Avis 20233277 Séance du 06/07/2023

Maître X, conseil de l'association X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 1er juin 2023, à la suite du refus opposé par le ministre de l'intérieur et des outre-mer à sa demande de communication par courrier électronique des documents suivants, détenus par le cabinet de Madame Sonia X : 1) toutes les notes de frais, état des dépenses et avantages en nature de Madame X depuis juillet 2022 jusqu’au 24 avril 2023, incluant les frais ou avantages de transport (local, national ou international), de logement, d’hôtel, de bouche, de vêtements, (etc.) ; 2) l’ensemble des correspondances, courriels, messages par messagerie électronique (WhatsApp, Signal, Telegram, etc.), émis ou reçus, relatifs à la lutte contre les dérives sectaires, y compris ceux relatifs à l’organisation des assises nationales de la lutte contre les dérives sectaires, de juillet 2022 à ce jour, entre Madame X et : a) Madame X et membre du Conseil d’Orientation de la Miviludes ; b) Monsieur X ; c) Madame X, députée ; d) Madame X, secrétaire d’Etat ; e) Madame X ; f) Monsieur X, membre du Conseil d’Orientation de la Miviludes ; g) Monsieur X ; 3) les courriels, messages par messagerie électronique (WhatsApp, Signal, Telegram, etc.) émis ou reçus par Madame X, et les comptes rendus, relatifs à sa rencontre avec : a) Monsieur X le X ; b) Madame X ; c) Madame X et X, du X ; d) Monsieur X ; e) Madame X ; f) Monsieur X ; 4) s'agissant du conseil d’orientation de la Miviludes : a) les comptes rendus et les minutes des réunions du 30 mars 2021 au 24 avril 2023 ; b) les comptes rendus de réunions et les documents résultants des travaux des différents groupes de travail depuis le 30 mars 2021 ; 5) l’ensemble des correspondances, courriels, messages par messagerie électronique (WhatsApp, Signal, Telegram, etc.) émis ou reçus par Madame X, des avis, décisions et instructions adressés par Madame X que ce soit à des membres de son cabinet, des membres du ministère de l’Intérieur ou des membres d’autres ministères, ou à toute personne autre, relatifs à l’organisation des assises nationales de la lutte contre les dérives sectaires ; 6) toute note, ou étude, ou message (courrier, courriel ou messageries électroniques), ou avis, ou échange divers, reçus ou émis par madame X, relatif à la gestion et au contenu de sa communication publique sur le sujet de l’appartenance de sa mère à la scientologie, produits par ou échangés avec les membres de son cabinet, notamment Monsieur X (conseiller chargé de la communication) et Monsieur X (conseiller technique de lutte contre les dérives sectaires), ou avec le ministre Gérald DARMANIN et son cabinet, depuis juillet 2022 ; 7) l’ensemble des correspondances, courriels, messages par messagerie électronique (WhatsApp, Signal, Telegram, etc.) émis ou reçus par Madame X, relatifs à la polémique du fonds Marianne tel que révélée le 29 mars par le magazine Marianne et France 2, en provenance ou à l’intention de Christian GRAVEL, Marlène SCHIAPPA, et les membres de son cabinet. Pour ce qui concerne le point 1) de la demande : En l’absence, à la date de sa séance, de réponse du ministre de l’intérieur à la demande qui lui a été adressée, la commission considère que les documents retraçant les dépenses de la secrétaire d’Etat dans le cadre de ses fonctions constituent des documents administratifs communicables à toute personne qui en fait la demande, en vertu de l’article L311-1 du même code, dans les conditions et sous les réserves prévues par les articles L311-5 et L311-6. Elle précise que, dans sa décision du 8 février 2023, n°452521, le Conseil d’Etat a jugé que les notes et frais de restauration ou de représentation d’élus locaux, qui ont trait à l’activité des élus dans le cadre de leur mandat, comme celles d’agents publics, qui ont trait à leur activité dans le cadre de leurs fonctions, ne sauraient être regardés comme mettant en cause la vie privée de ces personnes. Il appartient à l’autorité administrative d’apprécier au cas par cas, à la date à laquelle elle se prononce sur une demande de communication, si, eu égard à certaines circonstances particulières tenant au contexte de l’évènement ou du déplacement auquel un document se rapporte, la communication des informations relatives à des tiers invités ou celle du motif de la dépense serait de nature, par exception, à porter atteinte aux secrets et intérêts protégés par les articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l’administration, justifiant alors leur occultation. La commission émet donc, sous cette réserve, un avis favorable sur ce point. Pour ce qui concerne les points 2), 3), 4), 5), 6) et 7) de la demande : A titre liminaire, la commission souligne que le droit d'accès aux documents administratifs régi par le livre III du code des relations entre le public et l'administration ne contraint pas l'administration à effectuer des recherches pour répondre à une demande et que les administrations ne sont pas tenues de répondre aux demandes trop générales ou insuffisamment précises (CE 27 sept. 1985, Ordre des avocats au barreau de Lyon, n° 56543; CE 30 juin 1989, OPHLM de la Ville de Paris, n° 83477). Dans l’éventualité où la demande ne met pas l'administration en mesure d'identifier précisément et sans recherche approfondie, les documents susceptibles d'y répondre, la commission considère la demande irrecevable et ne peut qu’inviter le demandeur, s'il le souhaite, à la préciser auprès de l'administration. Elle rappelle que sont irrecevables les demandes portant sur des échanges intervenus entre une ou des administrations et une autre administration ou une personne privée, lorsqu’elle sont trop imprécises quant à l'objet des documents demandés (avis n° 20216781 du 16 décembre 2021), quant à leur nature (avis n° 20195507 du 12 mars 2020), quant à l'administration et/ou ses composantes en cause (avis n° 20195507 du 12 mars 2020), quant à son ou ses interlocuteurs (avis n° 20194880 du 12 mars 2020 ; n° 20213868 du 15 juin 2021), quant au cadre d'élaboration du document (avis n° 20213868 du 15 juin 2021) ou encore quant à la période de temps visée (avis n° 20213868 du 15 juin 2021). En l’espèce, la commission relève que les documents sollicités sont désignés par leurs émetteurs et/ou destinataires, leurs sujets et des dates ou périodes de temps. En l’état des informations dont elle dispose, elle considère que la demande est ainsi formulée de façon suffisamment précise pour permettre à l’administration d’identifier les documents sollicités. La commission rappelle ensuite que les documents produits ou reçus par une autorité administrative dans le cadre des missions de service public exercées et des compétences détenues à ce titre, constituent des documents administratifs au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration. La commission précise que les courriers détenus ou reçus par les agents publics dans ce cadre, y compris sur leurs terminaux électroniques professionnels (avis n° 20184184 du 6 décembre 2018), constituent des documents administratifs au sens de ces dispositions, communicables à toute personne qui en fait la demande en application de l’article L311-1 du même code, s'ils sont en possession de l’administration et sont susceptibles de faire l’objet d’une extraction par un traitement automatisé d'usage courant, à l’exception toutefois des éventuelles correspondances qui n’auraient pas été échangées dans ce cadre mais à titre privé, et qui échappent à sa compétence. En application de ces principes, la commission estime que les correspondances, messages, notes et comptes rendus sollicités sont des documents administratifs au sens de ces dispositions, communicables à toute personne qui en fait la demande en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve de l'occultation des mentions dont la communication porterait atteinte à l’un des secrets protégés par les articles L311-5 et L311-6. Elle précise, pour ce qui concerne le point 6) de la demande, que devraient en particulier être occultées les mentions qui relèveraient du secret de la vie privée de la mère de la secrétaire d’Etat. La commission émet donc un avis favorable sur les points 2), 3), 4), 5), 6) et 7), sous ces réserves.