Avis 20225267 Séance du 13/10/2022
Monsieur X, pour l'association X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 30 août 2022, à la suite du refus opposé par le préfet de la Guyane à sa demande de copie, par courrier recommandé ou par courriel, des documents cités dans le rapport d’instruction du 9 décembre 2021 de la demande de remplacement du fioul par de la biomasse liquide présentée au CODERST du 15 décembre 2021, à savoir :
1) l’étude technico-économique prescrite par le chapitre 8.2 de l’arrêté d’autorisation environnementale du 22 octobre 2020 transmise par EDF-PEI le 16 septembre 2021 ;
2) les porters à connaissance transmis le 16 septembre 2021 et le 25 octobre 2021 sur le fonctionnement de la centrale et de l'oléoduc à la biomasse liquide ;
3) l’étude INERIS « Influence des caractéristiques des biocarburants sur le calcul des zones d’effet version du 19 mars 2021 ».
En l’absence de réponse du préfet de la Guyane à la date de sa séance, la commission rappelle que l'article L124-2 du code de l'environnement qualifie d'informations relatives à l'environnement toutes les informations disponibles, quel qu'en soit le support, qui ont notamment pour objet : « / 1° L'état des éléments de l'environnement, notamment l'air, l'atmosphère, l'eau, le sol, les terres, les paysages, les sites naturels, les zones côtières ou marines et la diversité biologique, ainsi que les interactions entre ces éléments ; / 2° Les décisions, les activités et les facteurs, notamment les substances, l'énergie, le bruit, les rayonnements, les déchets, les émissions, les déversements et autres rejets, susceptibles d'avoir des incidences sur l'état des éléments visés au 1° ; / 3° L'état de la santé humaine, la sécurité et les conditions de vie des personnes, les constructions et le patrimoine culturel, dans la mesure où ils sont ou peuvent être altérés par des éléments de l'environnement, des décisions, des activités ou des facteurs mentionnés ci-dessus ; / 4° Les analyses des coûts et avantages ainsi que les hypothèses économiques utilisées dans le cadre des décisions et activités visées au 2° ; / 5° Les rapports établis par les autorités publiques ou pour leur compte sur l'application des dispositions législatives et réglementaires relatives à l'environnement. »
Selon les articles L124-1 et L124-3 du code de l’environnement, le droit de toute personne d'accéder à des informations relatives à l’environnement lorsqu'elles sont détenues, reçues ou établies par les autorités publiques ou pour leur compte, s'exerce dans les conditions définies par le titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve des dispositions du chapitre IV du titre II du livre Ier du code de l'environnement. A cet égard, les articles L124-4 et L124-5 précisent les cas dans lesquels l'autorité administrative peut rejeter une demande d'information relative à l'environnement.
La commission souligne ensuite qu'en vertu des dispositions du II de l'article L124-5 du code, l'autorité publique ne peut rejeter une demande portant sur une information relative à des « émissions de substances dans l'environnement » que dans le cas où sa communication porterait atteinte à la conduite de la politique extérieure de la France, à la sécurité publique ou à la défense nationale, ou encore au déroulement des procédures juridictionnelles, à la recherche d'infractions pouvant donner lieu à des sanctions pénales ou enfin à des droits de propriété intellectuelle. Ces dispositions font, en revanche, obstacle à ce que l'autorité administrative en refuse la communication au motif qu'elles comporteraient des mentions couvertes par le secret des affaires ou le secret de la vie privée, porteraient une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable ou feraient apparaître le comportement d'une personne dans des conditions susceptibles de lui porter préjudice.
La commission rappelle enfin que le caractère préparatoire éventuel des documents sollicités ne saurait fonder le refus de communiquer les informations relatives à l'environnement qu'ils comportent, conformément aux articles L124-4 et L124-5 du code de l'environnement.
Au cas d'espèce, la commission constate que le porter à connaissance du 16 septembre 2021 est relatif au fonctionnement à la biomasse liquide de la future centrale thermique exploitée par EDF-PEI à Livarot. L'étude technico-économique jointe à cette demande porte sur la faisabilité de la conversion de la centrale, initialement prévue pour le fonctionnement au fioul domestique, au bioliquide. Le porter à connaissance du 25 octobre 2021 est, quant à lui, relatif au fonctionnement de la canalisation de la centrale du Larivot à la biomasse liquide. Il s'accompagne d'une étude des dangers réalisée par l'INERIS portant, notamment, sur l'impact sur l'environnement en cas d'épandage d'une nappe d'un tel produit.
La commission considère que ces documents comportent dans leur ensemble et de manière indissociable des informations relatives à des potentielles émissions de substances polluantes dans l'environnement, notamment dans l'atmosphère, l'eau, le sol et les terres.
Dès lors, la commission estime que ces documents sont, en principe, communicables à toute personne qui en fait la demande en application des articles L311-1 et L124-5 du code de l'environnement, sans que puisse être opposé le secret de la vie privée, le secret des affaires ou les réserves tenant à l'appréciation ou au jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable et à la révélation du comportement de personnes physiques ou morales. De même, ainsi qu'il a été rappelé, le caractère préparatoire de ce document ne saurait fonder un refus de communication, conformément aux articles L124-4 et L124-5 du code de l'environnement.
La commission rappelle ensuite qu'aux termes du 3° du II de l'article L124-5 du code de l’environnement, l'autorité publique réserve l'hypothèse de l'atteinte à des droits de propriété intellectuelle. Elle relève également qu'aux termes de l’article L311-4 du code des relations entre le public et l’administration : « les documents administratifs sont communiqués sous réserve des droits de propriété littéraire et artistique ». Dans sa décision du 8 novembre 2017 Association X n° 375704, le Conseil d’État a précisé que la réserve des droits de propriété intellectuelle implique, avant de procéder à la communication du document concerné n’ayant pas déjà fait l’objet d’une divulgation, au sens de l’article L121-2 du code de la propriété intellectuelle, de recueillir l’accord de son auteur.
Toutefois, la commission rappelle qu’aux termes du I de l’article L124-4 du code de l’environnement, l'autorité publique ne peut rejeter la demande d'une information relative à l'environnement à ce titre qu’après avoir apprécié l'intérêt d'une communication.
La commission estime dès lors que, quand bien même les études sollicitées seraient grevées de droits d'auteur, un refus de communication ne pourrait, en l'espèce, être opposé pour ce motif, eu égard à l’intérêt public servi par la communication de ces études, compte tenu des effets importants que peut potentiellement engendrer le projet en cause sur l’environnement.
En revanche, dans une telle hypothèse, conformément aux dispositions de l'article L321-2 du code des relations entre le public et l'administration, les droits de propriété intellectuelle qui seraient détenus sur ces documents empêcheraient le bénéficiaire du droit de communication de les utiliser à d'autres fins que celles de la mission de service public pour les besoins de laquelle ils ont été produits ou reçus. A l'inverse, en vertu de l'article L321-1 du même code, si aucun droit de propriété intellectuelle ne grevait les études dont s'agit, son destinataire pourrait les utiliser, s'il le souhaite, à d'autres fins.
Elle émet, dès lors, un avis favorable.