Avis 20224885 Séance du 08/09/2022

Maître X et Maître X, conseils de la société X, ont saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 8 août 2022, à la suite du refus opposé par le président de l'Union des groupements d'achats publics (UGAP) à leur demande de communication des documents suivants concernant le marché public de fourniture de mobilier, d'équipement de soins et de secours et l'exécution de prestations associées et annexes » - Lot n° 6 « Douche de lit » : 1) les attestations d'assurance ; 2) la certification que les appareils respectent bien la norme 60601-1 (exigée à l'annexe 1 de l'acte d'engagement) ; 3) le mémoire technique, sans occultations excessives, faisant ressortir notamment les renseignements techniques demandés à l'annexe 1 de l'acte d'engagement ; 4) l'annexe « qualité de service » renseignée par l'attributaire du contrat, sans occultations excessives ; 5) l'annexe « Performance en matière de protection de l'environnement » à l'acte d'engagement renseignée par l'attributaire du contrat, sans occultations excessives ; 6) le rapport d'analyse des offres, sans occultations excessives, faisant apparaître tous les commentaires et appréciations sur la société X, toute référence au prix global, toute appréciation sur les sous-critères « techniques », « qualité du service » ou encore « protection de l'environnement » ; 7) toute pièce afférente à la procédure de passation du contrat. La Commission, qui a pris connaissance de la réponse de l’UGAP, rappelle qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s’y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. En conséquence, la communication à un candidat écarté des motifs ayant conduit la commission d'appel d'offres à ne pas lui attribuer le marché ne permet pas de refuser la communication de ces documents. Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Il résulte de la décision du Conseil d’État du 30 mars 2016, Centre hospitalier de Perpignan (n° 375529), que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication. Le Conseil d’État a en outre précisé qu’au regard des règles de la commande publique, doivent être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l’ensemble des pièces d’un marché public et que, dans cette mesure, l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire, notamment, sont en principe communicables. Sont également communicables les pièces constitutives du dossier de consultation des entreprises (règlement de consultation, cahier des clauses administratives particulières, cahier des clauses techniques particulières…). En revanche, les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret des affaires ne sont, en principe, pas communicables. Il en va ainsi de l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ainsi que du mémoire technique, qui ne sont, de fait, pas communicables aux tiers. Revenant sur sa doctrine antérieure, la Commission a également précisé dans son Conseil n° 20221455, du 21 avril 2022, qu’il en va aussi désormais ainsi des factures, bons de commande, états d’acompte, décomptes et autres pièces établies dans le cadre de l’exécution d’un marché public, en tant que ces documents mentionnent les prix unitaires, lesquels doivent, dès lors, être occultés. L’examen de l’offre des entreprises non retenues au regard des mêmes principes conduit de même la Commission à considérer que leur offre de prix globale est, en principe, communicable mais qu’en revanche, le détail technique et financier de cette offre ne l’est pas. En outre, pour l’entreprise attributaire comme pour l’entreprise non retenue, les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration doivent entraîner l’occultation des éléments suivants : - les mentions relatives aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics ; - dans les documents préparatoires à la passation du marché (procès-verbaux, rapports d'analyse des offres) les mentions relatives aux détails techniques et financiers des offres de toutes les entreprises. La Commission précise enfin que les notes et classements des entreprises non retenues ne sont communicables qu'à celles-ci, chacune en ce qui la concerne, en application de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. En revanche, les notes, classements et éventuelles appréciations de l'entreprise lauréate du marché sont librement communicables. S'agissant, enfin, de l'attestation d'assurance remise par le titulaire du marché à l'occasion de la consultation, la Commission estime que ce document administratif est communicable à toute personne en faisant la demande sous réserve de l'occultation des mentions qui seraient protégées par le secret des stratégies commerciales, lesquelles comprennent les choix opérés par la société en matière d'assurances (niveaux de garanties, étendue de la couverture, procédés de fabrication assurés, etc.). En application de ces principes, la Commission émet un avis favorable à la communication de l’attestation d’assurance du titulaire du marché, sous la réserve tenant au secret des affaires, et prend note de l’intention du président de l'Union des groupements d'achats publics (UGAP) de faire prochainement droit à la demande sur ce point. La Commission estime en revanche que le mémoire technique de l’attributaire, ainsi que la certification et les annexes techniques renseignées par ce dernier, sont couverts par le secret des affaires, nonobstant la production exigée de ces documents par le règlement de la consultation au stade de l'examen de la recevabilité des candidatures ou de l’examen des offres. Elle émet, par conséquent, un avis défavorable aux points 2) à 5) de la demande. S’agissant de la demande de communication des commentaires et appréciations formulés dans le rapport d’analyse des offres sur la société X, la Commission estime que ceux-ci sont librement communicables au demandeur dès lors qu’ils se rapportent à son offre. Elle estime également que les appréciations portées sur l’offre du titulaire sur les sous-critères « techniques », « qualité du service » ou encore « protection de l'environnement » sont communicables, à l’exclusion des mentions descriptives précisant le détail technique et financier de son offre. Elle émet donc un avis favorable au point 6), dans cette mesure. En réponse à la demande d’observations qui lui a été adressée, l’UGAP a informé la Commission que le marché concerné est un accord-cadre à bons de commande qui, par nature, n’est pas conclu sur la base d’un prix global mais d’un bordereau de prix unitaires. En application des principes sus-rappelés, la Commission émet, par suite, un avis défavorable sur ce point, dans cette mesure. Enfin, la Commission estime que la demande est trop imprécise pour permettre à l'administration d'identifier les documents souhaités au point 7). Elle ne peut donc que déclarer cette demande irrecevable et inviter les demandeurs, s’ils le souhaitent, à préciser la nature et l’objet de ces documents à l'administration qu'ils ont saisie en lui adressant une nouvelle demande.