Avis 20155497 Séance du 17/12/2015
Copie, par courrier électronique, des pièces suivantes concernant les lots n° 1 et 2 du marché public ayant pour objet des prestations de traductions de documents et d'interprétariat téléphonique, sans occultation des mentions relatives aux prix :
1) l'acte d'engagement et ses annexes concernant le lot n° 1 ;
2) le rapport d'analyse des offres correspondant à ce lot ;
3) le rapport d'analyse des offres concernant le lot n° 2.
Maître X, X, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 18 novembre 2015, à la suite du refus opposé par le directeur général de la société d'économie mixte ADOMA à sa demande de copie, par courrier électronique, des pièces suivantes concernant les lots n° 1 et 2 du marché public ayant pour objet des prestations de traductions de documents et d'interprétariat téléphonique, sans occultation des mentions relatives aux prix :
1) l'acte d'engagement et ses annexes concernant le lot n° 1 ;
2) le rapport d'analyse des offres correspondant à ce lot ;
3) le rapport d'analyse des offres concernant le lot n° 2.
La commission rappelle tout d'abord qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 1er de la loi du 17 juillet 1978 : « Sont considérés comme documents administratifs (...) quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l'État, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission ».
La commission en déduit que les documents produits ou reçus par les personnes de droit privé chargées d'une mission de service public ne constituent des documents administratifs que s'ils sont élaborés ou détenus dans le cadre de cette mission de service public. Les contrats conclus par ces personnes sur le fondement de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics ne constituent donc eux-mêmes des documents administratifs que s'ils ont un lien suffisamment direct avec leur mission de service public.
En l'espèce, la commission relève que les marchés auquels se rapportent les documents sollicités, conclus sur le fondement de l'ordonnance précitée du 6 juin 2005, portent sur des prestations de traductions de documents et d'interprétariat téléphonique dans le cadre des interventions menées par la société ADOMA auprès de demandeurs d’asile. Elle estime qu' eu égard à leur objet, ces marchés se rattachent directement à l'exécution de la mission de service public d'accompagnement des demandeurs d'asile dont est chargée la société ADOMA. Les documents sollicités constituent donc des documents administratifs au sens de l'article 1er de la loi du 17 juillet 1978, ce que, d'ailleurs, la société ADOMA ne conteste pas.
La commission rappelle ensuite qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s'y rapportent sont considérés comme des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par la loi du 17 juillet 1978. En conséquence, la communication à un candidat écarté des motifs ayant conduit la commission d'appel d'offres à ne pas lui attribuer le marché ne permet pas de refuser la communication de ces documents.
Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret en matière industrielle et commerciale, protégé par les dispositions du II de l'article 6 de cette loi. Sont notamment visées par cette réserve les mentions relatives aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics.
L'examen des offres des entreprises au regard du respect de ce secret conduit la commission à considérer que, sous réserve des particularités propres à chaque marché :
- l'offre de prix détaillée de l'entreprise retenue est en principe communicable dans la mesure où elle fait partie intégrante du marché ou du contrat.
- l'offre de prix globale des entreprises non retenues est, en principe, elle aussi communicable. En revanche, le détail technique et financier de leurs offres n'est pas communicable. De plus, doivent être occultées dans les documents préparatoires à la passation du marché (procès-verbaux, rapports d'analyse des offres) les mentions relatives aux détails techniques et financiers de ces offres.
La commission précise que les notes et classements des entreprises non retenues ne sont communicables qu'à celles-ci, chacune en ce qui la concerne, en application du II de l'article 6 de la loi du 17 juillet 1978. En revanche, les notes, classements et éventuelles appréciations de l'entreprise lauréate du marché sont librement communicables.
En réponse à la demande d'observations qui lui a été adressée, le directeur général de la société d'économie mixte ADOMA, a indiqué à la commission que les annexes n°1 et 2, portant respectivement sur les implantations géographiques des sites et, sur les quantités estimatives, n’avaient pas été jointes car elles figuraient dans le dossier de consultation des entreprises sur la base duquel la demanderesse avait formulé son offre.
La commission en prend note et déclare, dès lors, sans objet la demande d'avis sur ce point.
Le directeur général de la société d'économie mixte ADOMA a également indiqué à la commission qu'il avait refusé de communiquer l'annexe n° 3, relative au bordereau des prix unitaires, ainsi que l'ensemble des prix des attributaires des deux lots car il avait estimé que leur communication porterait atteinte à la mise en concurrence ultérieure du marché et en conséquence, à la libre concurrence, lors du renouvellement de ces marchés présentant un caractère répétitif.
La commission estime que les dispositions du II de l'article 6 de la loi du 17 juillet 1978 doivent également permettre de prévenir le risque d’atteinte à la concurrence. Il convient, toutefois, à cet égard de veiller à ménager un juste équilibre entre la protection des données confidentielles des entreprises et le droit de toute personne de connaître, dans une certaine mesure, la nature des prestations faisant l’objet d’un marché public et son coût pour la collectivité publique. Au titre de la particularité de certains marchés, la commission considère, ainsi, qu'il y a lieu de tenir compte du mode de passation du marché ou contrat, de sa nature et de son mode d'exécution. Doivent, par exemple, faire l'objet d'un examen particulier les demandes d'accès aux documents relatifs à des marchés qui s'inscrivent dans une suite répétitive de marchés portant sur une même catégorie de biens ou services et pour lesquels une communication du détail de l'offre de prix de l'entreprise attributaire à une entreprise concurrente serait susceptible de porter atteinte à la concurrence lors du renouvellement de ce marché, ou lors de la passation par la même personne, dans un délai rapproché, de marchés portant sur des prestations ou des biens analogues. Le caractère répétitif du marché s'apprécie principalement au regard de sa durée.
En l'espèce, la commission constate que si les marchés en cause ne présentent pas un caractère ponctuel, les besoins en cette matière de la société ADOMA étant au contraire permanents, ils ont été conclus pour une durée ferme de deux ans, renouvelable pour douze mois sans pouvoir dépasser trois ans. Eu égard à cette durée prévisible de trois ans, la commission estime que ces marchés ne présentent pas un caractère répétitif faisant peser des risques sur les conditions de mise en concurrence à l'échéance du marché du fait de la communication du détail des prix de l'offre de l'attributaire du marché.
La commission émet dès lors un avis favorable à la communication du bordereau des prix unitaires de l'entreprise attributaire de chacun des deux lots en cause et du rapport d'analyse des offres sans occultation, le cas échéant, du détail des prix de l'attributaire.