Avis 20228180 Séance du 16/02/2023
Madame X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 30 décembre 2022, à la suite du refus opposé par le directeur de l'Ecole nationale supérieure des beaux-arts de Paris (ENSBA) à sa demande de communication des documents suivants :
1) un état global et détaillé des horaires (en nombre d'heures par année) effectués par les enseignants de l'ENSBA, faisant apparaître les horaires hors enseignement strict (coordination pédagogique, etc.) et la discipline enseignée, donnant lieu à rémunération, ainsi qu'une liste anonymisée de ces enseignants faisant apparaître leur ancienneté dans l'école, ainsi que l'évolution de leurs quotités horaires et de leur taux, exprimé en INM, de rémunération, à compter du 1er janvier 2012 au moins ;
2) ainsi que de même, pour les professeurs n'ayant pas d'indice, avec indication d'équivalent d'INM en sachant que le calcul pour les enseignants de langues est 298 pour un plein temps.
Après avoir pris connaissance de la réponse du directeur de l’ENSBA, la Commission rappelle, d’une part, que le livre III du code des relations entre le public et l'administration ne fait pas obligation aux autorités administratives de répondre aux demandes de renseignements qui leur sont adressées, ni d'élaborer un document nouveau en vue de procurer les renseignements ou l'information souhaités (CE, 30 janvier 1995, n° 128797 ; CE, 22 mai 1995, n° 152393). Elle considère en revanche de manière constante que sont des documents administratifs existants au sens de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l’administration, ceux qui sont susceptibles d’être obtenus par un traitement automatisé d’usage courant. Il résulte en effet de la décision du Conseil d’État du 13 novembre 2020, n° 432832, publié aux Tables, que constituent des documents administratifs, au sens de ces dispositions, les documents qui peuvent être établis par extraction des bases de données dont l’administration dispose, si cela ne fait pas peser sur elle une charge de travail déraisonnable, laquelle doit être interprétée de façon objective.
La Commission précise, à ce titre, que les informations demandées doivent pouvoir être obtenues par un traitement automatisé de données, sans retraitements successifs, en particulier par des interventions manuelles. Elle estime également que, lorsque les informations sollicitées doivent, pour être extraites d'un fichier informatique, faire l'objet de requêtes informatiques complexes ou d'une succession de requêtes particulières qui diffèrent de l'usage courant pour lequel le fichier informatique dans lequel elles sont contenues a été créé, l'ensemble des informations sollicitées ne peut alors être regardé comme constituant un document administratif existant (avis n° 20222817, 20222850 et 20222936 du 23 juin 2022). Une demande portant sur la communication d'un tel ensemble d'informations doit dès lors être regardée comme tendant à la constitution d'un nouveau document (conseil n° 20133264 du 10 octobre 2013) et, par suite, être déclarée irrecevable.
D’autre part, la Commission rappelle que le contrat de travail ou le bulletin de salaire d’un agent public est communicable à toute personne en fait la demande, sous réserve, conformément aux articles L311-6 et L311-7 du code des relations entre le public et l'administration, que soient occultées les mentions dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée, à savoir notamment les éléments relatifs à la situation personnelle de l’agent (date de naissance, adresse privée, situation de famille, horaires de travail, dates de congé), ou révélerait une appréciation ou un jugement de valeur portés sur la manière de servir de l’agent.
A cet égard, la Commission souligne que le Conseil d’État (CE, 24 avril 2013, n° 343024 et CE, 26 mai 2014, n° 342339) a précisé que lorsque la rémunération qui figure dans le contrat de travail ou le bulletin de salaire d'un agent public résulte de l'application des règles régissant l'emploi concerné, sa communication à un tiers n'est pas susceptible de révéler sur la personne recrutée une appréciation ou un jugement de valeur, au sens des dispositions de l'article L311-6 du code des relations entre le public et les administrations, mais qu'en revanche, lorsqu'elle est arrêtée d'un commun accord entre les parties sans référence à des règles la déterminant, la rémunération révèle nécessairement une telle appréciation ou un tel jugement de valeur .
En l’espèce, la Commission prend note de la réponse du directeur de l’ENSBA, selon laquelle l’école ne dispose pas d'un système d'information de gestion des ressources humaines permettant d'éditer un document comportant l’ensemble des informations demandées par Madame X. La Commission ne peut dès lors que déclarer la demande d’avis irrecevable en tant qu’elle porte sur l’extraction d’un document comportant l’ensemble de ces informations.
La Commission émet en revanche un avis favorable à la communication de l’extraction produite par le directeur de l’ENSBA à partir du logiciel de paye, qui comporte l’ancienneté et la rémunération totale perçue depuis 2012 par le personnel de l’école, sous réserve de l’occultation, le cas échéant, des mentions relevant des secrets protégés par l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration.