Conseil 20230525 Séance du 09/03/2023
La Commission d'accès aux documents administratifs a examiné lors de sa séance du 9 mars 2023 votre demande de conseil relative au caractère communicable, à des candidats désirant remettre une offre dans le cadre de l'appel à candidatures en vue de la conclusion d'un bail commercial pour l'exploitation d’une auberge communale, des derniers bilans comptables (bilan, comptes de résultat etc.), sachant que cette auberge était précédemment gérée sous forme de délégation de service public par un exploitant qui va probablement candidater.
La commission rappelle à titre liminaire qu'une fois signés, les délégations de service public définies comme des contrats de concession de travaux ou de service au sens du code de la commande publique (L1121-1 à L1121-3) et les documents qui s'y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration.
Ce droit de communication doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Il résulte de cet article que le secret des affaires comprend le secret des procédés, des informations économiques et financières et des stratégies commerciales ou industrielles. Il s’apprécie en tenant compte, le cas échéant, du fait que la mission de service public est soumise à la concurrence, et eu égard à la définition donnée à l’article L151-1 du code de commerce. Aux termes de cet article est protégée par le secret des affaires toute information répondant aux critères suivants : « (…) 1° Elle n'est pas, en elle-même ou dans la configuration et l'assemblage exacts de ses éléments, généralement connue ou aisément accessible pour les personnes familières de ce type d'informations en raison de leur secteur d'activité ; 2° Elle revêt une valeur commerciale, effective ou potentielle, du fait de son caractère secret ; 3° Elle fait l'objet de la part de son détenteur légitime de mesures de protection raisonnables, compte tenu des circonstances, pour en conserver le caractère secret. ».
La commission, qui n'a d'ailleurs en l'espèce pas pris connaissance des documents sollicités, précise qu'elle n'est pas en capacité de détailler les informations des comptes annuels du délégataire communicables ou devant au contraire être occultées au titre du secret des affaires. Elle rappelle, en outre, qu’il ne lui appartient pas d’indiquer précisément et de manière exhaustive, au sein d’un document volumineux, les mentions qui doivent être occultées, cette opération incombant à l'administration, mais seulement d’éclairer cette dernière sur le caractère communicable ou non de passages ou informations soulevant des difficultés particulières d’appréciation et sur lesquels la commission attire son attention.
Elle propose en revanche de rappeler les lignes directrices suivantes.
Comme elle a eu l'occasion de le préciser dans son avis n° 20180712 du 11 octobre 2018 en partie II, il convient en premier lieu de distinguer d'une part, les données à caractère financier relatives à l'exécution d'un contrat de concession de service public et qui sont mentionnées notamment dans le rapport annuel du concessionnaire, et d'autre part les données financières de sociétés chargées de l'exécution d'une mission de service public mais qui peuvent également avoir d'autres activités.
Dans cette seconde situation, seules les données financières relatives à l'exécution des missions de service public sont communicables, à l'exception des informations économiques portant sur la société dans son ensemble, sauf à ce qu'il s'agisse d'une société entièrement dédiée à l'exécution d'un contrat de concession. Ainsi, s'agissant du chiffre d'affaires, de la marge opérationnelle et du résultat net de l'exploitation, ces données sont communicables dès lors qu'elles ne concernent que l'activité déléguée et non la société délégataire dans son ensemble. Les produits, notamment les recettes commerciales et les concours publics sont également communicables de même que le montant des investissements.
La commission rappelle ensuite que de façon générale, les informations relatives aux moyens humains et techniques et celles reflétant la stratégie commerciale du délégataire sont couvertes par le secret des affaires.
A cet égard, la commission a estimé que les charges et produits de l'exploitation d'un service public délégué ne sont pas couverts par le secret des affaires : seules doivent être occultées dans les comptes de résultat et les comptes prévisionnels, les données faisant apparaître de façon détaillée les charges de personnel et de fonctionnement, qui reflètent les moyens techniques et humains de l'entreprise délégataire (conseil n° 20171851), dans cette mesure, le résultat de l'exercice comptable ainsi que les charges et produits d'exploitation sont communicables.
Elle a également considéré (conseil n° 20171851) que le programme de renouvellement des équipements par l'exploitant d'un service public était communicable sans occultation, ainsi que les données tarifaires et le montant de la redevance perçue dès lors que celle-ci a un impact sur le coût du service (conseils n° 20150349 et 20170902). Les tableaux d'amortissement sont également communicables sous réserve du secret des affaires (avis n° 20144069 et 20171373) et à condition que la demande porte sur les amortissements de l'activité concédée et non sur les comptes de la société, sauf à ce qu'elle soit dédiée à l'activité déléguée.
Les charges de personnel, les charges de structure et les frais financiers dans l'exploitation de l'activité sont communicables dans leur montant total, alors que les éléments détaillés les concernant sont protégés par le secret des affaires, ainsi que les effectifs précis des sociétés exploitantes, le montant de leurs actifs et des dettes, le niveau de bénéfice et le taux de rentabilité.
La commission précise, enfin, qu'à la différence des informations relatives aux moyens humains et techniques du délégataire ainsi que celles reflétant sa stratégie commerciale, qui sont couvertes par le secret des affaires, les informations permettant d'apprécier la qualité et le coût du service devant être rendu aux usagers, sont librement communicables.
En l'espèce, il vous appartient donc de vous livrer à l'analyse des documents sollicités en identifiant, pour chacun d'entre eux, d'une part, les mentions qui permettent d'apprécier la qualité et le coût du service devant être rendu aux usagers, librement communicables et, d'autre part, les mentions qui par leur degré de précision et/ou la nature de l'information révélée, sont couvertes par le secret des affaires de l'ancien délégataire.