Avis 20222139 Séance du 12/05/2022
Maître X, conseil de la société X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 1er avril 2022, à la suite du refus opposé par le président de Toulouse Métropole à sa demande de copie, par courrier électronique, des documents suivants concernant le marché public n° X portant sur des prestations de conduite de projet « Système d'information », déclaré sans suite par Toulouse Métropole :
1) la liste des candidats et soumissionnaires, telle que le registre des dépôts des plis ;
2) le rapport de présentation de la consultation établi conformément à l’article R2184-1 du code de la commande publique ;
3) la lettre de candidature (formulaire DC1) et la déclaration du candidat (formulaire DC2) des autres candidats, ou tout autre pièce en tenant lieu ;
4) le procès-verbal d’ouverture des candidatures et des offres ;
5) le rapport d’analyse des candidatures, ou toute pièce en tenant lieu se prononçant notamment sur les capacités des candidats ;
6) le rapport d’analyse des offres comprenant les éléments de notation et le classement, ou toute pièce en tenant lieu ;
7) l’offre de prix globale des entreprises soumissionnaires ;
8) les échanges avec les candidats, quelle que soit leur forme, tels que les questions posées et les réponses communiquées ainsi que les demandes de régularisations ;
9) les courriers de la direction du numérique de Toulouse Métropole portant sur cette procédure, notamment sa déclaration sans suite ;
10) les procès-verbaux de la commission d’appel d’offres et le procès-verbal du choix de la commission d’appel d’offres ;
11) les lettres de notification de rejet adressées aux entreprises ;
12) toute autre pièce se rapportant à la procédure de passation du marché considéré ;
13) s’agissant des actes administratifs portant sur les fonctions de Monsieur X :
a) tout arrêté, délibération ou autre décision fixant l’étendue des attributions, délégations et compétences de Monsieur X au sein de Toulouse Métropole et de la ville de Toulouse, pendant les trois procédures de passation des marchés publics n° X, n° X et n°X auxquels les sociétés X et X ont candidaté et de tous marchés auxquels elles sont susceptibles de candidater ;
b) tout arrêté, délibération et plus généralement toute décision ou mesure ayant ou ayant eu pour objet de garantir l’absence d’intervention ou d’influence de Monsieur X, de quelque nature qu’elle soit, dans la conception, l’attribution ou l’exécution des trois marchés publics précités auxquels les sociétés X et X ont candidaté et de tous marchés auxquels elles sont susceptibles de candidater ;
14) les marchés publics attribués par Toulouse Métropole, seule ou en groupement de commandes, et en cours d’exécution, à la société X Group, à la société X, à la société X, et à la société X dont l’objet porte :
a) soit sur des prestations d’assistance à maitrise d’ouvrage pour des études d’opportunité, de conception dans le cadre de l’évolution de systèmes d'informations ou des prestations équivalentes ;
b) soit sur des prestations de conduite de projets dans le cadre de l’évolution de systèmes d'informations ou des prestations équivalentes ;
c) soit sur des prestations en lien avec la transformation numérique ;
et ce, quel que soit le type de procédure ou d’organisation d’achat relevant du code de la commande publique auxquelles Toulouse Métropole aurait pu recourir, seule ou en groupement de commandes, qu’il s’agisse de procédures formalisées, de procédures adaptées, de procédures d’attribution sans publicité ni mise en concurrence préalables, ou encore d’achats par l’intermédiaire d’une centrale d’achats et notamment l’Union des Groupements d’Achats Publics (UGAP).
En réponse à la demande d’observation qui lui a été adressée, le président de Toulouse métropole a informé la Commission que les documents sollicités aux points 1), 2), 4), 5), 6), 7), 8), 9), 11), 12), 13) et 14) ont été communiqués au demandeur par un courrier du 5 avril 2022, dont une copie lui a été transmise. Elle ne peut, par conséquent, que déclarer la demande sans objet sur ces points.
Le président de Toulouse métropole a également indiqué à la Commission que la décision de déclarer la procédure sans suite n’a pas fait l’objet d’un procès-verbal. La Commission relève, à ce titre, que les motifs de cette décision sont exposés de façon détaillée dans le rapport d’analyse des candidatures et des offres transmis à Maître X.
Elle déclare donc le point 10) de la demande sans objet, en tant que portant sur un document inexistant.
S’agissant du point 3) de la demande, la Commission rappelle, d’une part, sa position constante selon laquelle le caractère communicable des documents relatifs à la passation d'un marché lorsque la procédure a été déclarée infructueuse ou sans suite dépend du sort que la collectivité entend réserver à son projet. Si une procédure est relancée après que la précédente a été déclarée infructueuse ou qu'il a été décidé de ne pas lui donner de suite, seule cette déclaration ou cette décision est immédiatement communicable, tous les autres documents conservant un caractère préparatoire jusqu'à la signature du contrat issu de la nouvelle procédure. Si la collectivité renonce en revanche à conclure le contrat envisagé, les documents relatifs aux procédures déclarées infructueuses ou sans suite perdent leur caractère préparatoire et sont soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration.
En l’espèce, la Commission comprend des éléments portés à sa connaissance que la procédure de consultation initiale a été déclarée sans suite et qu’il n’est pas envisagé de relancer une nouvelle consultation. Elle déduit par ailleurs des informations portées à sa connaissance qu’un contrat a été conclu à l’issue de la nouvelle procédure. Elle en déduit par conséquent que les documents sollicités au point 3) ont perdu leur caractère préparatoire.
La Commission rappelle, d’autre part, qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s'y rapportent sont considérés comme des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. En conséquence, la communication à un candidat écarté des motifs ayant conduit la commission d'appel d'offres à ne pas lui attribuer le marché ne permet pas de refuser la communication de ces documents. Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de cette loi.
Il résulte de la décision du Conseil d’État du 30 mars 2016, "Centre hospitalier de Perpignan" (n°375529), que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication.
Le Conseil d’État a en outre précisé qu’au regard des règles de la commande publique, doivent être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l’ensemble des pièces d’un marché public et que, dans cette mesure, l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire, notamment, sont en principe communicables. Sont également communicables les pièces constitutives du dossier de consultation des entreprises (règlement de consultation, cahier des clauses administratives particulières, cahier des clauses techniques particulières…).
En revanche, les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité concurrentiel et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret des affaires ne sont, en principe, pas communicables. Il en va ainsi de l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ainsi que du mémoire technique, qui ne sont, de fait, pas communicables aux tiers.
L’examen de l’offre des entreprises non retenues au regard des mêmes principes conduit de même la Commission à considérer que leur offre de prix globale est, en principe, communicable mais qu’en revanche, le détail technique et financier de cette offre ne l’est pas.
En outre, pour l’entreprise attributaire comme pour l’entreprise non retenue, les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration doivent entraîner l’occultation des éléments suivants :
- les mentions relatives aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics ;
- dans les documents préparatoires à la passation du marché (procès-verbaux, rapports d'analyse des offres) les mentions relatives aux détails techniques et financiers des offres de toutes les entreprises.
La Commission précise enfin que les notes et classements des entreprises non retenues ne sont communicables qu'à celles-ci, chacune en ce qui la concerne, en application de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. En revanche, les notes, classements et éventuelles appréciations de l'entreprise lauréate du marché sont librement communicables.
La Commission considère, en application de ces principes, que seules les pièces de candidature remises par l’attributaire sont communicables, sous réserve de l’occultation des mentions couvertes par le secret des affaires. Or, dans le cadre d’une procédure déclarée sans suite, aucun candidat ne peut être qualifié d’attributaire. Les pièces de candidatures de l’ensemble des entreprises ne sont donc communicables qu’à celles-ci, chacune en ce qui la concerne.
La Commission émet donc un avis défavorable au point 3) de la demande.