui, contrairement à ce que soutient la région Réunion, se rapportent bien à la « gestion » d'un site appartenant à son domaine privé. La commission rappelle, d'autre part, que, selon les articles L124-1 et L124-3 du code de l’environnement, le droit de toute personne d'accéder à des informations relatives à l’environnement lorsqu'elles sont détenues, reçues ou établies par les autorités publiques ou pour leur compte, s'exerce dans les conditions définies par le titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve des dispositions du chapitre IV du titre II du livre I du code de l'environnement. La commission souligne ensuite qu'en vertu des dispositions du II de l'article L124-5 du code, l'autorité publique ne peut rejeter une demande portant sur une information relative à des « émissions de substances dans l'environnement » que dans le cas où sa communication porterait atteinte à la conduite de la politique extérieure de la France, à la sécurité publique ou à la défense nationale, ou encore au déroulement des procédures juridictionnelles, à la recherche d'infractions pouvant donner lieu à des sanctions pénales ou enfin à des droits de propriété intellectuelle. La commission précise que par deux arrêts c-673/13 et c-442/14 du 23 novembre 2016, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a précisé la notion d’« émissions dans l’environnement ». Elle a ainsi jugé que cette notion couvre toutes les informations sur ces émissions qui sont pertinentes pour la protection de l'environnement, notamment le rejet dans l’environnement de produits ou de substances provenant d’installations industrielles (telles que les usines et les centrales), mais également les émissions résultant de la pulvérisation d’un produit, tel qu’un produit phytopharmaceutique ou biocide, dans l’air ou de son application sur les plantes, dans l’eau ou sur le sol, pour autant que ce rejet soit effectif ou prévisible dans des conditions normales ou réalistes d’utilisation du produit ou de la substance. La commission considère, en l’espèce, que les documents mentionnés aux points 1) et 3) contiennent des informations relatives à des émissions de substances dans l'environnement, qu'ils relèvent par suite du champ d'application de ces dispositions et qu'ils sont dès lors communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration et des articles L124-1 et suivants du code de l'environnement. La commission émet dès lors, dans cette mesure, un avis favorable à la demande.