Avis 20223147 Séance du 23/06/2022

Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 6 mai 2022, à la suite du refus opposé par le vice-président du Conseil d'État à sa demande de copie des documents suivants relatifs au retard de livraison du futur tribunal administratif de Marseille, qu'il s'agisse d'un marché public de travaux ou d'une acquisition en vente en l'état futur d'achèvement (VEFA) : 1) toute pièce relative (selon le cas applicable) : a) à l’application de pénalités de retard ; b) à l'existence d'un contentieux portant sur ce retard de livraison (notamment copie de la notification de dépôt d'une requête) ; c) ou d'un règlement amiable des litiges portant sur ce retard de livraison (notamment copie de la notification de dépôt d'une requête, ou décision d’autorisation de la transaction) ; 2) en l’absence de pénalités ou de procédure amiable ou contentieuse sur ce retard : a) toute pièce contractuelle arrêtant la date de livraison prévue (acte d'engagement ou équivalent, avenants le cas échéant) ; b) toute pièce contractuelle prévoyant des pénalités de retard (notamment le cahier des clauses administratives particulières, le cahier des clauses techniques particulières s'il y a dérogation au cahier des clauses administratives générales des travaux). En réponse à la demande qui lui a été adressée, le vice-président du Conseil d'État a informé la Commission de ce que le contrat afférent au tribunal administratif de Marseille constitue une vente en état futur d'achèvement (VEFA) qui s'est accompagnée de la passation de marchés publics en vue de l'aménagement des locaux, et que le délai de mise à disposition des biens était déterminé en tenant compte de la réalisation de ces travaux. Il a également informé la Commission de ce qu'aucune procédure pour mettre en œuvre des pénalités de retard n'a été engage dans le cadre du contrat de VEFA. La Commission comprend néanmoins, de ces éléments et de la formulation de la demande de Monsieur X, que celle-ci ne vise en réalité pas seulement la communication de documents afférents au contrat de VEFA mais également de documents afférents aux marchés publics susmentionnés. 1. S'agissant du point 1) de la demande : La Commission, qui prend acte des observations produites par l'administration, ne peut que déclarer sans objet le point 1) de la demande en tant que les documents demandés ont trait au contrat de VEFA. La Commission rappelle que les documents produits ou reçus dans le cadre et pour les besoins d’une procédure juridictionnelle, qu'elle soit de nature civile, pénale ou commerciale, ne présentent pas un caractère administratif et n'entrent donc pas dans le champ d'application du livre III du code des relations entre le public et l'administration. Il en va ainsi, notamment des jugements, ordonnances, décisions ou arrêts rendus par les juridictions de l'ordre judiciaire ou administratif. C'est aussi le cas, plus largement, des dossiers de demande d'aide juridictionnelle (CE, 5 juin 1991, n° 102627), des décisions du parquet, des dossiers d'instruction, des procès-verbaux d'audition, des rapports d'expertise ou des mémoires et observations des parties – c'est-à-dire de l'ensemble des pièces de procédure proprement dites – mais aussi des documents de travail internes à une juridiction, destinés à leurs membres et concourant à l'instruction des affaires ou à la formation des jugements (CE, 28 avril 1993, n° 117480). Ainsi, les documents, quelle que soit leur nature, qui sont détenus par les juridictions et qui se rattachent à la fonction de juger dont elles sont investies tels par exemple des tableaux de roulement, déterminant la composition d’une formation de jugement n’ont, par suite, pas non plus le caractère de document administratif au sens du livre III du code des relations entre le public et l'administration (CE, 7 mai 2010, n° 303168). Par conséquent, dans la mesure où les documents visés au b) du point 1) existeraient pour ce qui concerne les marchés publics, elle se déclare incompétente pour se prononcer, dans cette mesure, sur la demande. Enfin, dans la mesure où les documents visés aux a) et c) du point 1) existeraient pour ce qui concerne les marchés publics, la Commission précise que l'article L311-6 fait obstacle, en son 3°, à ce que soit communiqué à un tiers un document qui révélerait un comportement susceptible de nuire à son auteur, que ce dernier soit une personne physique ou une personne morale (avis n° 20132830 du 24 octobre 2013 et CE, n° 392711, du 21 octobre 2016, Union départementale CGT d'Ille-et-Vilaine). En application de ce 3°, les documents infligeant une pénalité à un cocontractant d'une personne publique ne sont donc pas communicables à un tiers. Par conséquent, elle ne peut qu'émettre un avis défavorable à la communication des documents mentionnés aux a) et c) du point 1), et prend par ailleurs acte de la réponse du secrétaire général adjoint du Conseil d'État qui indique qu'aucune procédure d'application des pénalités de retard n'a été engagée dans le cadre de la vente en l'état futur d'achèvement considérée. Elle émet donc, dans cette mesure, un avis défavorable. 2. S'agissant du point 2) de la demande : La Commission comprend que la demande de Monsieur X vise, en son a), la date de livraison de l'immeuble dans le cadre du contrat de VEFA mais également de réalisation des travaux et, en son b), les pièces contractuelles de la VEFA ainsi que celles des marchés publics relatifs à l'aménagement des locaux. Elle rappelle que les documents se rapportant à une acquisition en vente en l'état futur d'achèvement, tout comme les marchés publics, constituent des documents administratifs communicables, une fois les contrats signés, à toute personne qui en fait la demande en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve, le cas échéant, du respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Par conséquent, sous ces réserves, elle émet un avis favorable à la communication des documents mentionnés aux a) et b) du 2).