Conseil 20227961 Séance du 16/02/2023
La commission d'accès aux documents administratifs a examiné dans sa séance du 16 février 2023 votre demande de conseil relative au caractère communicable à un agent de message électroniques échangés entre deux services de ressources humaines (RH) au sujet de sa rémunération alors qu'aucune décision n'a encore été prise et que ces messages électroniques n'ont pas vocation à être intégrés dans son dossier individuel dès lors qu'il ne s'agit pas de décisions.
1. Sur la recevabilité de la demande :
La commission vous rappelle que le droit d'accès aux documents administratifs défini par le livre III de ce code ne contraint pas l'administration à effectuer des recherches pour répondre à une demande et que les administrations ne sont pas tenues de répondre aux demandes trop générales ou insuffisamment précises (CE 27 septembre 1985, Ordre des avocats au barreau de Lyon c/ X, n° 56543, Lebon 267 ; CE 30 juin 1989, OPHLM de la Ville de Paris, n° 83477).
Elle estime ainsi irrecevables les demandes portant sur des échanges intervenus entre une ou des administrations et une autre administration ou une personne privée, lorsqu’elles sont trop imprécises quant à l'objet des documents demandés (avis n° 20216781 du 16 décembre 2021), quant à leur nature (avis n° 20195507 du 12 mars 2020), quant à l'administration et/ou ses composantes en cause (avis n° 20195507 du 12 mars 2020), quant à son ou ses interlocuteurs (avis n° 20194880 du 12 mars 2020 ; n° 20213868 du 15 juin 2021), quant au cadre d'élaboration du document (avis n° 20213868 du 15 juin 2021) ou encore quant à la période de temps visée (avis n° 20213868 du 15 juin 2021).
La commission note qu'en l'espèce, vous indiquez que la demande qui vous est adressée ne "précise pas de quel mail il s'agit en dehors de la mention relative à sa rémunération", alors que "de multiples mails ont été échangés depuis plusieurs semaines sur plusieurs aspects de sa situation". Elle estime néanmoins que la demande, telle que formulée, est suffisamment précise pour identifier son objet, à savoir le ou les courriels émanant du pôle RH de la direction interrégionale des Douanes d'Ile-de-France à destination de la direction générale et adressant une demande à cette dernière quant à la rétroactivité du salaire de l'intéressé depuis le 17 octobre 2022.
2. Sur le caractère communicables des courriels demandés :
La commission vous rappelle qu’aux termes de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l’administration : « Sont considérés comme documents administratifs, au sens des titres Ier, III et IV du présent livre, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l'Etat, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission. / (…) ».
Comme elle l'a indiqué dans son avis n° 20184184 du 6 décembre 2018, la commission considère que les courriers électroniques détenus ou reçus par les agents publics dans le cadre de leurs missions sur leurs terminaux professionnels, ce qui exclut les messages identifiés comme étant personnels, s’ils sont en possession de l’administration et sont susceptibles de faire l’objet d’une extraction par un traitement automatisé d'usage courant, sont des documents administratifs au sens des dispositions précitées, communicables à toute personne qui en fait la demande en application de l’article L311-1 du même code, dans le respect des secrets protégés par les articles L311-5 et L311-6, et par suite, le cas échéant, après occultation de ces derniers ou disjonction des documents qui en relèveraient entièrement en application des dispositions de l’article L311-7.
La commission précise, à cet égard, que le h) du 2° de l'article L311-5 du code des relations entre le public et l'administration prévoit que ne sont pas communicables les documents dont la communication porterait atteinte à un secret protégé par la loi. Elle estime que pour entrer dans le champ de cette réserve, une obligation de confidentialité doit bénéficier dans la hiérarchie des normes d’un régime de protection fixé par une loi ou par des textes ou principes de valeur supérieure entrant dans le champ de cette réserve. En l’espèce, la commission relève que la confidentialité des échanges entre les membres de la DGDDI n’est consacrée par aucun texte. Elle en déduit que cet impératif dont vous faites état ne saurait en l’espèce faire obstacle à la communication des documents demandés.
La commission précise également que le droit d'accès prévu au livre III du code des relations entre le public et l'administration s'applique à l'ensemble des documents détenus par une administration dans le cadre de la mission de service public dont elle a la charge, sans qu'il y ait lieu d'opérer des distinctions au sein de celle-ci. Elle en déduit que la circonstance que la demande ait été adressée à la direction interrégionale, alors que la Direction générale prend les décisions et transmet des instructions à cette dernière, est sans incidence sur l'obligation de communication pesant sur cette administration prise dans son ensemble.
La commission précise enfin qu'est sans incidence sur l'appréciation à porter la circonstance que ces courriels ne seraient pas décisoires et que ne l'est pas davantage le fait qu'ils n'auraient pas vocation à être versés dans le dossier individuel de l'agent.
La commission vous rappelle néanmoins qu'un document préparatoire est exclu du droit d'accès prévu par le titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration aussi longtemps que la décision administrative qu'il prépare n'est pas intervenue ou que l'administration n'y a pas manifestement renoncé, à l'expiration d'un délai raisonnable.
En l'espèce, la commission comprend des termes de votre demande de conseil que la demande de communication sur laquelle vous l'interrogez émane d'un agent qui souhaite recevoir copie de messages électroniques échangés entre vos services et le service RH de la Direction Interrégionale des Douanes d'Île-de-France au sujet d'une demande de l'agent relative à sa rémunération sur laquelle il n'a pas encore été statué. Elle considère, dès lors, que ces documents administratifs revêtent, en l'état, un caractère préparatoire et ne sont pas communicables.
Au regard de ce qui précède, la commission vous invite à refuser la communication des documents sollicités mais précise que lorsqu'ils perdront leur caractère préparatoire, ils seront alors communicables à l'intéressé, sous les réserves précédemment mentionnées.