Avis 20232815 Séance du 22/06/2023

Madame X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 9 mai 2023, à la suite du refus opposé par le directeur général des patrimoines à sa demande de consultation, par dérogation aux délais fixés par l'article L213-2 du code du patrimoine, du document suivant : - Mairie du 14e arrondissement de Paris, service de l'état civil : registre des naissances pour l'année 1975. La commission rappelle, en premier lieu, que les actes d'état-civil ne revêtent pas le caractère de document administratif. Il s'ensuit qu'elle n'est pas compétente pour se prononcer sur l'application des dispositions de communication de ce type de documents, telles que prévues par les dispositions du décret n° 2017-890 du 6 mai 2017 sur les règles relatives à l'état civil, en particulier l'article 30 qui prévoit que « les copies intégrales des actes de naissance et des actes de mariage peuvent être délivrées à la personne à laquelle l'acte se rapporte à la condition qu'elle soit majeure ou émancipée ainsi qu'à [...] ses descendants [...], son représentant légal et aux personnes justifiant d'un mandat écrit [...] » et l'’article 32 qui prévoit que « les extraits, avec indication de la filiation, des actes de naissance (…) précisent les nom, prénoms, date et lieu de naissance des parents de la personne à laquelle l'acte se rapporte. Ils peuvent être délivrés à celle-ci si elle est majeure ou émancipée ainsi qu'à ses ascendants, ses descendants (…) aux personnes justifiant d'un mandat écrit (…) ». La commission rappelle cependant qu'elle est compétente, en vertu des dispositions de l’article L342-1 du code des relations entre le public et l'administration, pour émettre un avis sur la communication, en application des dispositions des articles L213-1 à L213-3 du code du patrimoine, par les services qui les conservent, des documents qui, à l'instar des registres d'état civil, constituent des documents d’archives publiques, au sens de l’article L211-4 de ce même code. La commission précise, ensuite, qu'en application du e) du 4° du I de l'article L213-2 du code du patrimoine, les registres de naissance et de mariage de l'état civil sont librement communicables à l'expiration d'un délai de soixante-quinze ans à compter de leur clôture, c'est à dire à compter du 31 décembre de l'année du registre. La commission précise, par ailleurs, qu'en vertu de l'article L213-3 du code du patrimoine, une autorisation de consultation, par anticipation aux délais prévus par l'article L213-2 précité, peut cependant être accordée par l’administration des archives aux personnes, physiques ou morales, qui en font la demande dans la mesure où l'intérêt qui s'attache à la consultation des documents ne conduit pas à porter une atteinte excessive aux intérêts que la loi a entendu protéger. Cette autorisation requiert l’accord préalable de l'autorité dont émanent les documents, l’administration des archives étant tenue par l’avis donné. La commission rappelle que pour apprécier l'opportunité d'une communication anticipée, elle s'efforce, au cas par cas, de mettre en balance les avantages et les inconvénients d'une communication anticipée, en tenant compte d'une part de l'objet de la demande et, d'autre part, de l'ampleur de l'atteinte aux intérêts protégés par la loi. L’intérêt s’attachant à cette consultation doit être légitime et peut tenir, notamment, dans les nécessités de la gestion ou de la justification de droits dont le demandeur est ou estime être titulaire ou dont il a la charge, comme dans celles de la documentation historique de la recherche. Il appartient au demandeur de justifier de l’intérêt s’attachant à cette consultation. Cet intérêt légitime doit être apprécié au vu de la démarche qu'il entreprend et du but qu'il poursuit en sollicitant la consultation anticipée d'archives publiques, de la nature des documents en cause et des informations qu'ils comportent. En l'espèce, la commission relève que le délai de soixante-quinze ans n'est pas expiré, de sorte que le registre des naissances sollicité n’est pas encore librement communicable. Elle comprend que Madame X a été regardée comme ayant présenté une demande d'accès dérogatoire, en application des dispositions précitées de l'article L213-3 du code du patrimoine. Elle comprend de la réponse du directeur général des patrimoines et de l’architecture que la demanderesse souhaite consulter, dans le cadre d'une recherche personnelle, le registre des naissances de l'état civil du 14ème arrondissement de Paris pour l'année 1975, afin de retrouver l'acte de naissance originale de son fils, X, qui aurait été annulé par un jugement de reconnaissance qu'elle précise vouloir contester, après plusieurs années de démarches pour y accéder. La commission relève ensuite qu'en réponse à la demande qui lui a été adressée, le directeur général des patrimoines et de l’architecture a indiqué à la commission que son refus était motivé par le fait que le procureur de la République du tribunal judiciaire de Paris, dont l’avis est requis en vertu de l’article L213-3 du code du patrimoine, n’avait pas répondu aux demandes successives adressées par les Archives de Paris. Tenu par le I de l’article L213-3 du code du patrimoine de n’accorder une autorisation d’accès par dérogation qu’après l’accord de l’autorité dont émanent les documents, il ne pouvait qu’opposer un refus à Madame X. Il a également précisé que le procureur de la République de Paris lui avait depuis lors confirmé son opposition à ce que l’autorisation de consultation soit accordée à Madame X, considérant que l’acte de naissance sollicité comportait des mentions marginales, pour la consultation desquelles la personne intéressée n'a pas donné son accord à la divulgation. En l'espèce, la commission estime que l'intérêt qui s'attache pour la demanderesse à la consultation avant l'expiration des délais fixés au I de l'article L213-2 du code du patrimoine de l'ensemble du registre des naissances de l'état civil du 14ème arrondissement pour l'année 1975 porterait une atteinte excessive aux intérêts que la loi a entendu protéger. En supposant qu'une consultation du seul acte de naissance que recherche Madame X soit envisageable, la commission constate que la demanderesse n’a pas apporté de justificatif de ses démarches de contestation du jugement de reconnaissance ou tout autre élément de nature à établir son intérêt légitime à une consultation anticipée de ce document. La commission relève également qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que la personne concernée par cet acte de naissance aurait donné son accord à cette consultation, ni qu’elle aurait connaissance de ses origines. Dès lors, en l'état des informations portées à sa connaissance, tout en reconnaissant l’importance que semble revêtir cette consultation pour Madame X, la commission estime que la consultation anticipée de ce document serait en l'espèce de nature à porter une atteinte excessive aux intérêts que la loi a entendu protéger en fixant les règles de communication ou de consultation anticipée des actes de naissance des tiers. Elle émet, par suite, un avis défavorable à la demande. Elle invite Madame X, si elle le souhaite, à apporter tout élément complémentaire à l’administration des archives quant à sa démarche.