Avis 20171512 Séance du 24/05/2017
Communication de l'intégralité de son dossier personnel détenu par l'Aide sociale à l'enfance et de celui de son fils X.
Madame X a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 25 avril 2017, à la suite du refus opposé par le président du conseil départemental de la Loire-Atlantique à sa demande de communication de l'intégralité de son dossier personnel détenu par l'Aide sociale à l'enfance et de celui de son fils X.
Sur le caractère communicable des dossiers d’aide sociale à l’enfance, la commission rappelle qu’aux termes des articles L222-1 et suivants du code de l’action sociale et des familles (CASF), le président du conseil départemental (PCD) peut, « sans préjudice des pouvoirs reconnus à l’autorité judiciaire », accorder des prestations d’aide sociale à l’enfance, en particulier l’aide à domicile (article L222-2 du CASF) et le « placement administratif » (art. L222-4-2-2 du CASF), ce dernier ne pouvant être réalisé qu’avec l’accord des parents. Tout mineur accueilli hors du domicile de ses parents est placé sous la protection du président du conseil départemental.
Lorsqu’un mineur est en danger et que les mesures administratives n’ont pas permis de remédier à la situation, ou que les parents s’opposent à ces mesures (en particulier au placement), le président du conseil départemental doit, en vertu de l’article L226-4 du CASF, en aviser sans délai le procureur de la République. Ce dernier peut, en cas d’urgence, ordonner le placement provisoire de l’enfant et doit alors saisir le juge des enfants dans un délai de huit jours (article 375-5 du code civil). Parallèlement, le juge des enfants peut être saisi par les parents ou les services d’aide sociale à l’enfance, voire se saisir d’office à titre exceptionnel, et ordonner des mesures d’assistante éducative (article 375 du code civil). La décision fixe la durée de la mesure sans que celle-ci puisse, lorsqu'il s'agit d'une mesure éducative exercée par un service ou une institution, excéder deux ans. La mesure peut être renouvelée par décision motivée. L’article 375-6 du code civil permet au juge des enfants, à tout moment, de modifier ou de rapporter ses décisions d’office ou à la requête d’un tiers intéressé. Durant toute la durée du placement judiciaire, le mineur est placé sous la protection conjointe du président du conseil départemental et du juge des enfants (article L227-2 du CASF).
La commission considère que le caractère communicable des pièces qui composent le dossier d’aide sociale à l’enfance dépend de l’état de la procédure et de l’objet en vue duquel elles ont été élaborées :
1. L’ensemble des pièces qui composent le dossier détenu par les services d’aide sociale à l’enfance avant que le juge des enfants soit saisi ou que le procureur de la République soit avisé en application des dispositions mentionnées ci-dessus revêtent un caractère administratif. Il en va ainsi, en particulier, des documents relatifs au placement administratif du mineur.
2. Lorsque le juge des enfants a été saisi ou que le procureur de la République a été avisé, les documents élaborés dans le cadre de la procédure ainsi ouverte, y compris le courrier de saisine ou d’information et la décision du juge des enfants ou du procureur de la République, constituent des documents judiciaires exclus du champ d’application du livre III du code des relations entre le public et l’administration. La commission n’est donc pas compétente pour se prononcer sur leur caractère communicable.
3. En cas de placement judiciaire du mineur, les documents établis par le juge, qu’il s’agisse de ses décisions (renouvellement du placement, modifications des mesures d’assistance éducative…) ou de courriers qu’il adresse aux services d’aide sociale à l’enfance, ainsi que ceux qui ont été élaborés à l’attention de ce dernier par l’administration, dans le cadre du mandat judiciaire qui lui a été confié, revêtent un caractère judiciaire. Il en va ainsi, en particulier, des rapports périodiques sur la situation et l’évolution du mineur obligatoirement adressés au juge des enfants en vertu de l’article 1199-1 du code de procédure civile et du dernier alinéa de l’article 375 du code civil. Il n’appartient qu’au juge de procéder à la communication de tels documents s’il l’estime opportun.
En revanche, les autres documents élaborés par les autorités administratives (en particulier les services d’aide sociale à l’enfance) dans le cadre du placement judiciaire du mineur revêtent un caractère administratif et le conservent alors même qu’ils auraient été transmis au juge pour information. Il en va ainsi des correspondances entre les services intéressés, des rapports et notes établis pour les besoins de l’administration, des pièces retraçant les échanges entre le président du conseil départemental et les parents du mineur ou les accueillants familiaux…
Les documents qui, en application de ces règles, revêtent un caractère administratif sont communicables dans les conditions et sous les réserves prévues par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. Doivent ainsi être soustraits à la communication ou occultés les documents et mentions faisant apparaître le comportement de tierces personnes (en particulier le ou les mineurs concernés) et dont la divulgation pourrait leur porter préjudice (plaintes, dénonciations…), en application de l’article L311-6 de ce code.
En l'espèce, la commission constate que le fils du demandeur faisait l'objet d'un placement judiciaire ordonnée par le juge des enfants. Dans la mesure où les documents sollicités ont été élaborés dans le cadre de cette procédure, et revêtent ainsi une nature judiciaire, la commission ne peut que se déclarer incompétente pour se prononcer sur leur communication. La commission estime, en revanche, que les autres documents, s'ils existent, qui n'ont pas été transmis à l'autorité judiciaire ni établis à sa demande, sont communicables à l'intéressée, en application de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration, après occultation des éventuelles mentions révélant des éléments de la vie privée, des jugements de valeur ou le comportement de tiers alors que la divulgation de ce comportement pourrait leur porter préjudice, sous réserve que cette occultation ne prive pas d'intérêt, par leur ampleur, la communication du document occulté. La commission émet, sous ces réserves, un avis favorable.