Avis 20227797 Séance du 26/01/2023
Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 9 décembre 2022, à la suite du refus opposé par le maire de Lunel à sa demande de communication des documents suivants :
- en son nom personnel :
1) les procès-verbaux de la commission de sécurité, du projet et de la réception du permis de construire concernant l'ombrière n° X ainsi que celui de la visite de l'école du Parc se déroulant après celui de 2015 ;
2) l'arrêté d'ouverture pour la terrasse située au 1er étage des arènes ;
3) pour le lavoir, un procès-verbal d'infraction a -il- été établi ? pourquoi le procureur de la République n'a-t-il- pas été saisi ?
4) les procès-verbaux de réception et de visite de la commission de sécurité des arènes municipales, comprenant le bar du Pavillon, le restaurant et sa cuisine ;
5) le dernier procès-verbal de visite de la commission de sécurité de l'ensemble du bâtiment des arènes ;
6) le permis de construire autorisant le changement de destination de la terrasse du premier étage de toit terrasse en lieu musical, de la cuisine en lieu de de restaurant ;
7) la facture de la VMC ;
8) l'arrêté de permis de construire X ainsi que le plan de masse ;
- pour l'association X :
9) la notice de sécurité article GE 6 du règlement du 25 Juin 1980 ;
10) le registre mentionné à l’article R123-51 du code de la construction et de l'habitation comprenant la terrasse du 1er étage des arènes de Lunel ;
11) les autorisations d'urbanisme concernant l'aménagement des coques ou cellules commerciales rue de la Libération ;
12) les procès-verbaux du projet de la commission de sécurité ;
13) le permis d'aménager selon l'article R421-19 du code de l'urbanisme ;
14) les devis des architectes choisis par la ville pour intervenir sur ces coques ;
15) le procès-verbal de projet et de réception de la commission de sécurité portant sur la terrasse des arènes ;
16) l'arrêté d'ouverture desdites arènes ;
17) l’arrêté de la commission d'accessibilité portant sur les activités de spectacle dans les arènes ;
18) la Maestria production a-t-elle une licence d'organisateur de spectacle ?
19) l'arrêté de permis de construire des arènes a-il-été notifié au préfet ainsi que la jauge de la terrasse ?
En réponse à la demande qui lui a été adressée, le maire de Lunel a indiqué à la commission qu’il considérait la demande comme abusive, cette nouvelle demande intervenant dans un contexte de demandes incessantes de la part de Monsieur X.
La commission rappelle que le droit d’accès doit rester compatible avec le bon fonctionnement des services et cède devant les demandes abusives, auxquelles les administrations ne sont pas tenues de répondre, en application du dernier alinéa de l'article L311-2 du code des relations entre le public et l'administration.
Toute demande portant sur une quantité importante de documents ou le fait pour une même personne d’adresser soit plusieurs demandes à une même autorité soit des demandes multiples formulées à l’identique à plusieurs autorités, ne sont pas nécessairement assimilables à des demandes abusives. Une demande peut être regardée comme abusive, au sens de ces dispositions, lorsqu'elle a pour objet de perturber le bon fonctionnement de l’administration sollicitée. Relèvent de cette catégorie les demandes récurrentes, portant sur un volume important de documents traitant, le cas échéant, de la même affaire, que le service sollicité est dans l’incapacité matérielle de traiter, ou les demandes portant sur des documents auxquels le demandeur a déjà eu accès. La commission fonde également son appréciation sur les éléments portés à sa connaissance par le demandeur et l'administration quant au contexte dans lequel s'inscrit la demande et aux motivations qui la sous-tendent.
Par sa décision du 14 novembre 2018 ministre de la culture c/ Société pour la protection des paysages et l’esthétique de la France n° 420055, 422500, le Conseil d’État a jugé que revêt également un caractère abusif, les demandes qui auraient pour effet de faire peser sur l’autorité saisie une charge disproportionnée au regard des moyens dont elle dispose. La commission précise, en outre, que lorsque les éléments d'information non communicables contenus dans un document dont la communication est sollicitée sont très nombreux et qu'il est possible de se procurer les éléments communicables autrement, la communication des documents après occultation des éléments non communicables peut être légalement refusée, au motif qu'elle ferait peser sur l'administration une charge excessive, eu égard aux moyens dont elle dispose et à l'intérêt que présenterait, pour les requérants, le fait de bénéficier, non de la seule connaissance des éléments communicables, mais de la communication des documents occultés eux-mêmes (CE, 27 mars 2020, Association contre l'extension et les nuisances de l'aéroport de Lyon-St-Exupéry, n° 426623). La commission rappelle, en outre, que le droit à la communication des documents administratifs est un droit objectif. L'intérêt d'une communication pour le demandeur ou ses motivations ne peuvent donc, en principe, pas fonder un refus de communication. Elle relève, toutefois, que, dans un avis n° 20220207 du 10 mars 2022, elle a fait évoluer sa doctrine en retenant désormais que, dans le cas particulier où l’autorité saisie fait valoir que la communication des documents sollicités ferait peser sur elle une charge de travail disproportionnée au regard des moyens dont elle dispose, il y a lieu de prendre en compte, pour apprécier le caractère abusif de la demande, non plus seulement le fait que la communication a objectivement perdu son intérêt, mais également l’intérêt qui s’attache à la communication pour le demandeur, ainsi que, le cas échéant, pour le public. Cette position a été confirmée par le Conseil d’État (CE, 17 mars 2022, n° 449620).
En l'espèce, la commission observe que le demandeur présente depuis plusieurs années, de manière récurrente, des demandes de communication de documents à la mairie de Lunel. Elle relève qu'environ 25 demandes ont été recensées par la mairie sur la seule année 2022. La commission constate, par ailleurs, qu'elle a déjà invité Monsieur X, à deux reprises, à faire preuve de discernement et de modération dans l'usage qui est fait du droit d'accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l’administration, en lui rappelant que l’administration n’est pas tenue de donner suite aux demandes présentant un caractère abusif. Elle observe également que le demandeur ne fait état d'aucun intérêt particulier qui s'attacherait à la communication des documents sollicités. Elle souligne, enfin, d'une part, que la présente demande s'apparente en partie à une demande de renseignements (points 3, 18 et 19) à laquelle la commune de Lunel n'est pas tenue de répondre sur le fondement du code des relations entre le public et l'administration et, d'autre part, que le maire lui a précisé que certains documents ne relèvent pas de ses attributions, ce dont la commission déduit qu'il ne les détient pas.
Compte tenu des éléments d'information portés à sa connaissance, la commission estime que la présente demande excède les sujétions que le législateur a entendu faire peser sur la commune de Lunel et révèle de la part du demandeur une volonté de perturber le fonctionnement des services de l'administration saisie. Elle émet, par suite, un avis défavorable.