Avis 20223143 Séance du 08/09/2022
Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 10 mai 2022, à la suite du refus opposé par la directrice générale de SNCF Gares et Connexions à sa demande de communication, par voie dématérialisée, des documents suivants :
1) le contrat de concession portant sur le projet de transformation de la Gare du Nord, dont le numéro d’avis de marché est le X ;
2) le rapport d'analyse des offres remises pour le contrat de concession résilié selon les informations rendues publiques dans la presse ;
3) le rapport annuel de performance du pôle d'échange Multimodal Montpellier Sud de France, à compter de de la mise en service de la gare, soit en 2018, 2019, 2020 et 2021, établi en vertu de l’article 33 du décret n° 2015‐154 du 11 février 2015 par le titulaire du contrat de partenariat SAS X.
En l'absence de réponse de la part de la directrice générale de SNCF Gares et connexions, la Commission rappelle qu'une fois signés, les délégations de service public définies comme des contrats de concession de travaux ou de service au sens du code de la commande publique (L1121-1 à L1121-3) et les documents qui s'y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. En conséquence, la communication à un candidat écarté des motifs ayant conduit à ne pas lui attribuer le contrat ne permet pas de refuser la communication de ces documents.
En application de ces principes, la Commission estime, en particulier, que les documents du dossier de consultation des entreprises se rapportant à la convention initiale, tels que le cahier des charges ou le règlement de consultation ne revêtent jamais un caractère préparatoire et ne sont pas couverts par le secret des affaires. Ces documents sont, dès lors, intégralement communicables à toute personne qui en fait la demande en application de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration. Il en va de même de la liste des entreprises ayant participé à la procédure.
Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Sont notamment visées par cette réserve, pour l’ensemble des candidats, y compris l’entreprise retenue, les mentions relatives à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des contrats publics.
La Commission considère, en outre, de façon générale que sous réserve des particularités propres à chaque délégation :
- l'offre détaillée de l'entreprise retenue est en principe communicable, dans la mesure où elle reflète la qualité et le coût du service rendu à l’usager ;
- l'offre globale des entreprises non retenues est, en principe, elle aussi communicable. En revanche, le détail technique et financier de leurs offres ne l’est pas. De plus, doivent être occultées dans les documents préalables à la conclusion du contrat de concession (procès-verbaux, rapports de la commission de délégation de service public et de l'autorité habilitée à signer le contrat, documents relatifs à la négociation des offres…) les mentions relatives aux détails techniques et financiers de ces offres ;
- de la même manière, si les moyens techniques et humains mentionnés dans les offres des candidats sont protégés par le secret des affaires, certaines mentions se rapportant au cocontractant, tels que le montant de la masse salariale ou la liste des biens et équipements mis à sa disposition sont en revanche librement communicables, en ce qu’elles reflètent le coût du service ;
- les notes et classements des entreprises non retenues ne sont communicables qu'à celles-ci, chacune en ce qui la concerne, en application de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. En revanche, les notes, classements et éventuelles appréciations de l'entreprise lauréate du contrat sont librement communicables ;
- le contrat de délégation de service public est communicable ainsi que ses annexes, sous réserve de l'occultation des éléments couverts par le secret des affaires.
En application de ces principes, la commission estime que le document mentionné au 1) est librement communicable à toute personne qui en fait la demande en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve de l'occultation des éléments couverts par le secret des affaires. Elle émet dès lors et sous cette réserve un avis favorable sur ce point.
La Commission estime ensuite que le document mentionné au point 2) est également librement communicable aux tiers en tant seulement qu’il concerne l’attributaire, dans les conditions rappelées ci-dessus. Elle émet, dès lors, un avis favorable dans cette mesure.
Enfin, s’agissant du point 3), la commission rappelle que le rapport annuel du délégataire, remis à l'autorité délégante en vertu de l'article L1411-3 du code général des collectivités territoriales, dont celle-ci prend acte et qui est joint au compte administratif en vertu de l'article R1411-8 du même code, a le caractère de document administratif au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration et est communicable à ce titre. La commission relève que si, de manière générale, les pièces annexées aux délibérations, au budget et aux comptes des organes délibérants des communes, des établissements de coopération intercommunale et des syndicats mixtes sont communicables à toute personne qui en fait la demande en application, respectivement, des articles L2121-26, L5211-46 et L5721-6 du code général des collectivités territoriales, les documents remis par le délégataire de service public de l’organe délibérant ne sont mis à la disposition du public, en vertu de l'article L1411-13 du même code, dans sa version en vigueur avant la codification, que sous les réserves prévues à l'article 6 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal, désormais codifiées à l'article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. Bien qu'elle ne soit pas compétente pour interpréter ledit article L1411-13, la commission estime qu'il en résulte que les exceptions prévues à l'article 6 précités sont opposables en la matière. Elle relève en outre que si cet article 6 a été codifié aux articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l’administration, et que dans sa version en vigueur depuis le 1er avril 2016, l’article L1411-13 ne mentionne plus que les réserves prévues à l'article L311-5 du code des relations entre le public et l'administration, il ne ressort ni des travaux préparatoires de la loi d’habilitation ni de ceux de l’ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession qui a mis à jour la référence à l’article 6 précité, que les auteurs de ces textes ont entendu modifier l’étendue des réserves opposables à cette mesure de publicité.
En conséquence le rapport du délégataire de service public est communicable à toute personne le demandant, sous réserve de l'occultation des mentions protégées par l'article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration, et relevant du secret des affaires ou de la protection due à la vie privée.
La Commission rappelle, en outre, que de façon générale, les informations relatives aux moyens humains et techniques et celles reflétant la stratégie commerciale du délégataire sont couvertes par le secret des affaires. Ainsi, la commission a estimé que les charges et produits de l'exploitation d'un service public délégué ne sont pas couverts par ce secret : seules doivent être occultées dans les comptes de résultat et les comptes prévisionnels, les données faisant apparaître de façon détaillée les charges de personnel et de fonctionnement, qui reflètent les moyens techniques et humains de l'entreprise délégataire (conseil n° 20171851), dans cette mesure, le résultat de l'exercice comptable ainsi que les charges et produits d'exploitation sont communicables. Elle a également considéré (conseil n° 20171851) que le programme de renouvellement des équipements par l'exploitant d'un service public était communicable sans occultations, ainsi que les données tarifaires et la redevance perçue dès lors que celle-ci a un impact sur le coût du service (conseils n° 20150349 et 20170902). Les tableaux d'amortissement sont également communicables sous réserve du secret des affaires (avis n° 20144069 et 20171373) et à condition que la demande porte sur les amortissements de l'activité concédée et non sur les comptes de la société, sauf à ce qu'elle soit dédiée à l'activité comme indiqué précédemment. Les charges de personnel, les charges de structure et les frais financiers dans l'exploitation de l'activité sont communicables dans leur montant total, alors que les éléments détaillés les concernant sont protégés par le secret des affaires, ainsi que les effectifs précis des sociétés exploitantes, le montant de leurs actifs et des dettes, le niveau de bénéfice et le taux de rentabilité.
A la différence des informations relatives aux moyens humains et techniques du délégataire ainsi que celles reflétant sa stratégie commerciale, qui sont couvertes par le secret des affaires, les informations permettant d'apprécier la qualité et le coût du service devant être rendu aux usagers, sont librement communicables.
En application de ces principes, elle émet un avis favorable à la communication du document mentionné au point 3), sous les réserves ainsi rappelées.