Avis 20221994 Séance du 12/05/2022

Maître X, conseils de la X, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 10 mars 2022, à la suite du refus opposé par le secrétaire général du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR) - Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES) à sa demande de communication de l'ensemble des signalements concernant les témoins de Jéhovah depuis 2015, dont il est fait état dans le rapport de la MIVILUDES de 2018‐2020. En réponse à la demande qui lui a été adressée, le secrétaire général du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR) - Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES) a indiqué à la commission que la demande de la X opère une confusion entre les véritables signalements et les saisines de la MIVILUDES, qui incluent également les interrogations et les échanges institutionnels. Il précise que les signalements, qui consistent en des témoignages, contiennent de nombreux éléments de nature à porter atteinte à la sécurité et à la vie privée des personnes qui y sont mentionnées. Il estime que la divulgation de ces témoignages, même partiellement occultés, leur porterait préjudice et, qu'en outre, l'occultation des documents les rendraient inintelligibles et sans intérêt pour le demandeur tout en faisant peser une charge de travail importante sur la mission. Enfin, il considère que la demande est générale et imprécise et qu'au regard du nombre et de la variété de documents demandés, le travail de recherche et d'occultation impliquerait une charge disproportionnée au regard des moyens dont dispose la MIVILUDES. La commission rappelle que les documents produits ou reçus par la Miviludes dans le cadre de sa mission de service public constituent des documents administratifs au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration. Elle précise à cet égard, ainsi que l’a jugé le Conseil d’État dans une décision du 22 février 2013 (n° 337987, X), que la communication de tels documents ne peut être refusée au seul motif que, compte tenu de la mission de cette autorité administrative, cette communication méconnaîtrait les dispositions de l'article L311-5 du code des relations entre le public et l'administration, mais qu’il convient de rechercher si, en raison des informations qu'ils contiendraient, la divulgation de ces documents risquerait de porter atteinte à la sûreté de l'État, à la sécurité publique, à la sécurité des personnes et si une communication partielle, ou après occultation de certaines informations, serait, le cas échéant, possible. La commission rappelle également qu'en application de l'article L311-6 du même code, ne sont communicables qu'aux intéressés les mentions dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée et au secret médical, ainsi que celles qui portent une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique nommément désignée ou facilement identifiable, ou font apparaître le comportement d'une personne, dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice. En l'espèce, la commission, qui n'a pu prendre connaissance des documents sollicités, estime qu'ils sont communicables au demandeur, sous réserve que soient occultés ou disjoints les éléments de nature à porter atteinte à la vie privée des tiers, à porter une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable, ou à faire apparaître le comportement d'une personne autre qu'une autorité administrative agissant dans le cadre de ses fonctions, dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice, en application des dispositions de l'article L. 311-6 du code des relations entre le public et l'administration. Elle précise également que lorsque l'ampleur des occultations à opérer en application de ces dispositions prive d'intérêt la communication du document, ce qui s'apprécie au cas par cas, l'administration est alors fondée à refuser sa communication. La commission prend note de ce que le traitement de la demande, qui porte sur un nombre important de documents, de nature diverse, fait peser des contraintes importantes sur les services de la MIVILUDES. Toutefois, compte tenu des éléments portés à sa connaissance, il ne lui est pas apparu que cette demande présente un caractère abusif. Elle souligne, à cet égard, que si le volume des documents demandés ne peut, par lui-même, justifier légalement un refus de communication, l’administration est en revanche fondée, dans ce cas, à aménager les modalités de communication afin que l'exercice du droit d'accès reste compatible avec le bon fonctionnement de ses services. Si la demande porte sur une copie de documents volumineux qu’elle n’est pas en mesure de reproduire aisément compte tenu de ses contraintes matérielles, l'administration est notamment en droit d'inviter le demandeur à venir consulter ces documents sur place et à emporter copie des seuls éléments qu’il aura sélectionnés. Alternativement, elle peut convenir avec le demandeur d’un échéancier de communication compatible avec le bon fonctionnement des services. Elle invite en outre le demandeur à faire preuve de modération dans l’exercice du droit d’accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l’administration, et rappelle que l’administration n’est pas tenue de donner suite aux demandes présentant un caractère abusif. Sous l'ensemble de ces réserves, la commission émet donc un avis favorable.