Avis 20225800 Séance du 24/11/2022
Monsieur X, pour le syndicat de la magistrature, a saisi la Commission d’accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 14 septembre 2022, à la suite du refus opposé par le ministre de la justice à sa demande de communication d'une copie du rapport de l'inspection générale de la justice à la suite du décès de Madame X, X
La Commission, qui a pris connaissance des observations du ministère de la justice, rappelle que l'inspection générale de la justice a notamment reçu pour mission, en application de la loi organique n° 2016-1090 du 8 août 2016 relative aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrats ainsi qu'au Conseil supérieur de la magistrature et du décret n° 2016-1675 du 5 décembre 2016 portant création de l'inspection générale de la justice, d'exercer une mission permanente d'inspection, de contrôle, d'étude, de conseil et d'évaluation sur l'ensemble des organismes, des directions, établissements et services du ministère de la justice et des juridictions de l'ordre judiciaire et d'éclairer le garde des sceaux sur les mesures éventuelles à prendre à cet égard.
Les rapports qu’elle établit à cet effet, s’ils ne s’inscrivent pas dans le cadre de l’engagement d’une procédure pénale, ne se rattachent pas directement à la fonction de juger. Ils présentent, par suite, le caractère de documents administratifs au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration.
La Commission précise que la circonstance que le décret du 5 décembre 2016 prévoit que l'inspection générale communique au secrétaire général du ministère de la justice et aux directeurs de l'administration centrale ses rapports ou les éléments de ses rapports qui relèvent de leur compétence (article 4), et que le garde des sceaux décide des modalités de leur diffusion (article 18), n'est pas de nature à faire obstacle à l'exercice du droit d'accès aux documents administratifs consacré par le livre III du code des relations entre le public et l'administration.
La Commission rappelle, ensuite, qu’un rapport d’inspection réalisé par ou à la demande de l'autorité responsable du service public est un document communicable à toute personne qui en fait la demande en vertu de l'article L311-1 de ce code, à la condition d’une part, qu’ils soient achevés, c'est-à-dire en l'espèce qu’ils aient été remis à leur commanditaire et, d’autre part, qu'ils soient dépourvus de caractère préparatoire.
La Commission précise, en outre, qu’en application de l'article L311-6 du code précité, ne sont toutefois communicables qu'à l'intéressé les éléments qui portent une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable, qui font apparaître un comportement d'une personne dont la divulgation pourrait lui porter préjudice, ou dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée ou au secret médical. La Commission considère, à cet égard, que les passages d'un rapport qui, sans mettre directement en cause une personne physique nommément désignée et sans révéler de manquements graves, analysent, même de façon critique, l'activité du service, sa gestion et sa situation financière, n'entrent pas dans le champ des mentions dont la divulgation serait contraire à l'article L311-6 et n’ont donc pas à être occultées.
La communication ne peut donc intervenir qu’après disjonction ou occultation des mentions qui porteraient atteinte à l’un de ces intérêts et sous la réserve qu’une telle disjonction ou occultation ne conduise pas à priver de son sens le document sollicité. Dans l'hypothèse où l'importance des occultations dénaturerait le sens d'un document ou priverait sa communication de tout intérêt, cette communication peut être refusée par l'autorité administrative auprès de laquelle le document a été sollicité en vertu de l'article L311-7 du même code.
En l'espèce, la Commission, qui a pris connaissance du sommaire du rapport demandé, qui lui a été adressé par le ministre de la justice, estime que seules les recommandations formulées par l'inspection générale de la justice sont librement communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration. Les autres parties du rapport comportent de trop nombreuses mentions couvertes par les dispositions de l'article L311-6 du même code et dont l'occultation priverait de tout intérêt la communication.
Elle émet, dans cette mesure, un avis favorable.