Avis 20223767 Séance du 21/07/2022

Monsieur X, pour l'association « X », a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 6 juin 2022, à la suite du refus opposé par le secrétaire général du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR) - Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES) à sa demande de communication des documents suivants, relatifs à l'appel à projets national 2021 « Lutte contre les dérives sectaires » lancé sous l'égide de la ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargée de la citoyenneté, ceci pour la période s'écoulant de la date du début de l'appel d'offre à projets national, soit le 20 mai 2021, à la date de la présente demande : 1) le dossier de chacune des « candidatures AAP 2021 » comprenant les actes de demandes, les actes d'instruction des demandes, et la décision finale de rejet ou d'acceptation (procès-verbal ou autre) ; 2) les notifications des résultats de l'appel à projets faites par la MIVILUDES auprès des lauréats ; 3) les propositions de la MIVILUDES pour le montant de la subvention allouée pour chaque dossier retenu (lauréats) ; 4) les décisions d'attribution aux lauréats de l'enveloppe d'un million d'euros dévolue à l'appel à projet 2021 avec toutes les pièces du dossier d'instruction ayant conduit à ces décisions (notamment le procès-verbal des délibérations) ; 5) les conventions conclues avec chaque lauréat avec toutes les pièces du dossier d'instruction ayant conduit à ces conventions ; 6) la correspondance (électronique et postale, incluant les pièces jointes) entre la MIVILUDES et les lauréats de l'appel à projets portant sur l'exécution et le suivi du projet retenu. En réponse à la demande qui lui a été adressée, le secrétaire général du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR) - Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES) a indiqué à la Commission qu’il considérait la demande de l'association « X » comme abusive. La Commission souligne cependant qu'une demande ne peut être considérée comme abusive que lorsqu'elle vise de façon délibérée à perturber le fonctionnement d'une administration ou à faire peser sur elle une charge qui excède les moyens dont elle dispose. Toute demande portant sur une quantité importante de documents ou le fait pour une même personne de présenter plusieurs demandes à la même autorité publique ne sont pas nécessairement assimilables à des demandes abusives. En l'espèce, il ne lui est pas apparu, compte tenu de la nature des documents demandés, du destinataire de la demande et des éléments portés à sa connaissance, que la présente demande présenterait un caractère abusif. Elle invite toutefois l'association « X » à faire preuve de discernement et de modération dans l'usage qu'elle fait du droit d'accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. La Commission indique, à titre liminaire, que les documents produits ou reçus par la MIVILUDES dans le cadre de sa mission de service public constituent des documents administratifs au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration. Elle précise à cet égard, ainsi que l’a jugé le Conseil d’État dans une décision du 22 février 2013 (n° 337987, Fédération chrétienne des témoins de Jéhovah de France), que la communication de tels documents ne peut être refusée au seul motif que, compte tenu de la mission de cette autorité administrative, cette communication méconnaîtrait les dispositions de l'article L311-5 du code des relations entre le public et l'administration, mais qu’il convient de rechercher si, en raison des informations qu'ils contiendraient, la divulgation de ces documents risquerait de porter atteinte à la sûreté de l'État, à la sécurité publique, à la sécurité des personnes et si une communication partielle, ou après occultation de certaines informations, serait, le cas échéant, possible. En premier lieu, la Commission déduit des observations de l’administration que l’information mentionnée au point 3), qui s’apparente à une demande de renseignement, n’existe pas. Elle déclare, par suite, sans objet la demande d’avis dans cette mesure. En deuxième lieu, la Commission indique que l’article 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations prévoit que le budget et les comptes de tout organisme de droit privé ayant reçu une subvention, la convention qu’il doit conclure avec l’autorité administrative qui attribue la subvention dépassant un certain seuil, et le compte rendu financier de la subvention, doivent être communiqués à toute personne qui en fait la demande, dans les conditions prévues par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. Elle ajoute que les documents non expressément mentionnés à l'article 10 de la loi du 12 avril 2000 se rapportant à un organisme privé aidé ou subventionné sont communicables à toute personne qui en fait la demande sur le fondement de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, dès lors qu'ils sont détenus par une autorité administrative dans le cadre du contrôle qu’elle exerce sur cet organisme, sous réserve de l’occultation préalable des mentions relevant du secret de la vie privée ainsi que le cas échéant, du secret des affaires. Elle précise, en troisième lieu, que l’appel à projets n’est pas une procédure formalisée définie et encadrée par le législateur ou le pouvoir réglementaire à l’instar des contrats de la commande publique mais une procédure de consultation préparatoire définie par la collectivité publique dans le but de sélectionner différents projets préalablement à la vente d'un bien immobilier, à la conclusion d'une convention de subventionnement ou à l’attribution d'une aide publique. Elle rappelle, à cet égard, sa position constante selon laquelle (conseil n° 20120845 du 8 mars 2012, avis n° 20160417 du 3 mars 2016) le droit de communication, dont bénéficient tant les candidats non retenus que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s’exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. Sont notamment visées par cette réserve, les mentions relatives aux moyens techniques et humains, aux rapports d’évaluation, au chiffre d’affaires, aux bilans financiers et aux coordonnées bancaires du candidat. Lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents administratifs, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication. La Commission considère de façon générale que, sous réserve des spécificités propres à chaque appel à projets, l'offre détaillée de l'organisme retenu est communicable, alors que seules les orientations générales définies par les candidats non retenus pour répondre aux exigences du cahier des charges sont communicables (conseils n° 20120845 et 20120849 du 8 mars 2012). En application de ces principes, la Commission estime que les documents sollicités, s'ils existent et dont elle n'a, en tout état de cause, pas pu prendre connaissance, sont communicables au demandeur en application de l’article L311-1, sous l’ensemble des réserves précédemment évoquées. Elle émet, dans cette mesure, un avis favorable à la demande.