Avis 20232783 Séance du 22/06/2023

Maître X, conseil de la société X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 10 mai 2023, à la suite du refus opposé par le maire de Kaala-Gomen à sa demande de communication des documents suivants concernant la concession de distribution d'énergie électrique sur le territoire de la commune de Kaala-Gomen : 1) l'analyse des offres effectuée par le bureau d'études X présentée devant le conseil municipal ; 2) le compte rendu de la réunion du conseil municipal ; 3) la délibération du conseil municipal approuvant le choix de l'offre X et autorisant la signature du traité de concession. 1. S'agissant du point 1) : En l'absence de réponse du maire de Kaaka-Gomen à la date de sa séance, la commission rappelle que les articles L562-8 et L563-2 du code des relations entre le public et l'administration rendent applicable en Nouvelle-Calédonie un certain nombre de dispositions de ce code définissant des droits et obligations de communication concernant le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, de ses provinces, de leurs établissements publics et ses autres organismes et personnes de droit public et de droit privé chargés par ces collectivités d'une mission de service public administratif, notamment celles de ses articles L300-1 à L300-4, L311-1 à L311-9 et L321-1 à L321-4. La commission rappelle ensuite qu'une fois signés, les délégations de service public définies comme des contrats de concession de travaux ou de service au sens du code de la commande publique (L1121-1 à L1121-3) et les documents qui s'y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. En conséquence, la communication à un candidat écarté des motifs ayant conduit à ne pas lui attribuer le contrat ne permet pas de refuser la communication de ces documents. Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Sont notamment visées par cette réserve, pour l’ensemble des candidats, y compris l’entreprise retenue, les mentions relatives à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des contrats publics. La Commission considère, en outre, de façon générale que sous réserve des particularités propres à chaque délégation : - l'offre détaillée de l'entreprise retenue est en principe communicable, dans la mesure où elle reflète la qualité et le coût du service rendu à l’usager ; - l'offre globale des entreprises non retenues est, en principe, elle aussi communicable. En revanche, le détail technique et financier de leurs offres ne l’est pas. De plus, doivent être occultées dans les documents préalables à la conclusion du contrat de concession (procès-verbaux, rapports de la commission de délégation de service public et de l'autorité habilitée à signer le contrat, documents relatifs à la négociation des offres…) les mentions relatives aux détails techniques et financiers de ces offres ; - de la même manière, si les moyens techniques et humains mentionnés dans les offres des candidats sont protégés par le secret des affaires, certaines mentions se rapportant au cocontractant, tels que le montant de la masse salariale ou la liste des biens et équipements mis à sa disposition sont en revanche librement communicables, en ce qu’elles reflètent le coût du service ; - les notes et classements des entreprises non retenues ne sont communicables qu'à celles-ci, chacune en ce qui la concerne, en application de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. En revanche, les notes, classements et éventuelles appréciations de l'entreprise lauréate du contrat sont librement communicables ; - le contrat de délégation de service public est communicable ainsi que ses annexes, sous réserve de l'occultation des éléments couverts par le secret des affaires. En l’espèce, en application de ces principes, la commission estime que le document mentionné au point 1) est communicable au demandeur en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sous la réserve tenant au secret des affaires. 2. S'agissant des points 2) et 3) : La commission relève, à titre liminaire que les dispositions du code général des collectivités territoriales ont institué un régime spécifique d'accès, distinct du régime général d'accès aux documents administratifs organisé par les dispositions du code des relations entre le public et l'administration, et que la CADA est compétente pour interpréter en application du 3° du A de l'article L342-2 du code des relations entre le public et l'administration. Elle relève que les exceptions au droit d'accès prévues à l'article L311-6 de ce code ne sont pas opposables à une demande présentée sur le fondement de ces dispositions spéciales. Toutefois, l'exercice de ce droit d'accès particulier ne saurait faire obstacle, par principe, à la protection de secrets protégés par la loi sur d'autres fondements, tels que le secret en matière industrielle et commerciale (CE, 17 mars 2022, n° 449620). La commission relève, ensuite, que ces dispositions particulières du CGCT ne sont pas applicables en Nouvelle-Calédonie. Elle observe, en revanche, que l'article L121-19 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie comporte des dispositions analogues en prévoyant que : « Toute personne physique ou morale a le droit de demander communication des délibérations et des procès-verbaux du conseil municipal, des budgets et des comptes de la commune, des arrêtés municipaux ». La commission estime qu'elle est également compétente pour interpréter ces dispositions dès lors qu'il ressort des termes de l'article L562-17 du CRPA que : « Pour l'application de l'article L342-2 en Nouvelle-Calédonie, les dispositions auxquelles renvoie cet article sont remplacées, le cas échéant, par les dispositions applicables localement ». Les actes mentionnés par l'article L121-19 obéissent aux mêmes principes de communication que ceux entrant dans le champ du CGCT. En l'espèce, la commission estime, par suite, que la délibération mentionnée au point 3) est librement communicable sur le fondement de l'article L121-19 du code précité, sous réserve de l'occultation des éventuelles mentions protégées en application des principes dégagés par la jurisprudence commune de Sète (CE, 10 mars 2010, Commune de Sète, n° 303814). Elle émet, sous ces réserves, un avis favorable. S'agissant du point 2), la commission rappelle que le compte rendu du conseil municipal se distingue du procès-verbal en ce qu'il s'agit d'un document a priori plus succinct, qui retrace les décisions prises par le conseil municipal sur les affaires inscrites à l'ordre du jour, sans détailler les débats, le compte rendu pouvant néanmoins tenir lieu de procès-verbal s’il est suffisamment précis (voir en ce sens CE, 5 décembre 2007, Cne de Forcalqueire). Elle estime, en l'espèce, que ce document, dont elle n'a pas pris connaissance, est communicable à toute personne qui en fait la demande sur le fondement de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration ou, s'il tient lieu de procès-verbal du conseil municipal, de l'article L121-19 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie, sous réserve de l'occultation, le cas échéant, des mentions protégées par le secret des affaires, dans le premier cas, et par le secret en matière industrielle et commerciale prévu par la décision du 17 mars 2022, n° 449620, dans le second cas. Elle émet, sous ces réserves, un avis favorable.