Avis 20226920 Séance du 15/12/2022
Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 14 octobre 2022, à la suite du refus opposé par le préfet de l'Isère à sa demande de communication, sous forme électronique et par courriel pour les documents existant sous cette forme, sinon en copie papier, des éléments suivants relatifs à la protection réglementaire de l’approvisionnement en eau potable de l’agglomération grenobloise :
1) la carte des périmètres de protection telle qu’officiellement annexée à l’arrêté déclarant d’utilité publique les captages de l’eau potable dans la plaine de Reymure ;
2) la liste complète des installations ayant une incidence sur l’environnement sur les territoires des communes de : Jarrie, Champ-sur-Drac, Champagnier, Varces-Allières-et-Risset, Vif, Saint-Georges-de-Commiers, Notre-Dame-de-Commiers ;
3) les arrêtés d’autorisations pour les installations X sur le site de la plateforme de Jarrie, comportant les prescriptions particulières dont les autorisations de stockage, les points de rejets et les autorisations de rejets de ces installations, depuis 2007, à commencer par ceux en vigueur ;
4) les arrêtés d’autorisation comportant les prescriptions particulières dont les autorisations de stockage, les points de rejets et les autorisations de rejets de ces installations, règlementant les installations de X, depuis 2007, à commencer par ceux en vigueur ;
5) la localisation des émissaires de rejets 2A, 3A, 4A, 5A, dans le canal de la Romanche et dans le canal usinier, qui ne sont pas indiquées dans les arrêtés préfectoraux complémentaires publiés sur le site de la préfecture, ainsi que d’autres points éventuels de rejets d’effluents liquides des installations situées sur le site de la plateforme de Jarrie ;
6) les études d’impact sur les ressources en eau de la plaine de Reymure, des rejets gazeux des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) en particulier de la plateforme chimique de Jarrie ;
7) les avis de l’agence régionale de santé (ARS) sur les projets d’arrêtés d’autorisations préfectorales des ICPE du site de Jarrie, depuis 2015 ;
8) les échanges entre l’agence de l’eau, le préfet, l’ARS, concernant l’impact des rejets de la plateforme chimique de Jarrie sur les captages d’eau potable de Grenoble-Alpes-métropole (GAM), depuis 2015 ;
9) les résultats des analyses des rejets d’effluents liquides de la plateforme chimique de Jarrie dans la Romanche, dans le canal de la Romanche et dans le canal usinier, pour les années 2017, 2018, 2019, 2020, 2021, 2022, ainsi que les rapports de contrôle des autorités de l’État sur ces données lorsqu’il s’agit d’autocontrôles ;
10) les rapports de l’exploitant et des autorités de l’État sur les déversements incidentels ou accidentels dans la Romanche et les canaux susvisés (comme ceux d’avril 2006, février 2011, etc.) ;
11) les arrêtés autorisant des rejets « dans le Drac à l’aval du barrage de Notre-Dame-de- Commiers » pour les ICPE et autres, ainsi que des résultats de ces rejets de 2020 à 2022 ;
12) les sanctions administratives concernant ces atteintes à l’environnement et à la santé publique (par les ICPE déversant dans la Romanche en aval de Vizille et dans le Drac en aval du barrage de Notre-Dame de Commiers) et les actions engagées par le procureur de la République suite aux signalements ou plaintes des services de l’État.
En l’absence de réponse du préfet de l'Isère à la date de sa séance, la commission rappelle que l'article L124-2 du code de l'environnement qualifie d'informations relatives à l'environnement toutes les informations disponibles, quel qu'en soit le support, qui ont notamment pour objet : « 1º L'état des éléments de l'environnement, notamment l'air, l'atmosphère, l'eau, le sol, les terres, les paysages, les sites naturels, les zones côtières ou marines et la diversité biologique, ainsi que les interactions entre ces éléments ; 2º Les décisions, les activités et les facteurs, notamment les substances, l'énergie, le bruit, les rayonnements, les déchets, les émissions, les déversements et autres rejets, susceptibles d'avoir des incidences sur l'état des éléments visés au 1º ; 3º L'état de la santé humaine, la sécurité et les conditions de vie des personnes, les constructions et le patrimoine culturel, dans la mesure où ils sont ou peuvent être altérés par des éléments de l'environnement, des décisions, des activités ou des facteurs mentionnés ci-dessus (….) ».
Selon les articles L124-1 et L124-3 du même code, le droit de toute personne d'accéder à des informations lorsqu'elles sont détenues, reçues ou établies par les autorités publiques ou pour leur compte, s'exerce dans les conditions définies par le titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve des dispositions du chapitre IV du titre II du livre I du code de l'environnement. A cet égard, les articles L124-4 et L124-5 précisent les cas dans lesquels l'autorité administrative peut rejeter une demande d'information relative à l'environnement, au nombre desquelles ne figure pas le caractère préparatoire du document ou des informations. Il appartient en particulier à l'autorité administrative d'apprécier l'intérêt d'une communication et elle n'est fondée à rejeter une demande d'information relative à l'environnement que si elle porte atteinte : 1° Aux intérêts mentionnés aux articles L311-5 à L311-8 du code des relations entre le public et l'administration, à l'exception de ceux visés au e et au h du 2° de l'article L. 311-5 ; 2° A la protection de l'environnement auquel elle se rapporte ; (...) ».
La commission souligne également qu'en vertu des dispositions du II de l'article L124-5 du code de l’environnement, l'autorité publique ne peut rejeter une demande portant sur une information relative à des « émissions de substances dans l'environnement » que dans le cas où sa communication porterait atteinte à la conduite de la politique extérieure de la France, à la sécurité publique ou à la défense nationale, ou encore au déroulement des procédures juridictionnelles, à la recherche d'infractions pouvant donner lieu à des sanctions pénales ou enfin à des droits de propriété intellectuelle. Ces dispositions font, en revanche, obstacle à ce que l'autorité administrative en refuse la communication au motif qu'elles comporteraient des mentions couvertes par le secret des affaires ou le secret de la vie privée.
La commission précise, enfin, que si les procès-verbaux d'infraction pouvant donner lieu à des sanctions pénales revêtent un caractère judiciaire et sont exclus du champ d'application du livre III du code des relations entre le public et l’administration auquel renvoie le code de l'environnement, les documents relatifs aux contrôles et sanctions administratives sont des documents administratifs communicables à toute personne qui en fait la demande sans que puisse être opposé, s'agissant d'informations environnementales, la protection de la divulgation d'un comportement susceptible de nuire à la personne morale qui en est l'auteur.
En l'espèce, la commission estime que les documents sollicités, dont elle n’a pas pu prendre connaissance, constituent des documents administratifs qui comportent des informations relatives à l’environnement ainsi que, le cas échéant, des informations relatives à des émissions de substances dans l'environnement. En application de ces principes, elle considère que ceux-ci sont communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration et des articles L124-1 et suivants du code de l'environnement, sous les réserves et dans les conditions rappelées ci-dessus, selon la catégorie à laquelle l'information environnementale se rattache.
S'agissant des actions engagées par le procureur de la République suite aux signalements ou plaintes des services de l’État mentionnées au point 12), la commission observe que ces documents semblent revêtir un caractère juridictionnel. Par suite, elle se déclare incompétente pour se prononcer sur ce point.