Avis 20235078 Séance du 21/09/2023
Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 8 juillet 2023, à la suite du refus opposé par le maire de l'Escarène à sa demande de communication, ou consultation sur place, des documents suivants relatifs à un rapport de Monsieur X, facteur d'orgue, le mettant en cause pour des dégâts constatés à l'orgue de l'église de la commune de l'Escarène :
1) le rapport de Monsieur X antérieur au 7 août 2019, détenu par la mairie de l’Escarène et par la Direction régionale des affaires culturelles (DRAC) de Provence-Alpes-Côte d'Azur à Aix-en-Provence ;
2) le rapport de visite de Monsieur X antérieur à l’été 2022, détenu par la DRAC de Provence-Alpes-Côte d'Azur (Aix-en-Provence) et éventuellement par la mairie de l'Escarène ;
3) le rapport et le devis réclamés par la mairie de l’Escarène au facteur X ainsi que la facture de la réparation du tirant de prestant par le même intervenant.
En l’absence de réponse du maire de l'Escarène à la date de sa séance, la commission déduit des informations portées à sa connaissance que la demande porte sur des documents administratifs au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration, communicables dans les conditions et sous les réserves prévues par ce code.
1. S'agissant des rapports sollicités aux points 1), 2) et 3) :
La commission rappelle que les rapports réalisés par ou à la demande d'une administration sont communicables sur le fondement des dispositions du code des relations entre le public et l'administration, à la condition, d'une part, qu'il soient achevés, d'autre part, qu'ils ne présentent plus un caractère préparatoire à une décision en cours d'élaboration.
La commission précise, ensuite, qu'en application des dispositions de l'article L311-6 du même code, « Ne sont communicables qu'à l'intéressé les documents administratifs : 1° Dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée (...) ; 2° Portant une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable ; 3° Faisant apparaître le comportement d'une personne, dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice ».
Elle estime que les documents présentant les faits de façon objective et formulant des recommandations sont librement communicables.
Elle relève également que l'identité de l'auteur d'un rapport, lorsqu'il ne s'agit pas d'un agent public agissant dans le cadre de ses fonctions, associée aux propos tenus, est de nature à révéler un comportement de sa part dans des conditions susceptibles de lui porter préjudice, en application du 3° de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration. Ces éléments ne sont dès lors pas communicables aux tiers, y compris à la personne mise en cause dans le rapport.
Elle relève par ailleurs que les passages d'un rapport révélant le comportement d’une tierce personne, autre que le demandeur, dans des conditions susceptibles de lui porter préjudice, ou qui porteraient une appréciation ou un jugement de valeur sur un tiers autre que ce dernier doivent être préalablement occultés.
En l'espèce, la commission comprend, s'agissant du point 1), que le demandeur connaît l'identité de l'auteur du rapport sollicité, lequel le met en cause personnellement. En application des principes rappelés ci-dessus, elle estime dès lors que ce document est couvert par le 3° de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration et ne lui est pas communicable. Elle émet donc un avis défavorable sur ce point.
S'agissant des points 2) et 3), la commission, qui n'a pas pu prendre connaissance des rapports sollicités, n'est pas en mesure d'apprécier l'ampleur des occultations rendues nécessaires au titre des secrets protégés par l'article L311-6. Elle émet, dès lors, en l'état des informations dont elle dispose, un avis favorable à la communication de ces rapports, dans une version occultée des mentions protégées, conformément aux principes ci-dessus rappelés. Elle rappelle enfin que lorsque les occultations nécessaires dénaturent le sens du document sollicité ou privent d'intérêt sa communication, la communication doit être refusée.
2. S’agissant des devis et facture sollicités au point 3) :
La commission rappelle qu’il résulte de l’article L2121-26 du code général des collectivités territoriales que toute personne peut demander communication des délibérations et procès-verbaux du conseil municipal, des arrêtés municipaux, ainsi que des budgets et comptes de la commune. La commission prend en revanche acte de la décision du 8 février 2023 n° 452521 par laquelle le Conseil d’État a jugé que le droit de communication qu’instituent ces dispositions ne s’étend pas aux pièces justificatives des opérations et documents de comptabilité qu’il appartient à l’ordonnateur et au comptable public de conserver, en vertu des dispositions de l’article 52 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique (avis n° 20230165 du 9 mars 2023).
La commission en déduit que les reçus, justificatifs, devis, factures et notes de frais sont des pièces justificatives de dépenses qui constituent des documents administratifs communicables à toute personne qui en fait la demande dans les conditions et sous les réserves prévues par le livre III du code des relations entre le public et l’administration (CE, 8 février 2023, n° 452521, Ville de Paris). Elle précise à cet égard que si le prix global d'une prestation apparaissant sur une facture ou un devis est communicable à toute personne qui en fait la demande sur le fondement des dispositions précitées, il en va autrement du détail des prix unitaires, qui est susceptible, en soi, de refléter la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité déterminé, et doit donc être occulté avant toute communication, pour préserver le secret des affaires (avis n° 20221246 et n° 20221455 du 21 avril 2022).
En application de ces principes, la commission émet un avis favorable à la communication du devis et de la facture sollicités, sous la réserve tenant au secret des affaires et à condition que ces documents existent.
Enfin, la commission rappelle, à toutes fins utiles, qu'en application du sixième alinéa de l'article L311-2 du code des relations entre le public et l'administration, lorsqu'une administration au sens de l'article L300-2 du code précité est saisie d'une demande de communication portant sur un document administratif qu'elle ne détient pas mais qui est détenu par une autre administration, elle la transmet à cette dernière et en avise le demandeur.