Avis 20233514 Séance du 20/07/2023

Monsieur X a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 5 juin 2023, à la suite du refus opposé par le maire de Roubaix à sa demande de communication des documents suivants, conclus en 2022 et 2023, entre la ville de Roubaix et la société X, et notamment : 1) les bons de commandes et devis ; 2) les échanges écrits avant, pendant et après la conclusion des bons de commandes entre la ville de Roubaix et la société X ; 3) tout document administratif liant la société X et la ville de Roubaix pour les années 2022 et 2023 ; 4) tout acte signé par le maire de Roubaix en qualité d'ordonnateur de la dépense publique pour l'exécution des bons de commandes réalisés par la société X. En l’absence de réponse du maire de Roubaix à la date de sa séance, la commission rappelle, en premier lieu, qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s’y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Il résulte en effet de la décision du Conseil d’État du 30 mars 2016, « Centre hospitalier de Perpignan » (n°375529), que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication. Le Conseil d’État a en outre précisé qu’au regard des règles de la commande publique, doivent être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l’ensemble des pièces d’un marché public et que, dans cette mesure, l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire, notamment, sont en principe communicables. Sont également communicables les pièces constitutives du dossier de consultation des entreprises (règlement de consultation, cahier des clauses administratives particulières, cahier des clauses techniques particulières…). En revanche, les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité concurrentiel et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret des affaires ne sont, en principe, pas communicables. Il en va ainsi de l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ainsi que du mémoire technique, qui ne sont, de fait, pas communicables aux tiers. Revenant sur sa doctrine antérieure, la commission a également précisé dans son Conseil n° 20221455 du 21 avril 2022, qu’il en va aussi désormais ainsi des factures, bons de commande, états d’acompte, décomptes et autres pièces établies dans le cadre de l’exécution d’un marché public, qui ne sont communicables qu'après occultation des prix unitaires ou de la décomposition du prix forfaitaire, susceptibles, en soi, de refléter la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité déterminé. En outre, les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration doivent entraîner l’occultation des éléments suivants : - les mentions relatives aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics ; - les mentions relatives aux détails techniques et financiers de l'offre. En application de ces principes, la commission émet un avis favorable aux points 1) et 3) de la demande, sous la réserve tenant au secret des affaires. La commission rappelle, en second lieu, que les documents relatifs à la négociation entre un acheteur et une entreprise sont entièrement couverts par le secret des affaires, et ne sont donc pas communicables (avis de partie II n° 20122602 du 26 juillet 2012). Elle estime que les échanges intervenus avant et pendant la conclusion d'un marché public entre un candidat et le pouvoir adjudicateur, dans la mesure où ils sont de nature à révéler la stratégie commerciale de l'entreprise concernée sont couverts par ce secret. La commission émet donc un avis défavorable au point 2) de la demande, dans cette mesure. En revanche, la commission estime que les échanges intervenus entre l'attributaire et le pouvoir adjudicateur postérieurement à la conclusion du contrat, dont elle comprend qu'ils sont relatifs à l'exécution des prestations, sont communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, après occultation des éventuelles mentions protégées au titre des articles L311-5 et 6 du même code, notamment celles relevant du secret des affaires, notamment celles susceptibles de relever du secret des procédés visé à l'article L311-6, et sous réserve qu'ils aient été remis à leur commanditaire et ne revêtent plus un caractère préparatoire. La commission émet donc un avis favorable au point 2) de la demande, dans cette mesure. En dernier lieu, s'agissant du point 4) de la demande sollicitant la communication « tout acte signé par le maire de Roubaix en qualité d'ordonnateur de la dépense publique pour l'exécution des bons de commandes », la commission comprend qu'il vise les mandats de paiement signés par l'ordonnateur. La commission prend acte de la décision du 8 février 2023 n°452521 par laquelle le Conseil d’État a jugé que le droit de communication qu’instituent les dispositions de l’article L2121-26 du code général des collectivités territoriales ne s’étend pas aux pièces justificatives des opérations et documents de comptabilité qu’il appartient à l’ordonnateur et au comptable public de conserver, en vertu des dispositions de l’article 52 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique (avis n° 20230165 du 9 mars 2023). La commission en déduit que les mandats sollicités sont des documents administratifs communicables à toute personne qui en fait la demande en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration sous réserve, le cas échéant, de l’occultation des mentions relevant du secret des affaires. Elle émet donc un avis favorable à la demande sur ce point, sous cette réserve