Avis 20226613 Séance du 24/11/2022
Maître X, conseil de la société X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 24 octobre 2022, à la suite du refus opposé par le maire de Saint-Maximin à sa demande de copie des documents suivants :
1) le contrat signé avec la société « X » concernant la fourniture et l'exploitation des mobiliers d'affichage grand format sur le territoire de la commune ;
2) le courrier par lequel le maire de la commune a mis en demeure la société « X » de déposer tous ses mobiliers d'affichage grand format à l'échéance du contrat et le montant des pénalités afférentes ;
3) les titres de recettes notifiés à la société « X » pour le recouvrement de la redevance annuelle d'occupation du domaine public au titre des années 2020, 2021 et 2022, concernant l'exploitation des mobiliers d'affichage grand format actuellement implantés sur le territoire de la commune ;
4) le décompte des pénalités applicables à la société « X » concernant la fourniture et l'exploitation des mobiliers d'affichage grand format depuis son échéance.
La Commission comprend des éléments portés à sa connaissance que les titres de recettes visés au point 3) ont été transmis à Maître X, par courrier du 4 novembre 2022 figurant au dossier, et que le document visé au point 4) de la demande est inexistant. Elle ne peut, par suite, que déclarer sans objet la demande sur ces points.
La Commission comprend également que le contrat visé au point 1) a été communiqué à Maître X après occultation des éléments couverts par le secret des affaires. Elle constate toutefois qu'elle n'est pas en mesure d'apprécier la nature et l'ampleur des occultations opérées, et que Maître X n'estime pas sa demande satisfaite. Elle en déduit que la demande conserve son objet sur ce point.
En l’absence de réponse exprimée par le maire de Saint-Maximin, la Commission rappelle qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s’y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. En conséquence, la communication à un candidat écarté des motifs ayant conduit à ne pas lui attribuer le marché ne permet pas de refuser la communication de ces documents.
Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Il résulte en effet de la décision du Conseil d’État du 30 mars 2016, "Centre hospitalier de Perpignan" (n° 375529), que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication.
Le Conseil d’État a en outre précisé qu’au regard des règles de la commande publique, doivent être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l’ensemble des pièces d’un marché public et que, dans cette mesure, l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire, notamment, sont en principe communicables. Sont également communicables les pièces constitutives du dossier de consultation des entreprises (règlement de consultation, cahier des clauses administratives particulières, cahier des clauses techniques particulières…).
En revanche, les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité concurrentiel et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret des affaires ne sont, en principe, pas communicables. Il en va ainsi de l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ainsi que du mémoire technique, qui ne sont, de fait, pas communicables aux tiers. Revenant sur sa doctrine antérieure, la Commission a également précisé dans son Conseil n° 20221455 du 21 avril 2022, qu’il en va aussi désormais ainsi des factures, bons de commande, états d’acompte, décomptes et autres pièces établies dans le cadre de l’exécution d’un marché public, qui ne sont communicables qu'après occultation des prix unitaires ou de la décomposition du prix forfaitaire, susceptibles, en soi, de refléter la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité déterminé.
La Commission souligne, dans l'hypothèse où l'exploitation du réseau de mobilier urbain ne relèverait pas d'un marché public, qu'une autorisation temporaire ou une convention d'occupation du domaine public revêt le caractère d'un document administratif au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration, communicable à toute personne qui le demande en vertu de l'article L311-1 de ce code ou de l'article L2121-26 du code général des collectivités territoriales, si elle est approuvée par un arrêté ou par une délibération du conseil municipal, et sous réserve de l'occultation préalable, le cas échéant, des mentions intéressant la vie privée ou le secret des affaires.
La Commission émet donc, sous réserve de l'occultation ou de la disjonction des mentions intéressant le secret des affaires, un avis favorable au point 1) de la demande.
La Commission constate enfin, s'agissant du point 2) de la demande, que le maire de Saint-Maximin a opposé au demandeur le caractère préparatoire d'un tel document. Elle estime que si une mise en demeure, telle que celle d'espèce, peut aboutir en cas de non respect au prononcé de pénalités, elle ne revêt pas pour autant un caractère préparatoire au sens de l'article L311-2 du code des relations entre le public et l'administration.
La Commission relève, en revanche, que l'article L311-6 fait obstacle, en son 3°, à ce que soit communiqué à un tiers un document qui révélerait un comportement susceptible de nuire à son auteur, que ce dernier soit une personne physique ou une personne morale (avis n° 20132830 du 24 octobre 2013 et CE, n° 392711, du 21 octobre 2016, Union départementale CGT d'Ille-et-Vilaine). En application de ce 3°, les documents mettant en demeure le cocontractant d'une personne publique de respecter ses obligations contractuelles ou lui infligeant une pénalité ne sont donc pas communicables à un tiers.
Elle émet donc un avis défavorable sur ce point.