Avis 20140158 Séance du 13/02/2014
Communication, sous format électronique, des documents suivants relatifs au contrat de partenariat portant sur le projet de rocade périphérique de Marseille appelée L2, sachant que le chef de mission du projet l'invite à venir consulter les documents sur place :
1) les pièces concernant l'analyse des offres ;
2) l'acte d'engagement de la société attributaire ;
3) les procès-verbaux concernant les travaux de la commission d'appel d'offres ;
4) le bordereau des prix unitaires ;
5) l'offre de prix détaillée de l'entreprise attributaire ;
6) l'ensemble des pièces contractuelles du marché et ses annexes.
Monsieur X., pour le Collectif anti-nuisances L2 (CAN L2), a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 13 janvier 2014, à la suite du refus opposé par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie à sa demande de communication, sous format électronique, des documents suivants relatifs au contrat de partenariat portant sur le projet de rocade périphérique de Marseille appelée L2, sachant que le chef de mission du projet l'invite à venir consulter les documents sur place :
1) les pièces concernant l'analyse des offres ;
2) l'acte d'engagement de la société attributaire ;
3) les procès-verbaux concernant les travaux de la commission d'appel d'offres ;
4) le bordereau des prix unitaires ;
5) l'offre de prix détaillée de l'entreprise attributaire ;
6) l'ensemble des pièces contractuelles du marché et ses annexes.
En réponse à la demande qui lui a été adressée, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie a informé la commission que les documents visés aux points 2) à 4) n'existaient pas, s'agissant d'un contrat de partenariat. La commission ne peut, dès lors, que déclarer sans objet la demande d'avis sur ces points.
La commission rappelle sa position constante en matière de contrats conclus par une personne publique dans le cadre de sa mission de service public selon laquelle, une fois signés, ces contrats et les documents qui s'y rapportent sont considérés comme des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par la loi du 17 juillet 1978. Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s’exercer dans le respect du secret en matière industrielle et commerciale, protégé par les dispositions du II de l'article 6 de cette loi.
La commission relève que les contrats de partenariat constituent une catégorie de contrats administratifs définis par l’ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004. En vertu de l’article 1er de cette ordonnance, par ces contrats, l'État ou un établissement public de l'État confie à un tiers, pour une période déterminée en fonction de la durée d'amortissement des investissements ou des modalités de financement retenues, une mission globale ayant pour objet la construction ou la transformation, l'entretien, la maintenance, l'exploitation ou la gestion d'ouvrages, d'équipements ou de biens immatériels nécessaires au service public, ainsi que tout ou partie de leur financement à l'exception de toute participation au capital. Ils peuvent également avoir pour objet tout ou partie de la conception de ces ouvrages, équipements ou biens immatériels ainsi que des prestations de services concourant à l'exercice, par la personne publique, de la mission de service public dont elle est chargée.
Lorsque, comme en l'espèce, ces contrats sont élaborés en plusieurs phases successives, dans une première phase dite de « dialogue compétitif », les différents candidats envisagent avec la personne publique un moyen de répondre aux besoins exprimés par cette dernière. A l’issue de cette phase, un « pré-contrat » incluant le cahier des charges, est proposé par la personne publique à chacun des candidats, à charge pour eux, dans la seconde phase, de le compléter en fonction du montage juridique qu’ils envisagent et des risques qu’ils sont prêts à assumer. C’est après cette phase que chaque candidat élabore son offre définitive, que l’offre économiquement la plus avantageuse est sélectionnée et que le contrat de partenariat est signé.
Le contenu des contrats de partenariat est, par nature, particulièrement étoffé, conformément à ce que prévoit l’ordonnance du 17 juin 2004 : ils comportent de nombreuses clauses dans lesquelles sont décrites avec précision les éléments financiers, juridiques, techniques et fonctionnels. Ainsi, le contrat comprend généralement : - des données relatives à la structuration juridique, financière et à ses conséquences fiscales (il s’agit par exemple des clauses relatives à la fiscalité, à la publicité foncière, aux garanties et assurances, à la modification de l’actionnariat ou encore au plan de financement) ; - des données relatives aux coûts des travaux, délais et plannings de construction (il s’agit des clauses relatives aux montants des investissements, aux délais d’exécution, au pourcentage des travaux confiés à des PME, à la prise de possession par la personne publique) ; - enfin, des données relatives aux prix, marges et prises de risque du partenaire privé (il s’agit des clauses relatives aux indemnités, loyers, sanctions, pénalités, clauses résolutoires, résiliation, survenance du terme, augmentation des coûts de financement, effets des modifications imposées par les changements dans la législation, causes légitimes). Ces informations, qui comportent une très forte valeur ajoutée, reflètent le montage juridico-financier et comptable que le partenaire privé a imaginé et mis au point pour répondre au mieux aux besoins exprimés par la personne publique et traduisent l’inventivité dont il a su faire preuve.
Au regard de ces éléments, et conformément à une position constante (cf avis n° 20072630 et 20073705 du 8 novembre 2007 ; avis n° 20080631 du 7 février 2008 ; avis n° 20092520 du 28 juillet 2009), la commission considère que si le contrat de partenariat constitue un document administratif et est, à ce titre, soumis au droit d’accès garanti par la loi du 17 juillet 1978 à l’exclusion des mentions couvertes par le secret en matière commerciale et industrielle, ce secret implique d’occulter, dans le contrat lui-même, les mentions qui définissent le montage juridico-financier et comptable ainsi mis au point par le partenaire retenu. Tel est le cas des clauses et annexes relatives à l’intéressement du cocontractant ou au calcul des pénalités.
L’offre technique est également couverte par ce secret. En revanche, le coût global de l’opération et sa ventilation par grands postes demeurent communicables dès lors qu’ils reflètent le coût du service public. La commission estime, par ailleurs, que l'occultation des mentions relevant du secret commercial et industriel n'est pas de nature à priver d'intérêt la communication du document.
S’agissant des annexes au contrat, la commission estime qu’il y a lieu de mettre à part, le cas échéant, les annexes comportant les contrats qui lient le partenaire privé à d’autres personnes privées pour l’exécution du contrat de partenariat, ces contrats conclus entre deux personnes privées ne présentant pas en principe le caractère de documents administratifs et, la loi du 17 juillet 1978 ne leur étant pas applicable, la commission est dès lors incompétente pour se prononcer sur leur caractère communicable. La commission précise qu'il en est toutefois différemment des actes de sous-traitance, dès lors qu'elle considère que ces actes, lorsqu'ils ont fait l'objet d'un agrément du maitre de l'ouvrage dans les conditions prévues par la loi du 31 décembre 1975, sont des documents administratifs communicables.
S’agissant des autres annexes, elle estime que les principes exposés ci-dessus pour le contrat de partenariat leur sont applicables et font obstacle à la communication en tout ou partie d’annexes qui comporteraient des informations couvertes par le secret en matière industrielle et commerciale tel qu’il vient d’être précisé.
En l'espèce, la commission émet un avis favorable à la communication des documents visés aux points 1), 5) et 6), dans les conditions et sous les réserves qui viennent d’être indiquées, et prend note de l'intention du ministre de procéder très prochainement à cette communication sous format électronique.