Avis 20227334 Séance du 12/01/2023
Madame X, X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 28 novembre 2022, à la suite du refus opposé par le directeur général des finances publiques à sa demande de consultation, dans les locaux de l'administration, des documents nominatifs et originaux suivants :
1) les documents relatifs à l'avis de situation au répertoire Sirene (AVISIR), depuis le 20 avril 2008, émanant de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) et transmis par celle‐ci à la direction départementale des finances publiques (DDFIP) de Haute-Savoie, contenant des éléments nominatifs de la société X quant à son adresse et la nature de son établissement ;
2) l'historique des modifications apportées depuis le 1er janvier 2019, dans le compte GESPRO de la société X ;
3) les traitements opérés, le 29 octobre 2019, par le service des impôts des entreprises (SIE) de Bonneville, suite à la réception d’un AVISIR de l’INSEE portant sur la création d’un établissement secondaire à X à une adresse fictive ;
4) l’historique des modifications apportées depuis le 1er janvier 2019 sur le compte internet impots.gouv.fr personnel de la société X.
Après avoir pris connaissance de la réponse du directeur général des finances publiques, la commission relève, en premier lieu, que le décret n° 73-314 du 14 mars 1973, désormais codifié aux articles R123-220 du code de commerce, a confié à l'Institut national de la statistique et des études économiques pour la métropole et la France d'outre-mer (INSEE), qui est une direction du ministère de l’économie et des finances, la mission de constituer un système national d’identification des entreprises et de leurs établissements, devenu le répertoire SIRENE et de le tenir à jour. Ce répertoire recense « les personnes physiques exerçant de manière indépendante une profession non salariée, des personnes morales de droit public ou de droit privé, des institutions et services de l’État et des collectivités territoriales, ainsi que de leurs établissements, lorsqu'ils relèvent du registre du commerce et des sociétés, du répertoire des métiers ou qu'ils emploient du personnel salarié, sont soumis à des obligations fiscales ou bénéficient de transferts financiers publics ». L'INSEE diffuse les données de la base SIRENE aux institutions et personnes privées dans les conditions prévues à l’article R123-232 du code de commerce.
La commission rappelle, ainsi qu'elle l'a indiqué dans son conseil n° 20070934 relatif au répertoire SIRENE de l'Institut national des études statistiques et économiques (INSEE), que les données de ce type de fichier, élaborées et détenues par une administration pour l’exercice d’une mission de service public, sont des documents administratifs au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration.
Elle estime que les documents demandés sont communicables à l'intéressée, en application de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve de l'occultation ou la disjonction des mentions éventuelles portant une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable ou faisant apparaître le comportement d'une personne, dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice. Elle émet donc, sous ces réserves, un avis favorable à la communication des documents mentionnés au point 1), et prend note de l’intention du directeur général des finances publiques d’y procéder.
En deuxième lieu, pour ce qui concerne les documents mentionnés aux points 2) à 4), la commission rappelle que le livre III du code des relations entre le public et l'administration ne fait pas obligation aux autorités administratives de répondre aux demandes de renseignements qui leur sont adressées, ni d'élaborer un document nouveau en vue de procurer les renseignements ou l'information souhaités (CE, 30 janvier 1995, Ministre d'État, Ministre de l’éducation nationale, n° 128797 ; CE, 22 mai 1995, Association de défense des animaux victimes d'ignominie ou de désaffection, n° 152393).
En revanche, la commission considère de manière constante que sont des documents administratifs existants au sens de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l’administration, ceux qui sont susceptibles d’être obtenus par un traitement automatisé d’usage courant. Il résulte en effet de la décision du Conseil d’État du 13 novembre 2020, n° 432832, publié aux Tables, que constituent des documents administratifs au sens de ces dispositions les documents qui peuvent être établis par extraction des bases de données dont l’administration dispose, si cela ne fait pas peser sur elle une charge de travail déraisonnable, laquelle doit être interprétée de façon objective.
La commission précise, à ce titre, que les informations demandées doivent pouvoir être obtenues par un traitement automatisé de données, sans retraitements successifs, en particulier par des interventions manuelles. Elle estime également que, lorsque les informations sollicitées doivent, pour être extraites d'un fichier informatique, faire l'objet de requêtes informatiques complexes ou d'une succession de requêtes particulières qui diffèrent de l'usage courant pour lequel le fichier informatique dans lequel elles sont contenues a été créé, l'ensemble des informations sollicitées ne peut alors être regardé comme constituant un document administratif existant (avis n° 20222817, 20222850 et 20222936 du 23 juin 2022). Une demande portant sur la communication d'un tel ensemble d'informations doit dès lors être regardée comme tendant à la constitution d'un nouveau document (Conseil n° 20133264 du 10 octobre 2013) et, par suite, être déclarée irrecevable.
En l’espèce, la commission prend note de la réponse du directeur général des finances publiques selon laquelle la demande en tant qu’elle porte sur les documents mentionnés aux points 2) à 4) viserait à l'obtention de renseignements qui ne seraient retracés par aucun document existant. En application des principes rappelés ci-dessus et dans la mesure où la demande porte sur les interventions qui auraient été effectuées par les services fiscaux sur des comptes informatiques, la commission émet toutefois un avis favorable à la communication des documents sollicités, sous réserve qu’ils soient susceptibles d’être obtenus par un traitement automatisé d’usage courant.