Avis 20224043 Séance du 21/07/2022
Maître X, conseil de Madame X épouse X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 23 mai 2022, à la suite du refus opposé par la directrice départementale de l’emploi, du travail, des solidarités et de la protection des populations (DDETSP) du Tarn-et-Garonne à sa demande de communication de tous les documents produits ou reçus par l'inspection du travail, susceptibles de décrire les circonstances et les causes de l'accident du travail dont a été victime sa cliente, alors salariée de la société coopérative agricole X, le 26 novembre 2018, notamment :
1) les constats effectués par l'agent de contrôle dans l'entreprise le 27 novembre 2018 ;
2) les documents transmis par l'employeur à l'agent de contrôle ;
3) les deux courriers d'observations adressés au directeur de l'établissement les 22 janvier et 14 mars 2019.
Après avoir pris connaissance de la réponse de la directrice départementale à la demande qui lui a été adressée, la Commission rappelle qu'en application des dispositions des articles R8112-1 et suivants du code du travail, l'inspecteur du travail contribue, notamment, à la prévention des risques professionnels, et fournit des rapports circonstanciés, mentionnant les accidents dont les salariés ont été victimes et leurs causes ; il dispose à cette fin d'un pouvoir d'accès aux documents de l'entreprise, fixé aux articles L8113-4 et suivants du code du travail. La Commission considère que les documents produits ou reçus par l'inspection du travail dans le cadre de sa mission de contrôle du respect de l'application des dispositions du code du travail et des autres dispositions légales relatives au régime du travail constituent des documents administratifs soumis au droit d'accès prévu par l'article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration.
Font toutefois obstacle à leur communication à des tiers les motifs énumérés à l'article L311-6 du même code, notamment la protection de la vie privée ainsi que les mentions dont la divulgation pourrait porter préjudice à des tiers, comme par exemple des témoignages ou des plaintes. Ne figurent néanmoins pas au nombre des mentions couvertes par cette dernière exception celles qui, sans citer le nom de personnes physiques et sans qualifier ou caractériser, au regard du droit applicable, de manquements de la part de l'entreprise, sont susceptibles de décrire les circonstances et causes de l'accident. La Commission précise également que Madame X doit également être regardée comme personne intéressée à l'égard des éléments relevés dans l'organisation de l'entreprise relative à sa propre situation de travail.
Elle émet donc, sous ces réserves, un avis favorable à la communication des documents demandés.
Elle précise en particulier que doivent notamment être occultés avant la communication :
- dans les deux procès-verbaux du comité social et économique de l'entreprise, toutes les mentions qui ne se rapportent pas à l'accident de Madame X ;
- dans la lettre d’observations du 22 janvier 2019, le paragraphe commençant par « J'ai entendu en votre présence... » ;
- dans le document « support d'aide au recueil des informations », les prénoms et noms des autres salariés que la victime.
La Commission précise enfin que la seule circonstance qu’un contentieux soit en cours et qu'une enquête puisse être diligentée à la demande de l'autorité judiciaire ne suffit pas à regarder la communication des documents sollicités comme étant de nature à porter atteinte au déroulement des procédures engagées devant les juridictions, au sens du f) du 2° de l’article L311-5 du code des relations entre le public et l’administration. Cette restriction au droit d’accès ne trouve en effet à s’appliquer que lorsque la communication des documents serait de nature à porter atteinte au déroulement de l’instruction, à retarder le jugement de l’affaire, à compliquer l’office du juge, ou à empiéter sur ses compétences et prérogatives, ce qui ne paraît pas être le cas en l’espèce. La seule circonstance que la communication de tels documents serait de nature à affecter les intérêts d'une partie à la procédure, qu'il s'agisse d'une personne publique ou de tout autre personne, qui au demeurant n'est pas établie en l'espèce, ne saurait légalement justifier un refus de communication sur ce fondement.