Avis 20233802 Séance du 20/07/2023
Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 16 mai 2023, à la suite du refus opposé par la Première ministre à sa demande de communication, sur le site web opendata du Gouvernement des statistiques mensuelles des stocks et flux de l’activité Judiciaire, à savoir :
1) l'état des stocks des dossiers par chambre et/ou en cabinet (juge) d’instruction et/ou parquet :
a) dans la pyramide : tribunal/cour d'appel ;
b) par nature (subdivisions) : pénale, civile , commerce, prud’homme ;
2) le stock, au dernier jour du mois précédent ;
3) la mise en ligne des chiffres au 15 du mois suivant ;
4) l'historique sur 61 mois ;
5) le nombre de dossiers en stock à fin de mois (à date de départ postal du courrier justiciable/avocat) ;
6) le nombre de nouveaux dossiers reçus (donc enregistrés) dans le mois ;
7) le nombre de décisions traitées (à date de départ postal du courrier au justiciable/avocat) ;
8) le délai de traitement : nombre de jour du premier décile ;
9) le délai de traitement : nombre de jour du 5ème décile (médiane) ;
10) le délai de traitement : nombre de jour du neuvième décile ;
11) le délai de traitement : nombre de jour du dossier le plus ancien.
A titre liminaire, la commission comprend que n’étant pas satisfait des statistiques trimestrielles et annuelles relatives à l’activité des juridictions qui font d’ores et déjà l’objet d’une diffusion publique sur le site internet du ministère de la justice, Monsieur X demande la publication mensuelle en ligne d’un ensemble de données.
La commission rappelle, d’une part, que le livre III du code des relations entre le public et l'administration ne fait pas obligation aux autorités administratives de répondre aux demandes de renseignements qui leur sont adressées, ni d'élaborer un document nouveau en vue de procurer les renseignements ou l'information souhaités (CE, 30 janvier 1995, Ministre d'État, Ministre de l’éducation nationale, n° 128797 ; CE, 22 mai 1995, Association de défense des animaux victimes d'ignominie ou de désaffection, n° 152393).
La commission considère en revanche de manière constante que sont des documents administratifs existants au sens de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l’administration, ceux qui sont susceptibles d’être obtenus par un traitement automatisé d’usage courant. Il résulte en effet de la décision du Conseil d’État du 13 novembre 2020, n° 432832, que constituent des documents administratifs, au sens de ces dispositions, les documents qui peuvent être établis par extraction des bases de données dont l’administration dispose, si cela ne fait pas peser sur elle une charge de travail déraisonnable, laquelle doit être interprétée de façon objective.
Elle souligne, à ce titre, que les informations demandées doivent pouvoir être obtenues par un traitement automatisé de données, sans retraitements successifs, en particulier par des interventions manuelles. Elle estime également que, lorsque les informations sollicitées doivent, pour être extraites d'un fichier informatique, faire l'objet de requêtes informatiques complexes ou d'une succession de requêtes particulières qui diffèrent de l'usage courant pour lequel le fichier informatique dans lequel elles sont contenues a été créé, l'ensemble des informations sollicitées ne peut alors être regardé comme constituant un document administratif existant (avis n° 20222817, 20222850 et 20222936 du 23 juin 2022). Une demande portant sur la communication d'un tel ensemble d'informations doit dès lors être regardée comme tendant à la constitution d'un nouveau document (conseil n° 20133264 du 10 octobre 2013) et, par suite, être déclarée irrecevable.
En l’espèce, le ministre de la justice a informé la commission que ses services ne disposent pas encore des outils permettant d’établir l’historique et l’état des stocks des affaires pénales par chambre, par cabinet d’instruction ou par parquet et que les outils existants pour les autres données sollicitées ne permettent par ailleurs pas une extraction par mois.
La commission en déduit que la demande formée par Monsieur X ne porte pas sur des données pouvant être obtenues par un traitement automatisé d’usage courant et tend, dans ces conditions, à l’élaboration d’un nouveau document.
D’autre part, la commission rappelle également que le livre III du code des relations entre le public et l’administration garantit un droit d’accès aux documents existants ou susceptibles d’être obtenus par un traitement automatisé d’usage courant, mais ne permet pas aux demandeurs d’exiger pour l’avenir qu’ils soient rendus systématiquement destinataires de documents au fur et à mesure de leur élaboration.
Dans ces conditions, la commission ne peut que déclarer la demande d’avis irrecevable.