Avis 20222359 Séance du 02/06/2022

Monsieur X, X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 14 avril 2022, à la suite du refus opposé par le directeur général d'EDF à sa demande de communication, à la suite d'une première réponse partielle, des élements suivants relatifs aux problèmes détectés sur les assemblages de combustible nucléaire de l’EPR de Taishan (réacteur n° 1) et à ses implications pour l’EPR de Flamanville (FA3) : I) concernant les assemblages de combustible nucléaire de l’EPR de Flamanville : 1) sur la nécessité ou non d’éliminer le combustible neuf : a) la confirmation ou non que le combustible neuf livré à Flamanville 3 entre octobre 2020 et l’été 2021 (et actuellement entreposé dans la piscine du bâtiment combustible) ne sera jamais chargé dans la cuve ; b) dans l’affirmative, ledit combustible est-il actuellement considéré comme relevant de la catégorie des déchets radioactifs (quelle serait alors la filière d’élimination retenue ?) ou de celle des matières nucléaires (est-il envisagé alors de le renvoyer à l’usine de retraitement de la Hague ?) ? ; 2) sur la fabrication éventuelle d’un nouveau combustible : est-t-il exact qu’EDF a commandé à X un nouveau combustible incluant une modification de l’alliage M5 utilisé pour les gaines (afin de tenter de résoudre des problèmes de corrosion) et la mise en œuvre de grilles renforcées (permettant de mieux supporter les vibrations7) dont certaines utilisent la technologie de X Allemagne ? ; II) concernant les possibles défauts de conception de la cuve de FA3 : dans le cadre des essais hydrauliques, réalisés sur maquette par X vers 2007-2008, lors de la phase de conception de FA3, et qui auraient conduit à la mise en place d’un déflecteur sans permettre de parvenir à des résultats complètement satisfaisants, EDF envisage-t-elle des actions (modification du déflecteur, fonctionnement à puissance réduite ou autre) permettant de réduire les vibrations que causeraient les sollicitations hydrauliques ? ; III) concernant la ligne d’expansion du pressuriseur (LEP) de FA3 : 1) EDF considère-t-elle qu’il y a un rapport entre les problèmes survenus sur le réacteur n° 1 de Taishan et la problématique de vibrations élevées de la LEP observée sur différents réacteurs EPR mentionnée par l’IRSN dans son avis n° 2021-00049 du 31 mars 2021 et dont l’origine restait alors à identifier ? ; 2) l'indication des constats, des réacteurs concernés (notamment Flamanville 3) et de l’état d’avancement des études sur les causes et les solutions à apporter. La commission, qui a pris connaissance de la réponse du directeur général d'EDF à la demande qui lui a été adressée, rappelle, d'une part, que l'article L124-2 du code de l'environnement qualifie d'informations relatives à l'environnement toutes les informations disponibles, quel qu'en soit le support, qui ont notamment pour objet : « 1º L'état des éléments de l'environnement, notamment l'air, l'atmosphère, l'eau, le sol, les terres, les paysages, les sites naturels, les zones côtières ou marines et la diversité biologique, ainsi que les interactions entre ces éléments ; 2º Les décisions, les activités et les facteurs, notamment les substances, l'énergie, le bruit, les rayonnements, les déchets, les émissions, les déversements et autres rejets, susceptibles d'avoir des incidences sur l'état des éléments visés au 1º ; 3º L'état de la santé humaine, la sécurité et les conditions de vie des personnes, les constructions et le patrimoine culturel, dans la mesure où ils sont ou peuvent être altérés par des éléments de l'environnement, des décisions, des activités ou des facteurs mentionnés ci-dessus (...) ». Selon les articles L124-1 et L124-3 du même code, le droit de toute personne d'accéder à des informations lorsqu'elles sont détenues, reçues ou établies par les autorités publiques ou pour leur compte, s'exerce dans les conditions définies par le titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve des dispositions du chapitre IV du titre II du livre I du code de l'environnement. A cet égard, les articles L124-4 et L124-5 précisent les cas dans lesquels l'autorité administrative peut rejeter une demande d'information relative à l'environnement. La commission relève d'autre part qu'aux termes de l’article 19 de la loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire, désormais codifié à l'article L125-10 du code de l'environnement, qu'elle est compétente pour interpréter conformément au B de l’article L342-2 du code des relations entre le public et l’administration, toute personne a le droit d'obtenir, auprès de l'exploitant d'une installation nucléaire de base, les informations détenues sur les risques liés à l'exposition aux rayonnements ionisants pouvant résulter de cette activité et sur les mesures de sûreté et de radioprotection prises pour prévenir ou réduire ces risques ou expositions, dans les conditions définies aux articles L124-1 à L124-6 du code de l'environnement. Elle estime que, eu égard à l’objet de ces dispositions, qui visent à assurer un degré élevé de transparence et à permettre au public d’apprécier si et dans quelle mesure il est ou pourrait être exposé à des rayonnements ionisants, elles doivent être interprétées comme incluant non seulement les informations sur la nature, la quantité, la composition et le caractère nocif des émissions, mais également sur les risques d’émissions ainsi que sur les mesures prises pour les prévenir ou en limiter les effets. La commission a ainsi estimé, dans un conseil n° 20093465 du 5 novembre 2009, que les rayonnements ionisants, de même que les déchets et rejets d’effluents issus des installations nucléaires, constituent des émissions au sens de l'article L124-5 du code de l'environnement qui prévoit que la communication des informations relatives à des émissions dans l’environnement ne peut être refusée que si elle porte atteinte à la conduite de la politique extérieure de la France, à la sécurité publique ou à la défense nationale, au déroulement des procédures juridictionnelles ou à la recherche d'infractions pouvant donner lieu à des sanctions pénales, ou à des droits de propriété intellectuelle. En l’espèce, la commission, qui relève que certains points de la demande, notamment les I) 2) et III) 1), s'apparentent à une demande de renseignement, considère que la demande concerne les conséquences des incidents constatés sur les réacteurs de type EPR de la centrale nucléaire de Taishan et sur la conception du réacteur de type EPR de la centrale nucléaire de Flamanville et de son combustible, lesquelles présentent un lien suffisant avec des risques d’émissions et des mesures prises pour les prévenir ou en limiter les effets, dès lors en particulier que ces réacteurs sont conçus et construits par la même société X. Elle émet donc, dans ces conditions et sous les réserves rappelées plus haut, un avis favorable.