Avis 20233685 Séance du 20/07/2023
Madame X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 16 juin 2023, à la suite du refus opposé par le directeur de l'agence régionale de santé du Centre - Délégation territoriale d'Eure-et-Loir à sa demande de communication, dans le cadre d'une constitution de dossier de plainte, de la déclaration d'événement indésirable grave envoyée à l'ARS par l'EHPAD de l'Eure et Loir concernant l'agression sexuelle de sa grand-mère Madame X par un autre résident de l'EHPAD le X dans le secteur X.
La commission rappelle qu'en application des dispositions de l'article L311-6 de ce même code, ne sont communicables qu'à l'intéressé les documents dont la communication porterait atteinte à la vie privée, portant une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable ou faisant apparaître le comportement d'une personne, dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice.
La commission estime, sur ce fondement, que les documents tels que les fiches de signalement retraçant les incidents survenus dans les établissements de santé ou les établissements sociaux et médico-sociaux, dès lors que leur auteur est identifiable, ne sont communicables qu'au patient concerné ou au professionnel de santé ayant signalé l'incident, à l'exclusion des tiers.
Elle ajoute que ces fiches sont également susceptibles de contenir des informations médicales au sens des articles L1110-4 et L1111-7 du code de la santé publique. Si elles mentionnent le nom du patient ou permettent d'identifier celui-ci, de telles informations ne sont communicables qu’aux médecins chargés du patient, à l’intéressé ou à la personne qu’il a dûment mandatée. Elle indique, par ailleurs, qu’en vertu de l'article L311-5 du même code, ne sont pas communicables les documents dont la communication porterait atteinte aux secrets protégés par la loi, au nombre desquels le secret professionnel prévu par l’article L1110-4 du code de la santé publique.
La commission rappelle, ensuite, que l'obligation de signalement des structures sociales et médico-sociales est régie par les dispositions du code de l'action sociale et des familles. En application de l'article L331-8-1 de ce code, les établissements et services médico-sociaux sont en effet tenus d'informer l'autorité compétente, (conseil départemental, préfet de département ou agence régionale de santé), de « tout dysfonctionnement grave dans leur gestion ou leur organisation susceptible d'affecter la prise en charge des usagers, leur accompagnement ou le respect de leurs droits et de tout évènement ayant pour effet de menacer ou de compromettre la santé, la sécurité ou le bien-être physique ou moral des personnes prises en charge ou accompagnées ».
La commission ajoute qu'en application de l'article R331-8 du code de l'action sociale et des familles, « cette transmission est effectuée selon un formulaire pris par un arrêté des ministres de la justice et de l'intérieur et des ministres chargés du logement, des personnes âgées, des personnes handicapées, de la protection de l'enfance et de la santé. Cet arrêté précise la nature des dysfonctionnements et événements dont les autorités administratives doivent être informées ainsi que le contenu de l'information et notamment la nature du dysfonctionnement ou de l'événement, les circonstances de sa survenue, ses conséquences, ainsi que les mesures immédiates prises et les dispositions envisagées pour y mettre fin et en éviter la reproduction. L'information transmise ne contient aucune donnée nominative et garantit par son contenu l'anonymat des personnes accueillies et du personnel. Toute information complémentaire se rattachant au dysfonctionnement ou à l'événement déclaré fait l'objet d'une transmission à l'autorité administrative dans les mêmes conditions ».
La commission rappelle, comme elle l'a fait pour les fiches « OSIRIS », que les fiches de signalement anonymisées deviennent communicables à toute personne qui en fait la demande. Elle insiste d'ailleurs sur l'importance particulière qui s'attache à l'anonymisation préalable des mentions relatives aux personnes concernées par ces déclarations de dysfonctionnement et évènements graves, qui sont transmises à l'agence régionale de santé. Elle souligne que l'anonymisation exige de supprimer toute information permettant d’identifier directement ou indirectement le patient (nom, prénom, date de naissance, numéro de sécurité sociale, numéro dit NIR ou NIP attribué par l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris) ainsi que l’auteur du signalement ou le personnel auxiliaire associé (notamment nom, prénom, fonctions, numéro de téléphone, courriel, matricule).
En l'espèce, la commission constate que Madame X souhaite accéder à une fiche en particulier qui concerne sa grand-mère. Elle déduit de la réponse du directeur de l'agence régionale de santé du Centre - Délégation territoriale d'Eure-et-Loir que ce document existe dans une version anonymisée. Elle estime, par suite, que ce document est communicable à la demanderesse à condition d'une part, qu'elle justifie d'un mandat exprès de sa grand-mère et, d'autre part, que les informations de la déclaration ne permettent pas d’identifier, le cas échéant par recoupement ou avec des informations supplémentaires, les autres protagonistes et notamment le ou les auteurs des agissements signalés.
Elle émet, sous ces réserves, un avis favorable à la demande.