Avis 20227379 Séance du 12/01/2023

Maître X, conseil de Madame X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 30 novembre 2022, à la suite du refus opposé par le directeur du centre Hospitalier Lannion-Trestel à sa demande de communication, par voie dématérialisée, d'une copie des documents suivants : 1) les procès-verbaux ou avis des commissions pour l’emploi qui se sont tenues entre janvier 2022 et octobre 2022 et dans lesquelles la situation de Madame X était inscrite à l’ordre du jour ; 2) la liste des postes d’animateur du centre hospitalier Pierre Le Damany, avec indication des postes sur lesquels un agent contractuel est nommé, ainsi que la date du terme de son contrat ; 3) la communication du dernier contrat d’animateur recruté sur le poste d’animateur de l’EHPAD MIN RAN ou la décision de nomination d’un titulaire sur ce poste. En l'absence de réponse du directeur du centre hospitalier Lannion-Trestel à la date de sa séance, la Commission rappelle que la vie privée des fonctionnaires et agents publics doit bénéficier de la même protection que celle des autres citoyens. Elle admet toutefois que les fonctions et le statut de ces personnels justifient que certaines informations les concernant puissent être communiquées. Il en est ainsi, notamment, des contrats de travail, des arrêtés de nomination, de la qualité d'agent public, de l'adresse administrative et, s'agissant de la rémunération, des composantes fixes de celle-ci : grade et échelon, indice de traitement, nouvelle bonification indiciaire (NBI), indemnités de sujétion. La Commission estime cependant que, si les administrés doivent pouvoir accéder à certains renseignements concernant la qualité de leur interlocuteur, la protection, par l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration, de la vie privée impose que ces aménagements soient limités à ce qui est strictement nécessaire à leur information légitime. Ainsi, s'agissant des éléments de rémunération, la Commission est défavorable à la communication des informations liées, soit à la situation familiale et personnelle (date de naissance, adresse privée, situation de famille, horaires de travail, dates de congé), soit à l'appréciation ou au jugement de valeur porté sur la manière de servir de l'agent (primes pour travaux supplémentaires, primes de rendement), ou encore de celles relatives aux horaires de travail, aux indemnités et heures supplémentaires. Il en va de même, pour le cas où la rémunération comporterait une part variable, du montant total des primes versées ou du montant total de la rémunération, dès lors que ces données, combinées avec les composantes fixes, communicables, de cette rémunération, permettraient de déduire le sens de l'appréciation ou du jugement de valeur porté sur l'agent. La Commission précise en outre qu'elle a fait évoluer sa position, ancienne (conseils n° 20101148 du 29 mars 2010 et n° 20104024 du 14 octobre 2010), en ce qui concerne le temps de travail des agents publics et fonctionnaires et considère désormais qu'en tant qu'il se rapporte à l’exercice des fonctions publiques de l’agent, le temps de travail réglementaire, c’est-à-dire celui que l’agent doit théoriquement effectuer pour s’acquitter de ses obligations indépendamment des heures effectivement réalisées, de même que la quotité de travail, ne relèvent pas par eux-mêmes de la vie privée des agents concernés. Il en est de même du point de savoir si l’agent occupe un emploi à temps complet ou incomplet et la quotité correspondante, qui constituent des caractéristiques objectives du poste, et de la situation de temps partiel, alors même qu’elle procéderait d’un choix de la part de l’agent, dès lors que cette seule information ne révèle par elle-même aucune information mettant en cause la protection de la vie privée due à l’agent eu égard à la diversité des motifs autorisant cette situation. Seuls les horaires de travail des agents publics et le motif invoqué par l’agent à l’appui d'une demande de temps partiel demeurent ainsi protégés par la protection de sa vie privée. La Commission souligne également que le Conseil d’État (CE, 24 avril 2013 n° 343024 et CE, 26 mai 2014 n° 342339) a précisé que lorsque la rémunération qui figure dans le contrat de travail ou le bulletin de salaire d'un agent public résulte de l'application des règles régissant l'emploi concerné, sa communication à un tiers n'est pas susceptible de révéler sur la personne recrutée une appréciation ou un jugement de valeur, au sens des dispositions de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration, mais qu'en revanche, lorsqu'elle est arrêtée d'un commun accord entre les parties sans référence à des règles la déterminant, la rémunération révèle nécessairement une telle appréciation ou un tel jugement de valeur. Dans ce cas, le contrat de travail peut être communiqué après occultation des éléments relatifs à la rémunération, tandis que la communication du bulletin de salaire, qui serait privée de toute portée sans la rémunération, ne peut être opérée. Enfin, s'agissant des mentions supplémentaires présentes sur le bulletin de paye des agents publics depuis l'entrée en vigueur du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu, la Commission considère que la mention du taux d'imposition doit faire l'objet d'une occultation en application du 1° de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. Il en va de même pour les mentions, qui ne sont que la conséquence arithmétique de l'application de ce taux, du montant qui aurait été versé au salarié en l'absence de retenue à la source, du montant de l'impôt prélevé et du montant net à payer. La Commission émet donc un avis favorable aux points 2) et 3) de la demande, si les documents visés existent, en application des dispositions de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve de l'occultation des mentions relevant du secret de la vie privée ou révélant une appréciation ou un jugement de valeur sur l'agent. La Commission estime, en outre, que le document mentionné au point 1) est communicable sur le fondement de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration, pour les seuls extraits qui intéressent la situation de Madame X.