Avis 20228134 Séance du 16/02/2023

Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 28 décembre 2022, à la suite du refus opposé par le président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis à sa demande de communication des documents ayant fondé l'autorisation d'abattage d'arbres sur la RD37 et les compensations liées : 1) la demande d'autorisation de déroger à l'interdiction d'abattage d'arbres d'alignement avenue Gabriel Péri à Montreuil (RD 37) déposée par le département auprès du préfet de Seine‐Saint‐Denis le 26 septembre 2022 ainsi que l'ensemble des documents annexés à celle‐ci ; 2) le complément apporté le 14 octobre 2022 à ladite demande d'autorisation ; 3) l'ensemble des documents concernant les mesures de compensation évoquées dans ladite demande d'autorisation et son complément ; 4) les pièces du marché passé pour l'abattage des 36 arbres concernés par la demande d'autorisation susmentionnée y compris : a) l'ordre de service ; b) le procès-verbal des opérations préalable à la réception des travaux en question ; c) l'ensemble des pièces concernant ladite réception des travaux ; 5) les pièces du marché passé pour le diagnostic de biodiversité passé avec l'entreprise X concernant les arbres d'alignement susmentionnés ; 6) les pièces des marchés passés avec les entreprises X et X pour les diagnostics phytosanitaires des arbres de l'avenue Gabriel Péri à Montreuil réalisés en 2019 et 2022 ; 7) les pièces du marché passé avec l'entreprise X pour son diagnostic sur les mêmes arbres réalisé en août septembre 2022 ainsi que l'analyse qui en a été faite ; 8) l'ensemble des données relatives aux circulations des vélos, des bus et des voitures ayant servi de fondement à la demande d'autorisation du 26 septembre 2022 ci‐dessus mentionnée. En premier lieu, la commission estime que l'autorisation d'abattage d'arbres ainsi que les documents afférents, mentionnés aux points 1), 2), 3) et 8) de la demande, constituent des documents administratifs communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration et des articles L124-1 et suivants du code de l'environnement. Elle émet donc un avis favorable sur ces quatre points. En second lieu, la commission rappelle qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s'y rapportent sont considérés comme des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par les articles L300-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration. Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Il résulte en effet de la décision du Conseil d’État du 30 mars 2016, Centre hospitalier de Perpignan (n° 375529), que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication. Le Conseil d’État a en outre précisé qu’au regard des règles de la commande publique, doivent être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l’ensemble des pièces d’un marché public et que, dans cette mesure, l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire, notamment, sont en principe communicables. Sont également communicables les pièces constitutives du dossier de consultation des entreprises (règlement de consultation, cahier des clauses administratives particulières, cahier des clauses techniques particulières, etc.). En revanche, les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité concurrentiel et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret des affaires ne sont, en principe, pas communicables. Il en va ainsi de l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ainsi que du mémoire technique, qui ne sont, de fait, pas communicables aux tiers. Revenant sur sa doctrine antérieure, la commission a également précisé dans son conseil n° 20221455 du 21 avril 2022, qu’il en va aussi désormais ainsi des factures, bons de commande, états d’acompte, décomptes et autres pièces établies dans le cadre de l’exécution d’un marché public, qui ne sont communicables qu'après occultation des prix unitaires ou de la décomposition du prix forfaitaire, susceptibles, en soi, de refléter la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité déterminé. Par ailleurs, la commission souligne qu’il résulte de l’article L3121-17 du code général des collectivités territoriales que toute personne peut demander communication des délibérations et procès-verbaux des séances publiques du conseil départemental, des arrêtés du président, ainsi que des budgets et comptes du département. L’ensemble des pièces annexées à ces documents, y compris les pièces justificatives des comptes, sont communicables à toute personne qui en fait la demande, selon les modalités prévues par l’article L311-9 du code des relations entre le public et l’administration. La commission rappelle toutefois que si l'article L3121-17 du code général des collectivités territoriales a institué un régime spécifique d'accès aux documents des départements, distinct du régime général d'accès aux documents administratifs organisé par les dispositions du code des relations entre le public et l'administration, et si les exceptions au droit d'accès prévues à l'article L311-6 de ce code ne sont pas opposables à une demande présentée sur le fondement de ces dispositions spéciales, l'exercice de ce droit d'accès particulier ne saurait faire obstacle, par principe, à la protection de secrets protégés par la loi sur d'autres fondements, tels que le secret de la vie privée (CE 10 mars 2010, n° 303814, commune de Sète ; conseil n° 20121509 du 19 avril 2012 et conseil n° 20123242 du 27 septembre 2012), le secret médical (conseil n° 20122788 du 26 juillet 2012), le secret des correspondances échangées entre le client et son avocat (avis n° 20111095 du 14 avril 2011), ou le secret industriel et commercial (CE, 17 mars 2022, n° 449620). A ce titre, le détail des prix, susceptible, en soi, de refléter la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité déterminé, doit être occulté (avis n° 20221246 et n° 20221455 du 21 avril 2022). En application de ces principes, la commission émet par suite un avis favorable à la communication des documents sollicités aux points 4), 5), 6) et 7) de la demande, sous réserve en particulier de l’occultation préalable des éventuelles mentions couvertes par le secret des affaires.