Avis 20232353 Séance du 01/06/2023
Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 10 avril 2023, à la suite du refus opposé par la directrice de l'Agence régionale de santé de Normandie à sa demande de communication des documents suivants, concernant le centre hospitalier de l'Eure-Seine :
1) les rapport et conclusions de l'enquête administrative diligentée en février et mars 2023 à la suite des signalements liés aux difficultés managériales de l'établissement ;
2) les rapport et conclusions de l'enquête administrative menée en mars 2023 portant sur des éléments relatifs à la prise en charge de certaines dépenses relatives à un logement de fonction.
La commission constate que les enquêtes administratives qui ont été réalisées étaient destinées à éclaircir les circonstances de faits allégués de harcèlement moral commis par un ou plusieurs agents de la fonction publique et de prise en charge potentiellement irrégulière de dépenses liées à l’entretien du logement de fonction d'un agent public.
La commission rappelle qu’un rapport d’enquête réalisé par ou à la demande de l'autorité responsable du service public est un document administratif au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration, communicable à toute personne qui en fait la demande en vertu de l'article L311-1 de ce code, à la condition qu'il ne revête pas de caractère préparatoire. Elle indique également qu’en application de l'article L311-6 du code, la communication d'un document administratif doit être précédée, le cas échéant, de l’occultation des mentions dont la communication porterait atteinte au secret de la vie privée ainsi que de celle des mentions portant une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable ou faisant apparaître le comportement d'une personne, dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice. La communication à un tiers ne peut donc intervenir qu’après occultation de ces mentions et sous la réserve qu’une telle occultation rende impossible l’identification des personnes concernées et qu'elles ne soient pas d'une ampleur telle qu'elle conduirait à priver de son sens le document sollicité. Dans l'hypothèse où l'importance des occultations dénaturerait le sens d'un document ou priverait sa communication de tout intérêt, cette communication peut être refusée par l'autorité administrative auprès de laquelle le document a été sollicité en vertu de l'article L311-7 du même code.
En l'espèce, la commission estime que le demandeur, qui a la qualité de tiers par rapport aux documents sollicités, peut se prévaloir du droit d'accès prévu par le titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l'administration, ouvert à toute personne.
Toutefois, d’une part, comme l’indique l’administration dans sa réponse, les documents sollicités revêtent encore à ce jour un caractère préparatoire, tant qu'une décision n'a pas été prise à la suite de la transmission des conclusions de ces enquêtes et que l’autorité administrative n’a pas manifestement renoncé à la prendre.
D’autre part, en tout état de cause, la commission, qui a pu consulter les documents sollicités, relève que ces derniers mentionnent, de façon détaillée et répétée, les témoignages d’agents s’estimant victimes de harcèlement moral ainsi que la situation individuelle d’agents mis en cause à titre personnel, révélant de leur part un comportement dans des conditions susceptibles de leur porter préjudice. Ces mentions sont si fréquentes que leur occultation serait d’une ampleur telle qu'elle conduirait à priver de leur sens les documents sollicités.
La commission émet par suite un avis défavorable.