Avis 20233279 Séance du 06/07/2023
Maître X, conseil de l'association X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 1er juin 2023, à la suite du refus opposé par le secrétaire général du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR) - Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES) à sa demande de communication par courrier électronique des documents suivants, relatifs à l'exécution des projets de l'UNADFI subventionnés en 2021 :
1) s'agissant des conventions d’attribution de subvention signées avec l’UNADFI et notifiées le 21 octobre 2021 (projet A, B et C) :
a) toutes les pièces justificatives des dépenses et tous les autres documents produits par l'UNADFI dans le cadre du contrôle de la subvention 2021, que ce contrôle soit lié au renouvellement de la subvention ou pas ;
b) tous les échanges entre la Miviludes et l'UNADFI (incluant les échanges avec sa présidente X) au sujet de ce contrôle et de l'utilisation des subventions 2021, que ces échanges aient été réalisés par courriel, par sms ou par l'intermédiaire de toute messagerie (WhatsApp, Signal, Telegram, etc.), ou tout autre moyen de communication, de janvier 2022 à aujourd'hui ;
c) tous comptes rendus, conclusions écrites, tableaux récapitulatifs, courriers interministériels ou intra ministériels relatifs à ce contrôle ou au renouvellement des subventions en 2022, de janvier 2022 à aujourd'hui, notamment les documents faisant état de la réalisation et du résultat des évaluations contradictoires des conditions de réalisation des conventions, et les bilans d'ensemble, qualitatifs et quantitatifs, de la mise en œuvre des projets ;
d) tout document constatant que les dépenses faites par l'UNADFI dans le cadre de cet appel à projet 2021 n'ont pas été faites avant le 31 décembre 2021 ;
e) tout courrier ou communication de l'UNADFI à la Miviludes notifiant un ou des retards dans l'exécution, une ou des modifications dans les conditions d'exécution, dans le cadre des subventions accordées en 2021 (projets A, B et C) et les réponses et échanges suite à ces communications ;
f) tout avenant à l'une ou plusieurs des conventions précitées ;
2) s’agissant de la convention notifiée à l'UNADFI le 18 octobre 2021 (projet D) :
a) le compte rendu qualitatif et quantitatif du projet qui a été fourni, ou aurait dû être fourni, dans les 6 mois qui suivent la date d'achèvement du projet ;
b) tous les échanges réalisés par courriel, par sms ou par l'intermédiaire de toute messagerie (WhatsApp, Signal, Telegram, etc.), ou tout autre moyen de communication, au sujet de ce bilan et des conditions d'exécution du projet.
Après avoir pris connaissance de la réponse du secrétaire général du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR) - Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES), la commission rappelle, en premier lieu, que les documents produits ou reçus par une autorité administrative dans le cadre des missions de service public exercées et des compétences détenues à ce titre, constituent des documents administratifs au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration.
La commission précise à cet égard que les courriers détenus ou reçus par les agents publics, y compris sur leurs terminaux électroniques professionnels (avis n° 20184184 du 6 décembre 2018), constituent des documents administratifs au sens de ces dispositions, communicables à toute personne qui en fait la demande en application de l’article L311-1 du même code, s'ils sont en possession de l’administration et sont susceptibles de faire l’objet d’une extraction par un traitement automatisé d'usage courant, dans le respect des secrets protégés par les articles L311-5 et L311-6 de ce code, et par suite, le cas échéant, après occultation des mentions relevant de ces derniers ou disjonction des documents qui en relèveraient entièrement en application des dispositions de l’article L311-7 dudit code.
Elle estime par suite que des correspondances telles que celles demandées aux points 1) b) et 2) b) sont des documents administratifs au sens de ces dispositions communicables à toute personne qui en fait la demande en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve de l'occultation des mentions protégées par les articles L311-5 et L311-6 du même code.
La commission rappelle, en deuxième lieu, que l’article 10 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 prévoit que le budget et les comptes de tout organisme de droit privé ayant reçu une subvention, la convention qu’il doit conclure avec l’autorité administrative qui attribue la subvention dépassant un certain seuil, et le compte rendu financier de la subvention, doivent être communiqués à toute personne qui en fait la demande, dans les conditions prévues par le livre III du code des relations entre le public et l’administration.
Les autres documents relatifs à l’exécution des conventions d’attribution de subvention à l’UNADFI sont quant à eux communicables en vertu de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve de l’occultation des éventuelles mentions dont la communication porterait atteinte à l’un des secrets protégés par la loi, en particulier les mentions dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée, portant une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable, ou encore les mentions faisant apparaître le comportement d'une personne, dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice.
En dernier lieu, la commission prend note des observations du secrétaire général du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR) - Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES), quant au caractère abusif de la demande compte tenu du nombre de demandes adressées par l’association X.
La commission rappelle que l'administration n'est pas tenue de répondre à une demande de communication qui présenterait un caractère abusif. Elle estime qu'une demande peut être considérée comme abusive lorsqu'elle vise, de façon délibérée, à perturber le fonctionnement d'une administration ou lorsqu'elle a pour effet de faire peser sur elle une charge excessive au regard des moyens dont elle dispose (CE, 14 novembre 2018, Ministre de la culture c/ Société pour la protection des paysages et l’esthétique de la France n° 420055, 422500). Tel peut être le cas des demandes récurrentes, portant sur un volume important de documents traitant, le cas échéant, de la même affaire, des demandes que le service sollicité est manifestement dans l'incapacité matérielle de traiter, ou encore des demandes portant sur des documents auquel le demandeur a déjà eu accès. La commission fonde également son appréciation sur les éléments portés à sa connaissance par le demandeur et l'administration quant au contexte dans lequel s'inscrit la demande et aux motivations. La commission rappelle enfin que le volume des documents demandés ne peut, par lui-même, justifier légalement un refus de communication.
En l'espèce, il n'est pas apparu à la commission, compte tenu de la nature des documents demandés et des éléments portés à sa connaissance, que cette demande présenterait un caractère abusif au regard du droit d'accès prévu par le code des relations entre le public et l'administration.
La commission émet par suite un avis favorable à la demande, sous les réserves qui ont été précisées.
Elle invite cependant l'association X à faire preuve de discernement et de modération dans l'usage qu'elle fait du droit d'accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l’administration.
Elle précise enfin que lorsqu'une demande porte sur un nombre ou un volume important de documents, l'administration est fondée à étaler dans le temps la réalisation des photocopies afin que l’exercice du droit d’accès reste compatible avec le bon fonctionnement de ses services. Les frais de reproduction et d’envoi peuvent être facturés dans le respect des textes en vigueur (article R311-11 du code des relations entre le public et l’administration et arrêté du 1er octobre 2001), mais non le coût correspondant au surcroît de travail occasionné par la demande. Le paiement de ces frais, dont le demandeur doit être informé, peut être exigé préalablement à la remise des copies.