Avis 20230283 Séance du 16/02/2023
Madame X a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 9 janvier 2023, à la suite du refus opposé par la présidente de la communauté d'agglomération Ventoux-Comtat Venaissin à sa demande de communication, en sa qualité de conseillère départementale, de la liste des 73 organismes concernés et de tous les organismes établis sur le territoire des communes d'Aubignan, de Carpentras et de Loriol du Comtat, également concernés par la délibération adoptée par le conseil de communauté le 12 décembre 2022 relative à la redevance spéciale des déchets.
La commission rappelle, à titre liminaire, qu'elle n'est pas compétente pour se prononcer sur les droits d'information que les conseillers départementaux tirent, en cette qualité, de textes particuliers. Toutefois, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que les élus puissent se prévaloir du droit d'accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l'administration qui est ouvert à toute personne, indépendamment des fonctions qu'elle exerce ou des mandats qu'elle détient.
Après avoir pris connaissance de la réponse de l'administration à la demande qui lui a été adressée, la commission relève, comme elle l'a fait dans son avis n° 20212034 du 6 mai 2021, qu'en application du premier alinéa de l'article L2333-78 du code général des collectivités territoriales : « Les communes, les établissements publics de coopération intercommunale et les syndicats mixtes peuvent instituer une redevance spéciale afin de financer la collecte et le traitement des déchets mentionnés à l'article L2224-14. ». Le tarif, fixé par l'assemblée délibérante, est calculé en fonction de l'importance du service rendu, notamment de la quantité des déchets gérés. Il peut toutefois être fixé de manière forfaitaire pour la gestion de petites quantités de déchets.
En premier lieu, la commission rappelle que le volume des déchets générés par une personne physique ou morale est une information environnementale au sens de l'article L124-2 du code de l'environnement qui dispose qu'est considérée comme information relative à l'environnement toute information disponible, quel qu'en soit le support, qui a pour objet : « 1° L'état des éléments de l'environnement, notamment l'air, l'atmosphère, l'eau, le sol, les terres, les paysages, les sites naturels, les zones côtières ou marines et la diversité biologique, ainsi que les interactions entre ces éléments ; / 2° Les décisions, les activités et les facteurs, notamment les substances, l'énergie, le bruit, les rayonnements, les déchets, les émissions, les déversements et autres rejets, susceptibles d'avoir des incidences sur l'état des éléments visés au 1° ; ». En revanche, elle estime que ce volume ne constitue pas, s'agissant d'un dispositif dont l'objet est d'organiser le ramassage, la gestion et le traitement des déchets, une information relative à des émissions de substance dans l'environnement. Il en résulte que, quel que soit le mode de financement du système d'enlèvement des déchets, taxation ou redevance pour service rendu, ce volume est communicable à toute personne qui en fait la demande en application des dispositions de l'article L311-1 et L124-1 du code de l'environnement, sous réserve des dispositions de l'article L311-6, notamment le respect du secret de la vie privée et du secret des affaires. La commission précise à cet égard que le volume de déchets généré par un foyer, en logement individuel, relève de la vie privée de ce foyer mais qu'en revanche, le volume de déchets généré par une personne morale n'est pas en lui-même, sauf le cas particulier où ce volume serait directement lié à l'activité de cette personne, révélateur du niveau d'activité de cette personne morale protégé par le secret des affaires.
La commission considère, en deuxième lieu, que le montant acquitté par chaque redevable n'est pas, en dehors des régimes spéciaux de communication, tel que celui par l’article L104 b) du livre des procédures fiscales qui prévoit un droit d’accès particulier à un extrait du rôle des impositions locales visant des redevables nommément désignés au bénéficie d’une personne inscrite sur ce rôle, communicable aux tiers au nom du respect de la vie privée pour les personnes physiques et, s’agissant d’une personne morale, du secret des informations économiques et financières, composante du secret des affaires, ainsi que, le cas échéant, du secret fiscal pour ce qui concerne la taxe d’enlèvement des ordures ménagères prévue par le code général des impôts.
En troisième lieu, la commission estime que les modalités et la fréquence du service rendu ne constituent pas des informations propres à chaque redevable mais sont les caractéristiques du service proposé par la collectivité et qu'à ce titre, elles sont communicables à toute personne qui en fait la demande en application des dispositions du livre III du code des relations entre le public et l'administration ou, lorsqu'elles sont définies par une délibération d'une collectivité territoriales, du code général des collectivités territoriales.
Il résulte de ce qui précède que le volume des déchets générés par une personne physique ou morale est en principe communicable à toute personne qui en fait la demande quel que soit le mode de financement du service, sauf le cas particulier d'un habitat individuel dispersé et l'hypothèse résiduelle où le volume de déchets est directement en lien avec l'activité même de la personne morale considérée. Elle précise que ce volume constituant une information environnementale au sens de l'article L124-2 du code de l'environnement, il appartient en tout état de cause à l'administration d'apprécier l'intérêt d'une communication en mettant en balance les intérêts protégés et l’intérêt public servi par la divulgation d’une information environnementale avant de communiquer une information ou d'y opposer un refus. En revanche, les montants acquittés au titre de l'enlèvement des déchets ne sont pas communicables aux tiers.
En l'espèce, la commission estime que la liste sollicitée, dont elle a pris connaissance et qui porte sur le rôle des seules personnes morales assujetties à la redevance spéciale, est communicable, dans sa dernière version, à Madame X, après occultation préalable de la dernière colonne portant sur le montant de ladite redevance. Il appartient, par ailleurs, à l’administration d'apprécier au cas par cas si le volume de déchets reflète directement l'activité de la personne morale considérée et donc relève en ce cas du secret des affaires, en considérant néanmoins l'intérêt d'une communication eu égard à l'intérêt public qui s'y attache.
La commission émet donc sous ces réserves un avis favorable. Elle précise par ailleurs que le caractère par nature évolutif de cette liste ne saurait être un obstacle à sa communication.