Avis 20232771 Séance du 22/06/2023
Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 9 mai 2023, à la suite du refus opposé par le directeur général des patrimoines à sa demande de consultation et d’obtention de copies intégrales, dans le cadre de son activité de généalogiste, des registres de l'état civil de moins de soixante-quinze ans.
La commission rappelle, en premier lieu, que les actes d'état-civil ne revêtent pas le caractère de document administratif. Il s'ensuit qu'elle n'est pas compétente pour se prononcer sur l'application des dispositions de communication de ce type de documents, telles que prévues notamment par les articles 30 et 32 du décret n° 2017-890 du 6 mai 2017 sur les règles relatives à l'état civil, qui autorisent les généalogistes professionnels à obtenir la copie intégrale ou l’extrait avec indication de la filiation des actes de naissance, de reconnaissance et des actes de mariage avant l’expiration du délai de soixante-quinze ans, dans la mesure où ils effectuent des recherches destinées à identifier les bénéficiaires :
- d’une succession, en application de l’article 36 de la loi n°2006-728 du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités,
- d’un compte bancaire inactif ou d’un contrat d’assurance-vie en déshérence, en application des dispositions de la loi n°2016-617 du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d’assurance vie en déshérence.
En supposant que la demande d'accès de Monsieur X puisse en l'espèce s'analyser comme une demande d'accès à des documents d'archives, présentée sur le fondement du code du patrimoine, la commission rappelle qu'elle est compétente, en vertu des dispositions de l’article L342-1 du code des relations entre le public et l'administration, pour émettre un avis sur la communication, en application des dispositions des articles L213-1 à L213-3 du code du patrimoine, par les services qui le conservent, des documents d’archives publiques, au sens de l’article L211-4 de ce même code.
La commission précise, ensuite, qu'en application du e) du 4° du I de l'article L213-2 du code du patrimoine, les registres de naissance et de mariage de l'état civil sont librement communicables à l'expiration d'un délai de soixante-quinze ans à compter de leur clôture, c'est à dire à compter du 31 décembre de l'année du registre. En l'espèce, elle constate que ce délai n'est pas expiré, de sorte que ces documents ne sont pas librement communicables. Elle rappelle aussi, à toutes fins utiles, que les registres des actes de décès sont, quant à eux, en principe immédiatement communicables à compter de leur date de clôture. La communication des documents librement communicables s’effectue selon les modalités pratiques prévues à l’article L213-1 du code du patrimoine et L311-9 du code des relations entre le public et l’administration.
La commission rappelle qu'en vertu de l'article L213-3 du code du patrimoine, une autorisation de consultation, par anticipation aux délais prévus par l'article L213-2 précité, peut cependant être accordée par l’administration des archives aux personnes, physiques ou morales, qui en font la demande dans la mesure où l'intérêt qui s'attache à la consultation des documents ne conduit pas à porter une atteinte excessive aux intérêts que la loi a entendu protéger. Cette autorisation requiert l’accord préalable de l'autorité dont émanent les documents, l’administration des archives étant tenue par l’avis donné.
La commission rappelle que pour apprécier l'opportunité d'une communication anticipée, elle s'efforce, au cas par cas, de mettre en balance les avantages et les inconvénients d'une communication anticipée, en tenant compte d'une part de l'objet de la demande et, d'autre part, de l'ampleur de l'atteinte aux intérêts protégés par la loi. L’intérêt s’attachant à cette consultation doit être légitime et peut tenir, notamment, dans les nécessités de la gestion ou de la justification de droits dont le demandeur est ou estime être titulaire ou dont il a la charge, comme dans celles de la documentation historique de la recherche. Il appartient au demandeur de justifier de l’intérêt s’attachant à cette consultation. Cet intérêt légitime doit être apprécié au vu de la démarche qu'il entreprend et du but qu'il poursuit en sollicitant la consultation anticipée d'archives publiques, de la nature des documents en cause et des informations qu'ils comportent.
En l'espèce, en réponse à la demande qui lui a été adressée, le directeur général des patrimoines a indiqué à la commission que son refus était motivé par le fait que le procureur de la République du tribunal judiciaire de Paris, dont l’avis est requis en vertu de l’article L213-3 du code du patrimoine, a estimé que la part de l’activité de généalogiste, telle que renseignée dans l’extrait Kbis fourni par Monsieur X, semble résiduelle au regard des autres activités mentionnées.
Quel que soit l'intérêt de la recherche généalogique menée par Monsieur X, la commission estime, comme elle l'a déjà fait à plusieurs reprises, qu'une autorisation de consultation avant l'expiration des délais fixés au I de l'article L213-2 du code du patrimoine accordée à un particulier et portant de manière générale sur l'ensemble des registres d'état civil de naissance et de mariage d'un ressort donné n'est pas souhaitable. Elle considère que l'intérêt qui s'attache à la consultation anticipée de ces documents pourrait conduire à une atteinte excessive aux intérêts que la loi a entendu protéger. Elle émet, par conséquent, un avis défavorable à la demande.