Conseil 20155041 Séance du 19/11/2015

Caractère communicable à une locataire de son dossier d'expulsion locative pour troubles du voisinage rejetée par le juge d'instance en mai 2015, sachant que des éléments de ce dossier, demande d'expertise psychiatrique, évocation de son état mental, risquent d'aggraver le litige l'opposant à son bailleur et à la mairie.
La commission a examiné lors de sa séance du 19 novembre 2015 votre demande de conseil relatif au caractère communicable à Madame X, de son dossier d'expulsion locative, cette communication étant, dès lors qu'il mentionne une demande d'expertise psychiatrique eu égard à son état mental, de nature à aggraver le litige l'opposant à la mairie et à son bailleur. La commission rappelle qu'en application du II de l'article 6 de la loi du 17 juillet 1978, ne sont communicables qu'à la personne intéressée les documents administratifs portant une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable ainsi que ceux faisant apparaître le comportement d'une personne, dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice. En l'espèce, la commission relève que les pièces du dossier sollicité ne font apparaître aucune appréciation ni aucun jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable autre que Madame X. Elle souligne également que les recommandations émises par la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives ainsi que la lettre par laquelle la préfecture demande au maire de Châtenoy-le-Royal de mettre en œuvre ses pouvoirs de police afin que Madame X soit soumise à une expertise psychiatrique ne révèlent pas par elles-mêmes un comportement susceptible de porter préjudice à leurs auteurs, qui agissent dans le cadre de leurs missions de service public. La commission vous précise enfin qu'aux termes du I de l'article 6 de la loi du 17 juillet 1978, ne sont pas communicables : « (...) 2° Les autres documents administratifs dont la consultation ou la communication porterait atteinte : (...) d) A la sûreté de l’État, à la sécurité publique ou à la sécurité des personnes ; (...) f) Au déroulement des procédures engagées devant les juridictions ou d'opérations préliminaires à de telles procédures, sauf autorisation donnée par l'autorité compétente (...) ». Elle considère en conséquence que la circonstance que la communication de son dossier d'expulsion locative à Madame X est susceptible d'aggraver le litige l'opposant à son bailleur et à la mairie n'est pas de nature, à elle-seule, à motiver un refus de communication en application de ces dispositions. Elle souligne enfin qu'aux termes de l'article 7-2 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement, la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives, créée dans chaque département, a pour missions de : « 1° Coordonner, évaluer et orienter le dispositif de prévention des expulsions locatives défini par le plan départemental d'action pour le logement et l'hébergement des personnes défavorisées et la charte pour la prévention de l'expulsion ; / 2° Délivrer des avis et des recommandations à tout organisme ou personne susceptible de participer à la prévention de l'expulsion, ainsi qu'aux bailleurs et aux locataires concernés par une situation d'impayé ou de menace d'expulsion. / Pour l'exercice de cette seconde mission, elle est informée par le représentant de l’État dans le département des situations faisant l'objet d'un commandement d'avoir à libérer les locaux lui ayant été signalés conformément à l'article L412-5 du code des procédures civiles d'exécution ». Elle déduit de ces dispositions que les recommandations émises ne s'inscrivent pas dans le cadre d'un processus d'élaboration d'une décision administrative déterminée dans lequel l'avis est au préalable sollicité mais que ces recommandations constituent les actes en vue desquels les dossiers sont constitués. Ces derniers perdent en conséquence leur caractère préparatoire lorsque la commission a émis la recommandation en vue de laquelle les pièces qui les composent ont été réunies. En l'espèce, la commission comprend de votre saisine que la commission a été saisie dans le cadre de la mission énoncée au 2° de l'article 7-2 de la loi du 31 mai 1990 après que le tribunal d'instance a refusé de prononcer la résiliation judiciaire du bail de Madame X et qu'elle a émis une recommandation le 21 mai 2015. Le dossier de Madame X ne revêt donc plus un caractère préparatoire au sens de la loi du 17 juillet 1978. La commission en conclut que son dossier est donc communicable à Madame X en application de l'article 6 de la loi du 17 juillet 1978 et vous suggère de le lui communiquer en réponse à sa demande du 14 octobre 2015.