Avis 20227708 Séance du 26/01/2023
Maître X, conseil de la société X, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 9 décembre 2022, à la suite du refus opposé par le président de l'Union des Groupements d'Achats Publics (UGAP) à sa demande de communication des documents suivants concernant les lots X et X des accords-cadres n° X du 18 août 2014 « Equipements de laboratoire, de produits associés et exécution de prestations annexes » :
1) les révisions de prix transmis par les titulaires entre 2018 et 2021 au titre de l’application de l’article 6.2 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) applicable aux marchés subséquents conclus selon les modalités de l’article 9-1 du code des marchés publics ;
2) les éventuelles modifications portant sur un élément constitutif des équipements et/ou des produits et/ou des prestations, demandées par les titulaires au titre de l’article 8.1du CCAP ;
3) le programme prévisionnel de commandes tel que prévu à l’article 9.2 du CCAP, permettant à l’Union des groupements d'achats publics (UGAP) en collaboration avec le bénéficiaire d’établir, à l’intention du titulaire, un programme de commandes, détaillant le calendrier prévisible de commandes récurrentes de produits associés ;
4) la liste des prestations annexes liées à l’exécution des accords-cadres et/ou à la fourniture et à la mise à disposition des automates auprès des bénéficiaires, prévues à l’article 11-2-3 du CCAP, et qui auraient fait l’objet de facturations distinctes.
En réponse à la demande qui lui a été adressée, le président de l'Union des Groupements d'Achats Publics (UGAP) a informé la commission que les documents mentionnés aux points 1) à 3) de la demande, couverts par le secret des affaires, ne sont pas communicables en application de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration. Il s'oppose par ailleurs à la communication de la liste de prestations mentionnée au point 4) compte tenu de son imprécision. Il fait valoir, enfin, que la demande est abusive.
La commission rappelle qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s’y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. En conséquence, la communication à un candidat écarté des motifs ayant conduit à ne pas lui attribuer le marché ne permet pas de refuser la communication de ces documents.
Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Il résulte en effet de la décision du Conseil d’État du 30 mars 2016, « Centre hospitalier de Perpignan » (n° 375529), que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication.
Le Conseil d’État a en outre précisé qu’au regard des règles de la commande publique, doivent être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l’ensemble des pièces d’un marché public et que, dans cette mesure, l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire, notamment, sont en principe communicables. Sont également communicables les pièces constitutives du dossier de consultation des entreprises (règlement de consultation, cahier des clauses administratives particulières, cahier des clauses techniques particulières…).
En revanche, les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité concurrentiel et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret des affaires ne sont, en principe, pas communicables. Il en va ainsi de l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ainsi que du mémoire technique, qui ne sont, de fait, pas communicables aux tiers. Revenant sur sa doctrine antérieure, la commission a également précisé dans son Conseil n° 20221455 du 21 avril 2022, qu’il en va aussi désormais ainsi des factures, bons de commande, états d’acompte, décomptes et autres pièces établies dans le cadre de l’exécution d’un marché public, qui ne sont communicables qu'après occultation des prix unitaires ou de la décomposition du prix forfaitaire, susceptibles, en soi, de refléter la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité déterminé.
En outre, pour l’entreprise attributaire comme pour l’entreprise non retenue, les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration doivent entraîner l’occultation des éléments suivants :
- les mentions relatives aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics ;
- dans les documents préparatoires à la passation du marché (procès-verbaux, rapports d'analyse des offres) les mentions relatives aux détails techniques et financiers des offres de toutes les entreprises.
En l’espèce, la commission relève que la demande porte sur des documents relatifs à l’exécution d’un accord-cadre à marchés subséquents.
En application de ces principes, la commission estime, en premier lieu, que les documents sollicités aux points 1) et 2), en ce qu’ils révèlent le détail financier et technique des offres des titulaires, sont couverts par le secret des affaires. Elle émet donc un avis défavorable sur ces points.
La commission estime, en second lieu que le programme prévisionnel de commandes, détaillant le calendrier prévisible de commandes récurrentes de produits associés, est un document administratif communicable à toute personne en faisant la demande, sous réserve de l’occultation des éventuelles mentions protégées par le secret des affaires. A ce titre, la commission rappelle, comme elle a pu l’indiquer dans un avis n° 20227533 du 12 janvier 2023, que la liste des acheteurs ayant eu recours aux services de l'UGAP, centrale d'achats au sens de l'article L2113-2 du code de la commande publique, n'est pas couverte par ce secret.
Elle émet donc un avis favorable au point 3) de la demande, sous la réserve tenant au secret des affaires.
En troisième lieu, bien que le président de l’UGAP fasse valoir que le CCAP ne contienne aucun article 11.2.3, la commission estime que la demande formulée au point 4) est suffisamment précise pour permettre d’identifier les documents sollicités.
Elle émet donc un avis favorable à la communication de ces documents, s’ils existent, sous réserve de l’occultation des éventuelles mentions protégées par le secret des affaires.
Enfin, en l’état des informations portées à sa connaissance, il n’apparaît pas à la commission que la présente demande revête un caractère abusif.