Avis 20230782 Séance du 30/03/2023
Madame X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 13 février 2023, à la suite du refus opposé par le maire de Putanges-le-Lac à sa demande de communication sous format numérique d'une copie des documents suivants :
1) les devis de toutes les sociétés intervenant sur le système de caméras, quelques soient leurs compétences (fourniture matériels caméras et informatique, installation et génie civil, électricité...) ;
2) les procès verbaux d'intervention de sociétés qui ont travaillé sur le déploiement de la vidéosurveillance quelques soient leurs compétences (fourniture matériels caméras et informatique, installation et génie civil, électricité...) ;
3) les comptes rendus des commissions où le sujet des caméras de vidéosurveillance a été abordé ;
4) les demandes de cotations envoyés aux entreprises en lien avec le système de vidéosurveillance (fourniture matériels caméras et informatique, installation et génie civil, électricité...) ;
5) le cahier des charges du système de vidéosurveillance ;
6) les documents techniques fournis par les entreprises ayant répondu aux demandes de devis ;
7) les échanges écrits entre les sociétés consultées et ayant travaillées sur le déploiement de la vidéosurveillance et les représentants de la mairie ;
8) les attributions comptables des dépenses inhérentes déjà réalisées.
La commission relève, à titre liminaire, que le livre III du code des relations entre le public et l'administration garantit à toute personne un droit d’accès aux documents administratifs existants ou susceptibles d’être obtenus par un traitement automatisé d’usage courant. Toutefois, le livre III du code des relations entre le public et l'administration ne fait pas obligation aux administrations de répondre aux demandes trop générales ou insuffisamment précises (CE, 27 sept. 1985, req. n° 56543, Lebon 267. - CE, 30 juin 1989, req. n° 83477).
La commission rappelle, en premier lieu, qu'une fois signés, les contrats de la commande publique, tels que les marchés publics, et les documents qui s’y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. Ce droit de communication doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Il résulte en effet de la décision du Conseil d’État du 30 mars 2016, « Centre hospitalier de Perpignan » (n°375529), que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication.
Le Conseil d’État a en outre précisé qu’au regard des règles de la commande publique, doivent être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l’ensemble des pièces d’un marché public et que, dans cette mesure, l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire, notamment, sont en principe communicables. Sont également communicables les pièces constitutives du dossier de consultation des entreprises (règlement de consultation, cahier des clauses administratives particulières, cahier des clauses techniques particulières…).
En revanche, les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité concurrentiel et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret des affaires ne sont, en principe, pas communicables. Il en va ainsi de l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ainsi que du mémoire technique, qui ne sont, de fait, pas communicables aux tiers. Revenant sur sa doctrine antérieure, la commission a également précisé dans son conseil n° 20221455 du 21 avril 2022, qu’il en va aussi désormais ainsi des factures, bons de commande, états d’acompte, décomptes et autres pièces établies dans le cadre de l’exécution d’un marché public, en tant que ces documents mentionnent les prix unitaires.
La commission rappelle, en second lieu, sa position constante selon laquelle si les plans de situation des caméras et des zones qu’elles couvrent sont soumis à la commission départementale de vidéoprotection prévue par les articles L251-4 et R251-7 du code de sécurité intérieure, ils ne font pas partie des informations qui doivent être obligatoirement mises à la disposition du public, en vertu de l’article R252-10 du même code. Par suite, eu égard au but poursuivi par le législateur, la commission estime que la communication de ces plans serait de nature à porter atteinte à la sécurité publique que protègent les dispositions du d) du 2° de l’article L311-5 du code des relations entre le public et l’administration. Il en irait de même des autres détails techniques dont l’exploitation pourrait porter atteinte à la sûreté du système mis en place et, ainsi, à la sécurité publique.
En application de ces principes, la commission estime que les documents sollicités, à condition que l'autorité saisie soit en capacité de les identifier et qu'ils existent, sont communicables à toute personne qui en fait la demande, après occultation ou disjonction des éléments protégés par le secret des affaires, en application de l'article L311-6 du code précité, et susceptibles de porter atteinte à la sécurité publique au sens des dispositions qui ont été rappelées.
En l'espèce, elle relève qu'en réponse à la demande qui lui a été adressée, le maire de Putanges-le-Lac a précisé qu'il ne voyait aucun obstacle à la communication des documents sollicités, à condition toutefois qu"ils existent en soulignant, à titre d'illustration, que tel n'était pas le cas des documents mentionnés au point 2).
La commission déclare, dès lors, la demande d'avis sans objet sur ce point. Elle émet un avis favorable pour le surplus, sous l'ensemble des réserves évoquées ci-dessus.