Avis 20232240 Séance du 01/06/2023
Monsieur XX, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 14 avril 2023, à la suite du refus opposé par le préfet de l'Aube à sa demande de communication du courrier envoyé par la préfecture de l'Aube le 7 décembre 2022 à la commune d'Estissac, mentionné dans une délibération municipale du 17 février, concernant des recommandations dans le cadre d'une procédure de consultation d'entreprises pour un projet municipal.
La commission, qui a pris connaissance de la réponse exprimée par le préfet de l'Aube, estime que le courrier adressé à la maire d'Estissac, établi par le préfet de l'Aube dans le cadre de sa mission de contrôle de la légalité des actes des collectivités locales, est communicable à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, à l'exception des mentions relevant des intérêts protégés par les articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l’administration (CRPA).
A cet égard, la commission rappelle que le 2° de l’article L311-6 du CRPA, aux termes duquel les documents portant un jugement de valeur ou une appréciation ne sont communicables qu'à l'intéressé, ne s’applique qu’aux personnes physiques, à l’exclusion des personnes morales. Une appréciation ou un jugement de valeur est une critique, négative ou positive, portée sur la personnalité d’une personne, sa manière de servir, ses qualités ou défauts.
La commission considère que le courrier en cause, dont elle a pu prendre connaissance, ne comporte aucune mention de cette nature quant à la personne de la maire.
S’agissant des documents faisant apparaître le comportement d’une personne, physique ou morale, dans des conditions susceptibles de lui porter préjudice au sens du 3° de l'article L311-6 du CRPA, la commission précise que cette exception recouvre en principe deux hypothèses différentes :
- les lettres de plainte ou de dénonciation ainsi que les témoignages ou signalements, sur lesquels l’administration s’appuie pour prendre une décision, ne sont pas communicables à des tiers, y compris lorsque ceux-ci sont visés par la plainte ou la dénonciation en question, dès lors que leur auteur est identifiable et que le contexte fait craindre un risque de représailles ou de dégradation des relations ;
- la divulgation du comportement d’une personne peut également lui porter préjudice lorsque la diffusion de cette information pourrait entraîner une dégradation de sa situation, voire de sa réputation, ou lorsque l’irrégularité commise par cette personne est susceptible de poursuites ou de sanctions.
La commission considère toutefois que, compte tenu de l’objectif de transparence poursuivi par le droit d’accès consacré par le titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration, la communication d’un document administratif ne saurait en principe être refusée au seul motif qu’il ferait apparaître, de la part d’une administration publique ou d’une personne privée chargée d’une mission de service public dans l’exercice de cette mission, un comportement dont la divulgation pourrait lui porter préjudice.
Elle constate qu'en l'espèce, le courrier du préfet de l'Aube rappelle à la maire d'Estissac différents points de la réglementation relative à la passation des marchés publics, concernant un marché de travaux de la salle polyvalente et multi-sports de la commune. La commission estime que, compte tenu des principes précédemment rappelés et dès lors que le préfet de l'Aube s'adresse à la maire de la commune dans le cadre de l’exercice des missions de service public exercées par cette dernière, l'exception tenant à l'incommunicabilité du document au motif qu'une telle communication ferait apparaître un comportement de la maire dont la divulgation pourrait lui porter préjudice n'est pas susceptible d'être opposée à une demande de communication du courrier en cause.
Elle émet, dès lors, un avis favorable, sous réserve de l'occultation préalable des mentions dont la communication porterait atteinte au secret des affaires.