Avis 20226032 Séance du 03/11/2022

Maître X, conseil des X, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 29 septembre 2022, à la suite du refus opposé par le préfet de la Martinique à sa demande de communication, à la suite de la décision du préfet d'augmenter les tarifs de vente du kérosène distribué par X dans les Antilles françaises et en Guyane, intervenue dans le prolongement de deux réunions d'information tenues en préfecture les 30 et 31 mai 2022, des documents suivants : 1) les documents préparatoires ayant servi à l'élaboration de sa décision précitée, incluant, notamment, les études, avis, rapports et notes produits ou reçus préalablement à la naissance de cette décision et ayant été pris en compte, même indirectement, dans le cadre de son élaboration ainsi que le « Bleu » de Matignon rendant compte de l'arbitrage opéré par le Gouvernement au sujet de la hausse du prix du kérosène ainsi intervenue ; 2) les comptes rendus ou procès-verbaux des réunions s'étant tenues les 30 et 31 mai 2022 en préfecture en présence des compagnies aériennes ; 3) Tous autres comptes rendus ou procès-verbaux de réunions qui se seraient tenues hors la présence des compagnies aériennes et dont l'objet serait en lien avec la décision précitée; 4) tout autre document non listé ci-dessus ayant concouru ou ayant trait à cette décision. En l'absence de réponse du préfet de la Martinique à la date de sa séance, la commission rappelle, en premier lieu, qu’en application des dispositions du a) du 2° de l'article L311-5 du code des relations entre le public et l'administration et du a) du 1° du I de l’article L213-2 du code du patrimoine, les documents dont la divulgation porterait atteinte au secret des délibérations du Gouvernement et des autorités responsables relevant du pouvoir exécutif ne sont pas communicables avant l’expiration d’un délai de vingt-cinq ans à compter de leur élaboration ou de la date du document le plus récent figurant dans le même dossier. Relèvent par exemple de cette catégorie, les comptes rendus du conseil des ministres, des conseils ou comités interministériels et des réunions interministérielles (CE, 10 mai 1996, n° 163607) ainsi que les documents élaborés aux fins de définir la politique du Gouvernement (CE, 2 décembre 1987, n° 74637 et CE, 12 octobre 1992, n° 106817, Association SOS Défense). N’entrent en revanche pas dans ce champ, les documents, élaborés par une entité administrative agissant dans le cadre de ses missions, qui ne s’inscrivent pas dans le processus décisionnel du Gouvernement et ne procèdent pas d’une initiative politique de sa part. La commission estime que le Bleu de Matignon mentionné au point 1) de la demande entre dans le champ du a) du 2° de l’article L311-5 du code des relations entre le public et l’administration. Elle émet, par suite, un avis défavorable sur ce point. S'agissant du surplus, la commission rappelle qu'aux termes de l'article R671-1 du code de l'énergie, « Dans le département de la Guadeloupe et dans les collectivités territoriales de la Guyane et de la Martinique, le préfet fixe les prix maximums des produits pétroliers dans les conditions prévues par la présente section ». Elle constate, toutefois, que le kérosène ne fait pas partie de la liste des produits concernés, figurant à l'article R671-2 de ce code. Elle en déduit que le préfet de la Martinique n'est pas compétent pour décider d'augmenter les tarifs de vente du kérosène distribué par X dans les Antilles françaises et en Guyane. La commission relève, toutefois, que les documents produits ou reçus par une autorité administrative dans le cadre des missions de service public exercées et des compétences détenues à ce titre, constituent des documents administratifs au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration, sans qu'y fasse obstacle la circonstance qu'elle n'en soit pas l'auteur. En l'espèce, la commission estime que les documents mentionnés aux points 1) et 4) de la demande, s'ils existent et s'ils ont été adressés au préfet de la Martinique dans le cadre de sa mission de service public, revêtent un caractère administratif au sens de ces dispositions. Sous cette réserve, la commission considère que ces documents sont librement communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, après occultation des mentions couvertes par l'un des secrets prévus aux articles L311-5 et L311-6 du même code, et à condition que l'ampleur de ces occultations ne privent pas d'intérêt la communication. La commission considère, enfin, que les documents mentionnés aux points 2) et 3) de la demande, à condition qu'ils existent, qu'ils soient achevés et qu'ils ne revêtent pas ou plus un caractère préparatoire, sont également communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve de l'occultation des mentions couvertes par l'un des secrets prévus aux articles L311-5 et L311-6 du même code. Elle émet donc, sous ces réserves, un avis favorable à la demande.