Avis 20232278 Séance du 01/06/2023

Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 17 avril 2023, à la suite du refus opposé par la présidente du conseil régional d'Ile-de-France à sa demande de communication, en sa qualité de conseiller régional, des documents suivants concernant l'accord‐cadre mono‐attributaire déclaré sans suite, ayant pour objet d'établir les termes régissant des marchés subséquents de partenariat, au sens de l'article 67 de l'ordonnance n° 2015‐899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics qui portent sur une partie du financement, la conception, la réalisation de travaux de rénovation énergétique de plusieurs lycées de la région ainsi que sur tout ou partie du gros entretien-renouvellement, de la maintenance et de l'exploitation des installations techniques qui concourent à la performance énergétique : 1) tous les documents concernant le versement d’une prime pour les candidats non retenus au marché de partenariat pour la rénovation énergétique de 21 lycées prévu par la délibération CP 2020‐349 ; 2) les dossiers de candidature prévu au « Règlement des candidatures » pour la signature d'un accord-cadre ayant donné lieu au versement d'une indemnité. La commission rappelle, à titre liminaire, qu'elle n'est pas compétente pour se prononcer sur les droits d'information que les conseillers régionaux tirent, en cette qualité, de textes particuliers tel l'article L4132-17 du code général des collectivités territoriales, qui dispose que : « Tout membre du conseil régional a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la région qui font l'objet d'une délibération ». Toutefois, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que les élus puissent se prévaloir du droit d'accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l'administration qui est ouvert à toute personne, indépendamment des fonctions qu'elle exerce ou des mandats qu'elle détient. Pour ce qui concerne les documents mentionnés au point 1), la commission rappelle que, conformément aux dispositions combinées des articles L342-1 et R311-12 du code des relations entre le public et l’administration, elle ne peut être saisie par une personne qu’en cas de refus opposé par une autorité administrative à une demande de communication d'un document administratif, laquelle n’a pas nécessairement à être écrite si le demandeur est en mesure d’en établir la réalité et la date. En l’absence d’une telle demande préalable sur les documents mentionnés au point 1), la saisine de la commission est donc irrecevable sur ce point. Pour ce qui concerne les documents mentionnés au point 2), la commission rappelle, en premier lieu, qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s’y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Il résulte, en effet, de la décision du Conseil d’État du 30 mars 2016, Centre hospitalier de Perpignan (n° 375529), que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication. Le Conseil d’État a, en outre, précisé qu’au regard des règles de la commande publique, doivent être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l’ensemble des pièces d’un marché public et que, dans cette mesure, l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire, notamment, sont en principe communicables. Sont également communicables les pièces constitutives du dossier de consultation des entreprises (règlement de consultation, cahier des clauses administratives particulières, cahier des clauses techniques particulières…). En revanche, les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret commercial ne sont, en principe, pas communicables. Il en va ainsi du bordereau des prix unitaires. L'examen de l’offre d’une entreprise attributaire au regard du respect du secret des affaires conduit ainsi la commission à considérer que l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ne sont pas communicables aux tiers. En outre, pour l’entreprise attributaire comme pour l’entreprise non retenue, les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration doivent entraîner l’occultation des éléments suivants : - les mentions relatives aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics ; - dans les documents préparatoires à la passation du marché (procès-verbaux, rapports d'analyse des offres) les mentions relatives aux détails techniques et financiers des offres de toutes les entreprises. L’examen de l’offre des entreprises non retenues au regard des mêmes principes conduit de même la commission à considérer que leur offre de prix globale est, en principe, communicable mais qu’en revanche, le détail technique et financier de cette offre ne l’est pas. En deuxième lieu, la commission précise que le caractère communicable des documents relatifs à la passation d'un marché lorsque la procédure a été déclarée infructueuse ou sans suite dépend du sort que l'acheteur entend réserver à son projet. Si une procédure est relancée après que la précédente a été déclarée infructueuse ou qu'il a été décidé de ne pas lui donner de suite, seule cette déclaration ou cette décision est immédiatement communicable, tous les autres documents conservant un caractère préparatoire jusqu'à la signature du contrat issu de la nouvelle procédure. Si le pouvoir adjudicateur renonce en revanche à conclure le contrat envisagé, les documents relatifs aux procédures déclarées infructueuses ou sans suite perdent leur caractère préparatoire et sont communicables, dans les conditions et sous les réserves qui viennent d’être exposées. En l’espèce, la commission constate que la procédure de consultation initiale pour la conclusion « d’un accord-cadre mono-attributaire de marchés subséquents de partenariat » pour la rénovation de vingt-et-un lycées a été déclarée sans suite en juillet 2020 et que la présidente du conseil régional d’Ile-de-France indique qu’aucun accord-cadre n’a été relancé depuis lors. La commission relève cependant, d’une part, que la décision de déclaration sans suite était motivée par la circonstance que le montage juridique retenu était apparu comme n’étant pas de nature à permettre la rénovation des lycées dans des conditions optimales sur le plan financier et sur le plan de la qualité technique et de l’innovation. La commission en déduit que le conseil régional a renoncé à relancer une nouvelle procédure comparable pour répondre à ses besoins. D’autre part, la commission observe que conformément à ce que prévoyait le règlement de la consultation dans ce cas de figure, le conseil régional a procédé au versement d’une prime forfaitaire aux groupements d’entreprises ayant présenté leur candidature à cette procédure. La commission en conclut que les documents relatifs à la passation de l’accord-cadre déclarée sans suite ne revêtent plus de caractère préparatoire. Toutefois, la commission constate que la demande de Monsieur X tend à la communication des dossiers de candidature tels que prévus par le règlement de la consultation, soit la description des capacités économiques et financières du candidat et la description de ses moyens techniques et professionnels. En application des principes qui ont été rappelés, de tels éléments sont couverts par le secret des affaires des candidats. La présidente du conseil régional d’Ile-de-France a enfin précisé que s’agissant d’un accord-cadre, l’offre de prix présentée par les candidats a pris la forme de prix unitaires, qui, en application des mêmes principes, sont couverts par le secret des affaires des candidats. La commission constate par suite que les documents demandés au point 2) ne sont communicables qu’à chaque candidat, chacun en ce qui les concerne. Elle émet par conséquent un avis défavorable à la demande de communication de Monsieur X.