Avis 20224983 Séance du 13/10/2022
Monsieur X, X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 23 juillet 2022, à la suite du refus opposé par la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires à sa demande de communication, par courriel, des documents suivants relatifs :
1) au recrutement de Monsieur X par la société X :
a) l’ensemble des correspondances (courriers, courriels, ou autres) entre Monsieur X et son cabinet, et Monsieur X (fondateur d’X) ou toute autre personne pour le compte d’X, entre le 1er janvier 2019 et le 19 mai 2022 ;
b) l’ensemble des correspondances reçues ou envoyées par Monsieur X et son cabinet mentionnant la société X, entre le 1er janvier 2019 et le 19 mai 2022 ;
2) au recrutement de Monsieur X par la société X :
a) l’ensemble des correspondances (courriers, courriels, ou autres) entre Monsieur X et son cabinet et Monsieur X ou tout autre représentant de X, entre le 3 septembre 2019 et le 19 mai 2022 ;
b) l’ensemble des correspondances reçues ou envoyées par Monsieur X et son cabinet mentionnant la société X, entre le 3 septembre 2019 et le 19 mai 2022.
La commission, qui pris connaissance des observations du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, rappelle qu'aux termes de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration, constituent des documents administratifs soumis au droit de communication institué par le livre III de ce code, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l'État, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission.
La commission estime que les correspondances sollicitées, si elles existent, sont des documents administratifs communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve de l'occultation préalable des éventuelles mentions dont la divulgation porterait atteinte à l'un des intérêts visés aux articles L311-5 et 6 du même code, notamment au secret des délibérations du Gouvernement et des autorités responsables relevant du pouvoir exécutif, à la sécurité publique, à la sécurité des personnes ou encore à la recherche et à la prévention, par les services compétents, d'infractions de toute nature. Elle précise également que dans l'hypothèse où les occultations à opérer pour respecter ces secrets protégés devraient faire perdre d'intérêt la communication du document, l'administration serait fondée à la refuser.
La commission rappelle enfin que le droit d’accès doit rester compatible avec le bon fonctionnement des services et cède devant les demandes abusives, auxquelles les administrations ne sont pas tenues de répondre, en application du dernier alinéa de l'article L311-2 du code des relations entre le public et l'administration.
Par sa décision du 14 novembre 2018 ministre de la culture c/ X n° 420055, 422500, le Conseil d’État a jugé que revêt un caractère abusif, les demandes qui auraient pour effet de faire peser sur l’autorité saisie une charge disproportionnée au regard des moyens dont elle dispose. La commission précise, en outre, que lorsque les éléments d'information non communicables contenus dans un document dont la communication est sollicitée sont très nombreux et qu'il est possible de se procurer les éléments communicables autrement, la communication des documents après occultation des éléments non communicables peut être légalement refusée, au motif qu'elle ferait peser sur l'administration une charge excessive, eu égard aux moyens dont elle dispose et à l'intérêt que présenterait, pour les requérants, le fait de bénéficier, non de la seule connaissance des éléments communicables, mais de la communication des documents occultés eux-mêmes (CE, 27 mars 2020, X, n° 426623).
La commission rappelle, en outre, que le droit à la communication des documents administratifs est un droit objectif. L'intérêt d'une communication pour le demandeur ou ses motivations ne peuvent donc, en principe, pas fonder un refus de communication. Elle relève, toutefois, que, dans un avis n° 20220207 du 10 mars 2022, elle a fait évoluer sa doctrine en retenant désormais que, dans le cas particulier où l’autorité saisie fait valoir que la communication des documents sollicités ferait peser sur elle une charge de travail disproportionnée au regard des moyens dont elle dispose, il y a lieu de prendre en compte, pour apprécier le caractère abusif de la demande, non plus seulement le fait que la communication a objectivement perdu son intérêt, mais également l’intérêt qui s’attache à la communication pour le demandeur, ainsi que, le cas échéant, pour le public. Cette position a été confirmée par le Conseil d’État (CE, 17 mars 2022, n° 449620).
Elle relève, en l'espèce, que si, ainsi que le fait valoir l'administration s'agissant du point 2) de la demande, le fonds dans lequel les documents demandés auraient été versés, selon un protocole de versement pris en application de l'article 213-4 du code du patrimoine, comprendrait des dizaines de milliers de courriels, cette circonstance, à elle-seule, en l'absence de toute autre information relative aux moyens de l'administration, aux capacités d'identification et d'extraction des documents ou encore à l'ampleur du travail induit, n'est pas de nature à révéler l'existence d'une charge excessive pesant sur l'administration.
La commission émet, par suite, un avis favorable sous les réserves susmentionnées.