Avis 20233502 Séance du 20/07/2023
Monsieur X, intervenant au nom et pour le compte de Madame X X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 5 juin 2023, à la suite du refus opposé par le maire de Joigny à sa demande de communication des documents suivants relatifs aux factures justifiant une demande de remboursement à 100% de frais pour travaux effectués d'office en 2017/18 :
1) le décompte définitif des frais engagés et payés par la Ville de Joigny (travaux de l'entreprise X, honoraires de l'architecte X et divers) ;
2) les factures-états de solde de l'entreprise X, à savoir :
a) la facture n°5 de X € de l'entreprise X
b) l'état de solde des travaux de l'entreprise X ;
c) l'état de solde honoraires de l'architecte X de X € qui figurent sur l'état provisoire comme restant à payer faisant état d'un avancement des paiements de X € sur un total de X €.
La commission rappelle qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s’y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration.
Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code, qui dispose que ne sont communicables qu’à l’intéressé les documents administratifs dont la communication porterait atteinte au secret des affaires. Il résulte en effet de la décision du Conseil d’État du 30 mars 2016, « Centre hospitalier de Perpignan » (n°375529), que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication.
En l'espèce, la commission considère que le fait que le coût des travaux réalisés ait été mis à la charge de Madame X dans le cadre d'une procédure de péril, ne confère pas à cette dernière la qualité de personne intéressée au sens de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. La commission en conclut que les documents relatifs à la passation des marchés publics nécessaires à la réalisation des travaux (maîtrise d’œuvre, travaux, etc.) sont communicables à Madame X, qui dispose à leur égard de la qualité de tiers, sous réserve de l’occultation des mentions se rapportant aux titulaires de ces marchés protégées par l’article L311-6 de ce code.
A ce titre, la commission précise le détail des prix (prix unitaires ou décomposition du prix forfaitaire) susceptible, en soi, de refléter la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité déterminé, doit être occulté, le prix global restant quant à lui librement communicable (avis n° 20221246 et n° 20221455 du 21 avril 2022). En outre, les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration doivent entraîner l’occultation des mentions relatives au détails techniques de l'offre, aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics.
La commission, qui a pris connaissance de la réponse du maire de Joigny, rappelle enfin que la seule circonstance qu’un contentieux soit en cours concernant les travaux en question ne suffit pas à regarder la communication des documents sollicités comme étant de nature à porter atteinte au déroulement des procédures engagées devant les juridictions, au sens du f) du 2° de l’article L311-5 du code des relations entre le public et l’administration, ce même si la communication du document serait de nature à affecter les intérêts d'une partie à la procédure (CE, 16 avril 2012, n° 320571), qu'il s'agisse d'une personne publique ou de toute autre personne. Ce n’est, en effet, que dans l’hypothèse où cette communication risquerait d’empiéter sur les compétences et prérogatives de la juridiction que la communication d'un document administratif peut être refusée en application du f) du 2° de l'article L311-5 du code des relations entre le public et l'administration. Tel peut être le cas lorsque la communication est de nature à porter atteinte au déroulement de l’instruction, entrave ou complique l'office du juge ou encore retarde le jugement d'une affaire (conseil n° 20092608 du 18 juillet 2009), ce qui, en l'état des informations portées à la connaissance de la commission, ne paraît pas être le cas en l’espèce.
Elle émet donc, sous cette réserve, un avis favorable.