Avis 20225394 Séance du 13/10/2022

Monsieur X, pour X, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 6 septembre 2022, à la suite du refus opposé par le maire de Tremblay-en-France à sa demande de communication des documents suivants : 1) la liste des agents titulaires, contractuels, en contrat en durée indéterminée (CDI) et emplois fonctionnels qui ont bénéficié du complément indemnitaire annuel (CIA) au titre de la valeur professionnelle ainsi que les montant attribués pour chaque agent et « en fonction du respect du cadre emploi » ; 2) une copie des bulletins de salaire de décembre 2020 et 2021 des agents occupant les fonctions énumérés ci-après : a) directrice des ressources humaines ; b) directrice de ressources humaines adjointe ; c) directeur général des services ; d) directeur général adjoint des services ; e) directeur général des services techniques ; f) directeur de division et chef de service de toute la collectivité ; 3) le montant du complément indemnitaire annuel (CIA) qui leur a été attribué ; 4) la liste ou le tableau de l'ensemble des agents de la commune et du centre communal d'action sociale (CCAS) pour lesquels l'administration édite un bulletin de paie, par ordre alphabétique, indiquant pour chacun : a) le statut ; b) le grade ; c) la catégorie ; d) le métier ; e) le groupe de fonction ; f) le service/secteur ; g) le régime indemnitaire ; h) l'indemnité de fonctions, de sujétions et d’expertise (IFSE) attribuée ; i) le CIA versé ; j) la nouvelle bonification indiciaire (NBI) attribuée ; k) les montants des indemnités différentielles versées à chaque agent ; 5) la liste des effectifs (titulaire, contractuel, vacataire horaire, contrat à durée déterminée (CDD), CDI et mise à disposition) de la commune et du CCAS, ainsi que les agents mis à disposition des associations à laquelle la commune verse un salaire ou indemnités ; 6) la liste des demandeurs de formation indiquant les agents retenus ; 7) les motivations qui ont fondé les décisions de valider ou de refuser les demandes de formation. Après avoir pris connaissance des observations du maire de Tremblay-en-France, la commission rappelle, en premier lieu, que le régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel, créé par le décret n° 2014-513 précité et dont les modalités de mise en œuvre ont été précisées par une circulaire du 5 décembre 2014 de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique et du secrétaire d'État chargé du budget, est composé de deux primes distinctes : - l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE), d’une part, versée mensuellement aux agents ; - le complément indemnitaire annuel (CIA) lié à l'engagement professionnel et à la manière de servir, d’autre part, versé en un ou deux fois au cours d’une année. La commission souligne, à cet égard, que ce complément indemnitaire est une composante facultative du RIFSEEP qui permet de rémunérer la valeur professionnelle de l'agent, son investissement personnel, son sens du service public, sa capacité à travailler en équipe et sa contribution au travail collectif. Elle considère donc que son montant, en ce qu'il révèle l’appréciation ou le jugement de valeur porté sur la manière de servir, doit être occulté lors de la communication du bulletin de paie d'un agent public. La commission constate, par ailleurs, que le montant de l’IFSE est calculé en tenant compte de la nature des fonctions exercées par l'agent, ce qui la distingue donc d'une prime variable qui ne dépendrait que de l’appréciation de la valeur et de l'engagement professionnels de l'agent. Toutefois, elle souligne que le montant de cette indemnité intègre une part relative à l'expérience professionnelle acquise par l'agent, qui est susceptible de varier en fonction de l'élargissement des compétences professionnelles, de l'approfondissement des savoirs et de la consolidation des connaissances pratiques. Ainsi, comme le précise la circulaire du 5 décembre 2014, le réexamen périodique de l'IFSE n'implique pas une revalorisation automatique de celle-ci. La commission considère que les modalités de calcul de l’IFSE, en tant qu’elles intègrent cette appréciation sur l’évolution des compétences d’un agent public, sont susceptibles de révéler un jugement de valeur concernant cet agent. Elle estime donc que le montant de l’IFSE doit également être occulté lors de la communication du bulletin de paie d'un agent public. Par conséquent, la commission considère que le montant intégral du RIFSEEP n'est pas communicable, alors même que l'IFSE ne serait que partiellement fixée selon la nature des fonctions exercées par un agent public. Par suite, la commission ne peut que rendre un avis défavorable à la communication de la liste demandée au point 1). En deuxième lieu, la commission rappelle que la vie privée des fonctionnaires et agents publics doit bénéficier de la même protection que celle des autres citoyens. Elle admet toutefois que les fonctions et le statut de ces personnels justifient que certaines informations les concernant puissent être communiquées. Il en est ainsi, notamment, de la qualité d'agent public, de l'adresse administrative et, s'agissant de la rémunération, des composantes fixes de celle-ci : grade et échelon, indice de traitement, nouvelle bonification indiciaire (NBI), indemnités de sujétion. La commission estime cependant que, si les administrés doivent pouvoir accéder à certains renseignements concernant la qualité de leur interlocuteur, la protection, par l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration, de la vie privée impose que ces aménagements soient limités à ce qui est strictement nécessaire à leur information légitime. En application de ces principes, la commission estime que les bulletins de salaire sollicités aux points 2) et 3) sont communicables à toute personne qui en fait la demande sous réserve toutefois de l'occultation préalable, en application des articles L311-6 et L311-7 du code des relations entre le public et l’administration, des éléments y figurant qui seraient liés, soit à la situation familiale et personnelle de l'agent en cause (supplément familial), soit à l'appréciation ou au jugement de valeur porté sur sa manière de servir telle que le montant du RIFSEEP et plus généralement les primes pour travaux supplémentaires et primes de rendement. Il en est de même, dans le cas où la rémunération comporterait une part variable, du montant total des primes versées ou du montant total de la rémunération, dès lors que ces données, combinées avec les composantes fixes, communicables, de cette rémunération, permettraient de déduire le sens de l'appréciation ou du jugement de valeur porté sur l'agent. S'agissant des mentions supplémentaires présentes sur le bulletin de paye des agents publics depuis l'entrée en vigueur du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu, la commission estime ensuite que la mention du taux d'imposition, qui apparaît soit comme un taux personnalisé soit comme un taux « neutre », est susceptible, d'une part, de permettre la révélation d'informations liées à la situation personnelle et familiale de l'agent concerné, notamment par le biais de croisement de ces informations avec d'autres éléments disponibles. D'autre part, le taux d'imposition constitue une information propre à la situation fiscale de l'agent qui relève du champ d'application de l'article L103 du livre des procédures fiscales, dispositions particulières dérogeant au droit d'accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l'administration, et de la vie privée. En conséquence, la commission considère que la mention du taux doit faire l'objet d'une occultation en application du 1° de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. La commission considère qu'il en va de même pour les mentions, qui ne sont que la conséquence arithmétique de l'application de ce taux, du montant qui aurait été versé au salarié en l'absence de retenue à la source, du montant de l'impôt prélevé et du montant net à payer. Sous ces réserves, la commission émet donc un avis favorable à la communication des bulletins mentionnés au point 2). En revanche, elle émet s'agissant du point 3), un avis défavorable. En troisième lieu, compte tenu de ce qui précède, la commission estime que la liste mentionnée au point 4) est un document administratif communicable à toute personne qui en fait la demande en application de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, si elle existe en l'état ou est susceptible d'être obtenue par un traitement automatisé d'usage courant, sous réserve de l’occultation des mentions relatives à l’IFSE et au CIA versé. Elle émet donc, sous ces réserves, un avis favorable sur ce point. En quatrième lieu, la commission estime que la liste mentionnée au point 5) est un document administratif communicable à toute personne qui en fait la demande en application de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, si elle existe en l'état ou est susceptible d'être obtenue par un traitement automatisé d'usage courant. Elle émet donc, sous cette réserve, un avis favorable sur ce point. En cinquième lieu, la commission rappelle que la liste des agents suivant une formation est communicable à toute personne qui en fait la demande, sans qu'y fasse obstacle le secret de la vie privée protégé par le 1° de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration (CRPA), dès lors que tant les intervenants que le public de ces formations, ont la qualité d’agent public et que celles-ci sont organisées dans le cadre de leurs fonctions. La commission considère en revanche que la liste des formations faisant nommément apparaître l'agent à l'origine de la demande n'est communicable à des tiers, en vertu de ces dispositions, que dans la mesure où elle concerne les agents dont la demande a été satisfaite et que le secret de la vie privée fait en revanche obstacle à la communication, à des tiers, des demandes de formations pour lesquelles un agent n'aurait pas été retenu. La commission émet donc, sous cette réserve et sous réserve que cette liste existe en l'état ou soit susceptible d'être obtenue par un traitement automatisé d'usage courant, un avis favorable sur le point 6) de la demande. En sixième et dernier lieu, commission rappelle que le livre III du code des relations entre le public et l'administration garantit à toute personne un droit d’accès aux documents administratifs existants ou susceptibles d’être obtenus par un traitement automatisé d’usage courant, mais ne fait pas obligation aux autorités administratives de répondre aux demandes de renseignements qui leur sont adressées. Par suite, elle ne peut que se déclarer incompétente pour se prononcer sur le point 7) de la demande, qui porte en réalité sur des renseignements.