Avis 20233830 Séance du 07/09/2023
Monsieur XX, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 24 juillet 2023, à la suite du refus opposé par le président de l'Union des Groupements d'Achats Publics (UGAP) à sa demande de communication, en sa qualité de journaliste, des documents suivants concernant un appel d'offres relatif à l'accord-cadre « marché des prestations intellectuelles (hors informatiques) commercialisées sous forme d'unité d’œuvre », numéro de référence : 18U062, date de conclusion du marché : 6 mars 2019 :
1) la copie des quatre offres reçues pour le lot 1 « conseil en stratégie » de cet appel d'offres ;
2) la liste des membres de la commission d'appel d'offre qui a attribué ce marché ;
3) les comptes-rendus des travaux de la dite commission.
En réponse à la demande qui lui a été adressée, le président de l'Union des Groupements d'Achats Publics (UGAP) a d'abord indiqué que l'UGAP n'a pas de commission d'appel d'offres, de sorte que les documents sollicités aux points 2) et 3) n'existent pas. La commission en prend note et déclare la demande d'avis sans objet sur ces deux points.
Elle relève à toutes fins utiles qu'il ressort des mentions du courrier du 18 juillet 2023 adressé au demandeur et produit au dossier, que ce dernier a été destinataire d'une décision valant rapport de présentation, dans une version occultée des mentions protégées au titre du secret des affaires.
S'agissant du point 1), la commission rappelle qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s’y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. En conséquence, la communication à un candidat écarté des motifs ayant conduit à ne pas lui attribuer le marché ne permet pas de refuser la communication de ces documents.
Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Il résulte en effet de la décision du Conseil d’État du 30 mars 2016, « Centre hospitalier de Perpignan » (n°375529), que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication.
Le Conseil d’État a en outre précisé qu’au regard des règles de la commande publique, doivent être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l’ensemble des pièces d’un marché public et que, dans cette mesure, l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire, notamment, sont en principe communicables. Sont également communicables les pièces constitutives du dossier de consultation des entreprises (règlement de consultation, cahier des clauses administratives particulières, cahier des clauses techniques particulières…).
En revanche, les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité concurrentiel et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret des affaires ne sont, en principe, pas communicables. Il en va ainsi de l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ainsi que du mémoire technique, qui ne sont, de fait, pas communicables aux tiers. Revenant sur sa doctrine antérieure, la commission a également précisé dans son Conseil n° 20221455 du 21 avril 2022, qu’il en va aussi désormais ainsi des factures, bons de commande, états d’acompte, décomptes et autres pièces établies dans le cadre de l’exécution d’un marché public, qui ne sont communicables qu'après occultation des prix unitaires ou de la décomposition du prix forfaitaire, susceptibles, en soi, de refléter la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité déterminé.
L’examen de l’offre des entreprises non retenues au regard des mêmes principes conduit de même la commission à considérer que leur offre de prix globale est, en principe, communicable mais qu’en revanche, le détail technique et financier de cette offre ne l’est pas.
En outre, pour l’entreprise attributaire comme pour l’entreprise non retenue, les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration doivent entraîner l’occultation des éléments suivants :
- les mentions relatives aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics ;
- dans les documents préparatoires à la passation du marché (procès-verbaux, rapports d'analyse des offres) les mentions relatives aux détails techniques et financiers des offres de toutes les entreprises.
La commission précise enfin que si la liste des entreprises ayant participé à la procédure est librement communicable, en revanche les notes et classements des entreprises non retenues ne sont communicables qu'à celles-ci, chacune en ce qui la concerne, en application de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. En revanche, les notes, classements et éventuelles appréciations de l'entreprise lauréate du marché sont librement communicables.
En l'espèce, il ressort des informations portées à la connaissance de la commission que les offres reçues pour le lot 1 « conseil en stratégie » de l'appel d'offres lancé par l'UGAP sont composées de trois annexes : « tableau des unités d’œuvres », « qualité de service » et « méthodologie ».
La commission comprend, d'une part, que la communication du tableau des unités d’œuvres reviendrait à dévoiler l'offre de prix détaillé des candidats et d'autre part, que les deux autres annexes constituent le mémoire techniques des candidats.
La commission estime que ces éléments, couverts par le secret des affaires en application des principes rappelés ci-dessus, ne sont pas communicables aux tiers Elle émet, dès lors, un avis défavorable à la demande en son point 1).